CONGRÈS DES ÉLUS : DISCOURS INTRODUCTIF DE LOUIS BOUTRIN

Messieurs les Présidents en vos grades et qualités

Mes et Messieurs les Parlementaires,

Mesdames et Messieurs les Maires,

Chers(es) Collègues,

Aux Martiniquais(es) qui nous écoutent,

Une société qui s’avère incapable de résoudre les problèmes que suscite son fonctionnement est une société décadente,

Une société qui choisit de fermer les yeux à ses problèmes les plus cruciaux est une société atteinte,

Une société qui ruse avec ses principes est une société moribonde,

La magie des mots nous permet aujourd’hui, de transposer allègrement à la société martiniquaise, l’acte d’accusation et de libération prononcé par le Nègre Fondamental dès la première page du Discours sur le Colonialisme,

Cependant, en cette année 2022, les maux qui gangrènent notre société martiniquaise sont bien éloignés de la rhétorique habituelle sur le Colonialisme et nous placent, nous élus et représentants du peuple, devant notre responsabilité historique et collective.

OUI, les mutations qui s’opèrent à travers le monde bouleversent nos habitudes quotidiennes et sont génératrices d’incertitudes,

OUI, les mécanismes de solidarité que nous avions connus par le passé ont disparu et nous assistons impuissants aux effets dévastateurs d’une société martiniquaise en mal de repères,

OUI, à mesure que notre niveau de consommation augmente, nos productions traditionnelles disparaissent et nous nous enfonçons dans la spirale de l’assistanat et de la dépendance,

OUI, nos entreprises sont asphyxiées par des dettes fiscales et sociales et malgré tous les dispositifs d’aides, malgré notre vitalité en termes de création d’entreprises, leur taux de mortalité demeure anormalement élevé.

OUI, notre mode de fonctionnement politique a installé le pays sous perfusion et dans une parfaite allégeance à l’extérieur,

OUI, une des premières victimes de notre inefficience collective demeure notre jeunesse contrainte à l’exil forcé contribuant ainsi à dévitaliser ce pays où le taux de personnes âgées ne cesse d’augmenter.

OUI, ne nous voilons pas la face, la corruption s’installe de plus en plus ; l’économie souterraine s’installe aussi, et s’affiche de plus en plus au grand jour, au nez et à la barbe de tous, avec son cortège de violence gratuite, de délinquance aveugle, de prostitution autrefois nocturne aujourd’hui diurne (en plein jour), et de trafic en tout genre,

OUI, le constat d’impuissance des autorités étatiques se généralise et le sentiment d’insécurité d’hier a laissé place à une véritable insécurité avec une augmentation inquiétante de la criminalité,

 

SORTIR DE CE PIÈGE MORTIFÈRE,

telle est l’urgence du moment,

 

Parallèlement, notre pays doit faire face à d’autres urgences,

à d’autres crises, écologique, sociale, sanitaire et identitaire, que nous aurons l’occasion d’analyser lors de nos travaux,

Néanmoins, une fois que nous aurons tous ressasser ces constats,

Une fois que nous aurons, par moment, défoncer des portes ouvertes,

il conviendra d’assumer pleinement notre rôle de responsables politiques ou tout au moins, d’accomplir pleinement les missions qui sont les nôtres.

C’est à ce niveau que notre Congrès trouve toute sa pertinence avec une méthode de travail que nous aurons à mettre en œuvre durant les deux prochains mois de travaux

Nous pouvons réussir à condition de satisfaire à une triple exigence :

Des principes, un projet et des outils juridiques,

  1. Accordons-nous d’abord sur les principes,
  2. Donnons-nous ensuite les moyens de préciser les contours d’un projet pour la Martinique,

Et surtout,

  1. Ayons l’audace collective de doter le pays d’outils juridiques nécessaires à notre développement :

A ce titre, personnellement il y a tout juste 4 ans, le 25 juin 2018, j’avais adressé au Président de la République mais aussi à l’ensemble des sénateurs et députés des Outre-Mer, y compris au Député LETCHIMY, l’adoption d’un article unique relatif aux Outre-Mer, en lieu et place des articles 73 & 74 de la Constitution. Une Loi Organique propre à chaque territoire permettrait de préciser à la fois l’organisation administrative et les compétences de ces nouvelles collectivités à statut particulier.

Je ne peux donc que me réjouir que le Sénateur Michel MAGRAS ait donné suite à cette proposition d’un article unique de la Constitution pour les Collectivités d’Outre-Mer dans son rapport de 2020.

OUI, nous sommes tout à fait en mesure de faire des propositions pertinentes à nos gouvernants et d’expliquer à la population ce que nous voulons le plus simplement du monde :

Nous voulons adapter les Collectivités actuelles en obtenant les compétences et moyens nécessaires à nos besoins de développement économique, écologique, social, culturel et identitaire

Et, si l’acquisition de compétences indispensables au cadre de notre liberté et de notre développement économique passe par une évolution institutionnelle, abordons les choses sereinement et en toute transparence

Donnons-nous les moyens d’organiser la réflexion nécessaire pour clarifier sans tabou, sans esprit hégémonique cette revendication et construisons-la ensemble, avec le gouvernement et le Peuple martiniquais.

Ayons pour ce faire, l’audace d’un nouveau contrat social

Ayons l’audace d’un new deal écologique et économique,

Ayons l’audace de changer des institutions inefficientes ou inadaptées à notre époque,

C’est le vœu que nous exprimons en ce début d’un nouveau cycle politique qui s’ouvre aujourd’hui pour que nous puissions regagner la confiance de nos citoyens ;

Pour qu’enfin, nous puissions faire renaître l’espoir dans cette société fracturée.

 

Louis BOUTRIN
Conseiller territorial
Président de MARTINIQUE-ÉCOLOGIE