Un village espagnol choisit le cannabis pour se renflouer
«Êtes-vous d'accord avec le plan anti-crise approuvé par la mairie de Rasquera le 29 février?» C'est la question posée mardi par la municipalité du petit village catalan de Rasquera en Espagne qui a soumis à référendum un projet de plantation de cannabis sur le territoire de la commune. Le «oui» a récolté la majorité des suffrages, avec 56,3%, contre 47,3% de «non».
Confronté à une dette de 1,3 millions d'euros, le maire du village, Bernat Pelissa, avait eu en août 2011 la visite de l'Association barcelonaise de consommation privée de cannabis (Abcda), qui lui proposait de louer sept hectares de ses terres agricoles pour y cultiver de la marijuana. Prête à payer un loyer annuel de 550.000 euros, l'association forte de 5 000 membres, représentait, pour la commune l'occasion d'éponger sa dette en deux ans, et ceci en toute légalité. Et de multiplier par plus de dix le prix de location des terres par rapport aux baux normaux.
Grâce au vote de mardi, la municipalité prévoit la création d'une quarantaine d'emplois directs ou indirects issus des plantations de marijuana et la création d'un pôle de recherche sur le cannabis Une aubaine pour le village qui a «beaucoup de difficultés avec la crise», a expliqué Josep Maria Insausti, conseiller municipal de la commune, lors de la présentation du projet.
Seulement, l'application du vote n'est pas aussi simple. Le maire de ce village situé au sud de Barcelone avait dressé cette consultation comme un vote de confiance: si le oui n'atteignait pas le seul des 75%, Bernat Pelissa rendait sa démission. Combattu par l'opposition municipale menée par la coalition nationaliste CiU, ce projet a déstabilisé l'élu qui est maintenant pressé de quitter son poste. Chose qu'il a finalement refusé de faire, considérant que sa démission relèverait de «l'irresponsabilité». «Je ne vais pas démissionner ni ce soir, ni demain», a déclaré le maire de Rasquera, estimant qu'il fallait «faire les choses dans l'ordre et le calme».
La légalité remise en cause
Du côté des représentants politiques et judiciaires de Catalogne, les avis sont partagés. Le procureur provincial de Tarragone, Xavier Jou, s'est déclaré favorable à ce projet considérant que la consommation collective de drogue douce n'est pas un crime si elle n'affecte pas un tiers. Le Conseil du comté a rejeté le projet en ce qu'il «s'écarte des valeurs éthiques et morales d'une société qui a besoin du travail, de l'effort et de persévérance pour surmonter la crise mondiale». Joana Ortega, la vice-présidente de la Generalitat de Catalogne, organisation politique de la communauté autonome de la région avait elle déclaré qu'elle ne voyait pas en ce projet une «solution» pour sortir de la crise.
L'association barcelonaise de consommation de cannabis, qui déclare être un club «ludico-thérapeutique» a un statut légal dans la mesure où elle ne revend ni ne trafique ce qu'elle produit. Depuis 2006, la loi espagnole est flexible sur le sujet: le Code pénal reconnait la légalité de la vente de graines et la culture de plants de cannabis dans un cadre privé…ce qui n'est pas le cas des terres de la ville de Rasquera.
SOURCE : LeFigaro