FRANCE : BILAN DU VOLET ENERGIE DU GRENELLE DE L'ENVIRONNEMENT


Le Grenelle : un monument en chiffres

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Fin 2010, un rapport d’experts est venu marquer d’une pierre blanche les trois ans du « new deal écologique ». L’heure est au bilan du Grenelle de l’Environnement


Le Grenelle de l’Environnement ce sont deux lois fondamentales - la loi Grenelle 1, promulguée le 3 août 2009 et la loi Grenelle 2, promulguée le 12 juillet 2010 - qui ont transcrit dans la législation française la majorité des 268 engagements initiaux. Avec ses 450 articles de loi, ses 70 dispositions fiscales et plus de 200 décrets d’application qui doivent encore être adoptés, d’un point de vue juridique, le Grenelle est un véritable monument législatif!

Et les chiffres annoncés par le rapport d’experts sont tout aussi impressionnants, trois ans après le lancement du processus 96% des démarches auraient été engagées. Seule une dizaine d’engagements n’aurait fait l’objet d’aucun avancement « en raison d’une difficulté à appréhender l’engagement et à lui donner une concrétisation pertinente »…Quelqu’un souhaite se lancer dans l’analyse de texte ? Certains engagements seraient-ils incompréhensibles et/ou trop théoriques pour pouvoir trouver une application pratique… ?

Le rapport nous dit ensuite que parmi les 268 engagements initiaux, 77 % sont réalisés ou en cours de réalisation (dont à peine 18% qui peuvent être considérés comme totalement réalisés). 19% nécessite une remobilisation….et 4% une redéfinition complète.

Mais dans l’ensemble le bilan est très élogieux. La « dynamique » du Grenelle est « en marche », selon les experts.

Le volet Energie

Parmi les domaines d’action concernés par le Grenelle, celui qui nous intéresse plus particulièrement est bien entendu celui de l’Energie.

Ainsi dans le domaine de l’Energie, le Grenelle de l’Environnement s’était fixé pour objectif la réduction de la consommation énergétique et la prévention des émissions de gaz à effet de serre. Pour ce faire, l’objectif, comme nous le savons tous à présent, était d’augmenter et d’atteindre le seuil de 23% d’énergies renouvelables dans le mix énergétique en 2020, en parallèle de la réduction de 20 à 30% des émissions de gaz à effet de serre.

A l’heure du bilan, le rapport fait état d’une rupture fondamentale dans ce domaine ! Le secteur des énergies renouvelables aurait connu une transformation radicale caractérisée par un décollage remarquable de certaines filières. Les évolutions par secteur entre 2007 et 2009 sont parlantes :

  • Solaire photovoltaïque : + 600% - si l’on tient compte des demandes de raccordement, l’objectif de 5400 MW installée en 2020 sera atteint dès 2011 à condition que toutes les demandes soient réalisées ;
  • Eolien : + 91% - avec une capacité installée de 5016 MW en 2010 soit 10% de la production d’électricité renouvelable ;
  • Biocarburant : + 103% ;
  • Pompes à chaleur : + 78,5% - 565.000 foyers équipés aujourd’hui contre 75.000 avant le Grenelle de l’Environnement ;
  • 260.000 personnes employées dans le secteur des énergies renouvelables.

Le rapport relève également des mesures très incitatives sur l’ensemble des filières avec la présentation d’un plan de développement des énergies renouvelables en novembre 2008, le maintien de tarifs de rachat parmi les plus élevés en France, le lancement de nombreux appels d’offres dans le secteur du solaire (en 2009 : pour un objectif cumulé de 300 MW) et pour la biomasse (pour 800 MW, puis 200 MW supplémentaires).

Une vision des acteurs de la filière semble nécessaire pour donner un peu de relief à ce bilan presque trop élogieux pour ne pas semer le trouble...

Les contre-bilans des associations pleuvent

Les associations de protection de l’environnement et les ONG ne sont pas crédules et les critiques ne se sont pas fait attendre.

L’association Agir pour l’environnement s’étonne ainsi, dans un communiqué publié sur son site internet et intitulé « Contre-bilan du Grenelle de l’environnement », « qu’un rapport d’évaluation puisse être effectué sans auditer les associations de protection de l’environnement » et accuse une « auto-promotion ».

Sur le volet énergie, l’association dénonce « des pourcentages qui feraient pâlir d’envie le militant écologique le moins convaincu de l’intérêt du Grenelle ». Or, en ce qui concerne l’éolien, l’association nous rappelle les amendements de Grenelle 2 qui ont durci les conditions de développement de l’éolien et dont l’effet immédiat a été de stopper son développement. Les chiffres avancés par l’association sont bien moins élogieux : au 1er trimestre 2010, la France n’aurait accru ses capacités de production éolienne que de 2% soit une baisse de 63% par rapport au 1er trimestre 2009 !


Le CLER-HESPUL attire également l’attention du grand public sur les chiffres avancés quant aux évolutions du secteur solaire d’ici à 2020. En effet, il est avancé aux termes de ce bilan que l’objectif de 5400 MW installés prévu pour 2020 sera atteint dès 2011. Or, ces chiffres ne seraient qu’affabulations et approximations. Selon le CLER-HESPUL seulement 800 MW seront réellement installés en France fin 2010, soit environ 5 fois moins que l’objectif annoncé ! Plus de 4000 MW correspondent, en effet, à la « file d’attente », à savoir, des projets pour lesquels une demande de raccordement a été déposée auprès d’ERDF mais qui ne sont pas encore réalisés. Or, dans la mesure où il s’agit, pour un certain nombre, de demandes à visée purement spéculative (qui n’auraient pour seul objet que de bloquer le prix de rachat à la date de la demande, mais sans aucune certitude quand à la réalisation du projet), ou de projet qui seront abandonnés en cours de route, seule une faible part d’entre eux sera réellement réalisée. Faire comme s’ils étaient déjà tous en fonction relèverait, selon le CLER-HESPUL d’une manipulation de l’opinion !

 

La réponse ne s’est pas fait attendre non plus du côté du Réseau Action Climat (RAC) qui a également publié un bilan climat-énergie. La RAC s’en prend ainsi au nucléaire. Alors que l’engagement n°60 du Grenelle de l’Environnement promettait de hisser la recherche et le développement des nouvelles technologies de l’énergie au niveau de celle dévolue au nucléaire civil, l’association déplore qu’aucun indicateur public ne permette de suivre cet engagement. Les dernières données connues datent de 2008, à l’époque 66% des budgets de recherche du secteur de l’énergie étaient destinés aux énergies nucléaires et fossiles, contre 24% pour les énergies renouvelables. Quant à l’engagement 62, il annonçait une adaptation de la place du nucléaire dans le bouquet énergétique français. Pourtant aucune fermeture de centrale n’est prévue à l’aube de 2020…bien au contraire la construction de deux nouveaux réacteurs. Enfin cet engagement de rééquilibrer le mix énergétique n’a pas été acté au niveau législatif.

La WWF, quant à elle, propose un bilan du Grenelle de l’environnement vu par les ONG qui sera effectué le 18 février 2011 ! Tous à vos agendas, un défi est lancé !

SOURCE : LeFigaro.fr