À part de petits autocollants signalant la présence de biocarburant dans les réservoirs, rien ne distingue l'A321 d'Air France allégé en émission de C02 d'un appareil ordinaire. La compagnie a pourtant voulu créer l'événement jeudi en faisant du vol AF6129 entre Toulouse et Orly le plus économe en émission de gaz carbonique.
Lufthansa, KLM et Aeromexico ont mené des expériences de ce type, mais Air France a cumulé l'utilisation de biocarburant et tous les moyens de diminuer ses émissions de CO2. C'est une opération de «pédagogie et de sensibilisation», selon Bertand Lebel, directeur général adjoint du développement durable d'Air France KLM.
Pour émettre deux fois moins de C02 que sur un vol classique, Air France a joué sur plusieurs tableaux. D'abord, elle a allégé le poids des avions court et moyen-courriers (sièges, trolleys, chariots…). Ensuite, le pilote opte pour une trajectoire optimisée et continue, sans pallier à la montée et à la descente. Un projet européen, baptisé Cesar, a été lancé pour généraliser une meilleure gestion du trafic et des trajectoires. Pour pouvoir être déployé en Europe, 20 milliards d'euros vont devoir être investis dans Cesar.
Outre le poids et la trajectoire, l'utilisation de biocarburant, fourni par SkyNRG, une filiale de KLM, est l'axe majeur de cette démonstration. «KLM a la chance de maîtriser toute la filière de son avitaillement, ce qui n'est pas notre cas», se réjouit Bertrand Lebel. Les dirigeants d'Air France ne cachent pas que ses fournisseurs de kérosène ne sont pas moteurs dans cette volonté de diversifier l'origine du carburant. «Nous avons bénéficié de l'aide d'Airbus à Toulouse pour pouvoir organiser l'approvisionnement de cet appareil. À Paris, nous n'aurions pas pu y parvenir.» La moitié du carburant utilisé sur ce vol est issu du recyclage d'huiles usagées. La compagnie a préféré recourir à du carburant non issu de l'agriculture. «Nous ne voulons pas que le biokérosène soit en concurrence avec l'agroalimentaire», explique le directeur général adjoint. Par ailleurs, Air France va s'associer au CEA pour ouvrir dans la Meuse une usine de biocarburant fabriqué grâce à l'utilisation des déchets forestiers.
Permis à polluer
Air France est loin d'envisager une généralisation de cette expérience : «La compagnie ne sera pas en mesure d'utiliser ce biofioul au mieux avant 2020», précise Bertrand Lebel. À cette échéance, le biocarburant ne représentera pas plus de 2 à 4% de la demande des compagnies aériennes.
Autre mesure importante pour réduire les émissions de CO2, le recours aux permis à polluer, prévu par une directive européenne dont l'entrée en vigueur est fixée à janvier prochain. Elle s'appliquera aux compagnies aériennes européennes et aux compagnies de la planète qui entreront dans l'espace européen. Certains craignent des mesures de rétorsion. Ainsi, China Southern est en négociation pour mettre son A380 entre Paris et Shanghai, ce qui permettrait à son partenaire Air France KLM de faire de même. Mais si la législation européenne est trop contraignante, China Southern préférera peut-être Sydney à Paris.
SOURCE : LeFigaro