Collusion d'intérêt entre le gouvernement et les industries pharmaceutiques ? Surestimation du risque ?
Des sénateurs veulent enquêter sur les liens entre gouvernement et laboratoires Les députés du groupe communiste et parti de gauche vont demander ce mercredi la création d'une commission d'enquête parlementaire pour déterminer s'il y a eu collusion d'intérêt entre le gouvernement et les industries pharmaceutiques. La thèse de la collusion entre dirigeants et industries pharmaceutiques est à l'ordre du jour. Alors que le numéro 2 de l'OMS était entendu ce mardi matin à ce sujet par le Conseil de l'Europe, les sénateursdu groupe communiste et du parti de gauche (CRC-SPG) vont demander mercredi une commission d'enquête sur "le rôle des firmes pharmaceutiques dans la gestion par le gouvernement de la grippe A". La question est : "Pourquoi le gouvernementa-t-il appliqué avec autant de zèle les recommandations de l'OMS ?, demande François Autain, porte-parole du groupe. La Pologne, qui n'a pas suivi la recommandation de l'OMS et n'a pas fait vacciner sa population a un taux de mortalité plus faible que le nôtre." "Confusion des rôles" Le sénateur divers gauche de Loire-Atlantique pointe du doigt la "confusion des rôles". "Il existe très peu d'instances compétentes indépendantes en matière de santé", affirme-t-il. Le Parisien révélait dans son édition de mardi que 15 des 17 experts du comité de lutte contre la grippe avaient des liens avec l'industrie pharmaceutique et que six d'entre eux avaient même reçu des rémunérations directes de leur parten 2009. "Ce sont les mêmes hommes que l'on retrouve dans toutes les instances", reproche l'élu. Chargé du dossier pour le groupe CRC-SPG, Christophe Rondel cite le cas de Bruno Lina, membre du comité technique de l'OMS et du comité français de lutte contre la grippe, tout en touchant une rémunérationde la part de quatre laboratoires d'industrie pharmaceutique. Le groupe compte faire discuter sa proposition en séance pleinière d'ici fin mars. Source : L'Express. 26 janvier 2010
La gestion de l'épidémie de grippe A (H1N1) en Europe n'a pas fini de faire des vagues. Si la France est en tête des pays ayant engagé le plus de moyens, tous ou presque sur le Vieux Continent ont commandé trop de vaccin et essayent aujourd'hui de les revendre. L'analyse critique des processus de décision dans cette affaire est désormais indispensable pour en tirer des enseignements. Face à des systèmes de santé en déficit chronique, l'analyse du rapport coût/bénéfice des choix de santé va s'imposer de plus en plus, y compris dans les pays riches.
Ce mardi, le Conseil de l'Europe organise une audition publique sur le thème de la grippe A (H1N1) et la transparence, au cours de laquelle l'Organisation mondiale de la santé (OMS) sera sans doute sur la sellette. Cette réunion a été organisée à l'initiative d'un épidémiologiste allemand, spécialiste de santé publique, Wolfgang Wodarg, élu (PSD) jusqu'en 2009 au Bundestag qui, avec quelques-uns de ses collègues, a demandé, le mois dernier, la création d'une commission d'enquête européenne pour évaluer «la menace des fausses pandémies pour la santé». Les docteurs Keiji Fukuda, conseiller auprès du directeur général de l'OMS, Luc Hessel, qui participera à l'audition au nom du Groupe des fabricants européens de vaccin, et le professeur Ulrich Keil, directeur du centre de collaboration de l'OMS pour les épidémies à l'université de Münster (Allemagne), ont accepté de se rendre à Strasbourg à l'invitation de la commission Santé de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE). Wolfgang Wodarg est très critique à l'égard de la gestion de l'épidémie par l'OMS, qualifiée «faussement», selon lui, «de pandémie, sous la pression de laboratoires». L'ancien parlementaire souhaite faire apparaître, à travers ces auditions, les bases scientifiques sur lesquelles l'OMS a décrété l'alerte mondiale. Il propose que le Conseil de l'Europe demande à ses 47 États membres «une enquête sur les conséquences du déclenchement de la pandémie et sa prise en charge aux niveaux nationaux et européen». Les laboratoires «ont incité à gaspiller des ressources destinées aux soins de santé pour des stratégies de vaccination inefficaces», estime-t-il. Démenti de l'OMS Sur son site Web, Wolfgang Wodarg accuse l'OMS d'avoir été «sous l'influence des compagnies pharmaceutiques qui ont incité les scientifiques à alarmer les gouvernements mondiaux dans le but de faire la promotion de vaccin et médicaments contre la grippe». Il dénonce également les recommandations d'un vaccin à deux doses, qui n'ont été revues que tardivement alors qu'une seule était suffisante, ainsi que la définition de la pandémie par l'OMS qui ne tient absolument pas compte de la virulence du virus. De son côté, l'OMS dément formellement ces allégations de conflits d'intérêt et de fausse pandémie. «L'OMS a toute confiance dans l'indépendance de son processus décisionnel concernant la grippe pandémique, répond l'Organisation dans un communiqué. Les autres allégations selon lesquelles l'OMS aurait créé une fausse pandémie pour servir les intérêts de l'industrie sont scientifiquement erronées et incorrectes pour ce qui est de la chronologie des faits. Ce virus grippal était, sur le plan génétique, différent des autres virus grippaux ; il pouvait provoquer des cas de maladies sévères et de décès ; sa propagation géographique a été exceptionnellement rapide…» L'OMS a d'ailleurs annoncé son intention de commander à des experts indépendants une évaluation, mais lorsque la pandémie sera terminée. Margaret Chan, directrice générale de l'OMS, a reconnu la semaine dernière devant son conseil exécutif réuni à Genève, «qu'elle n'avait pas prévu que les gens décideraient de ne pas se faire vacciner. L'époque où les responsables de la santé pouvaient donner des recommandations et attendre que les populations s'y plient est sans doute révolue». En France aussi, une commission d'enquête parlementaire devrait être lancée. «Nous pouvons d'ores et déjà tirer plusieurs leçons de cette affaire. Elle remet en cause nos capacités de prédiction. Nous n'avons pas assez réfléchi aux manières d'anticiper avec des mesures justes les crises sanitaires, explique Michel Setbon, sociologue, spécialiste des crises sanitaires. Il aurait fallu avoir un comité d'experts, notamment en santé publique, capable d'adapter la stratégie au fur et à mesure des connaissances. Enfin nous n'avons pas tenu assez compte des demandes de la population qui, face à un virus peu virulent, ne s'est pas massivement fait vacciner.»