JUSTICE - PROCÈS XYNTHIA : LE RISQUE, L'ÉTAT, LES ÉLUS ET LA SCHIZOPHRÉNIE NATIONALE

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Procès Xynthia : le risque, l’Etat, les élus et la schizophrénie nationale 


A la barre se tient un homme, petit de taille, grand par sa fonction, redoutablement adroit dans son verbe. Thierry Lataste, ancien préfet de Vendée, est aujourd'hui directeur de cabinet du ministre de l'intérieur Bernard Cazeneuve, après avoir exercé les mêmes fonctions auprès de son prédécesseur place Beauvau, Manuel Valls.

Cité comme témoin au procès Xynthia devant le tribunal de grande instance des Sables d'Olonne, lundi 29 septembre, il n'a pas grand chose à craindre. D'une part, parce que ses attributions du moment au sommet de l'Etat lui confèrent une indiscutable autorité sur ses interlocuteurs et d'autre part, parce que ses prérogatives à la tête du département ont pris fin le 14 février 2010, soit quelques jours avant que la tempête Xynthia ne déferle sur les côtes vendéennes, et entraîne la mort de 29 personnes à la Faute-sur-Mer.

Fort de cette double sécurité personnelle, il a livré, entre les lignes, une illustration de la schizophrénie nationale, qui veut moins d'Etat quand tout va bien et plus d'Etat quand les choses tournent mal.

Lorsqu'il est arrivé en Vendée, en juillet, 2007, Thierry Lataste savait que, parmi les tâches qui l'attendaient, figurait la mise en oeuvre d'un plan de prévention des risques d'inondation (PPRI) dans plusieurs communes littorales du département. Celle de la Faute-sur-Mer comptait à la fois parmi les plus concernées et les plus récalcitrantes. Aux injonctions et interdictions préfectorales répondaient de multiples procédures intentées par le maire René Marratier avec l'appui de son conseil municipal, devant le tribunal administratif. "Le comportement de déni du maire de la Faute-sur-Mer était tout à fait caractérisé. C'est ce que j'ai rencontré de plus difficile à faire bouger dans toute ma carrière" observe Thierry Lataste.

Une attitude dont il relève toutefois qu'elle n'est pas isolée parmi les élus municipaux, surtout dans les communes où s'exerce une forte pression foncière. En écho aux propos de l'historien Thierry Sauzeau, entendu au deuxième jour du procès, le préfet constate qu' "en France, le risque s'oublie, le risque se néglige, et la trace des catastrophes s'efface vite". "Les représentants des services de l'Etat sont perçus comme venant de l'extérieur, n'ayant aucune connaissance de la réalité communale dont seuls les élus seraient détenteurs", poursuit-il. Il ajoute: "La loi littoral a été votée au milieu des années 80 et n'a toujours pas ses décrets d'application. Et à chaque législature, il se trouve des élus pour tenter d'alléger ses contraintes".

Aux avocats des parties civiles qui s'étonnent que le préfet n'ait pas "tapé du poing sur la table" face au maire de la Faute-sur-Mer et à son attitude dilatoire, aux conseils des prévenus qui tentent à leur tour de pointer la défaillance de ses contrôles, Thierry Lataste répond courtoisement que ceux qui reprochent aujourd'hui à l'Etat sa lenteur dans la mise en place des plans de prévention des risques étaient ceux-là mêmes qui exigeaient hier de sa part plus de concertation. Il évoque la circulaire signée du ministre de l'écologie, Jean-Louis Borloo en juillet 2007 sur "l'élaboration concertée" des plans de prévention des risques entre l'Etat et les communes. "Les services de l'Etat qui étaient engagés dans des négociations difficiles avec les communes se sont sentis affaiblis par cette circulaire", affirme Thierry Lataste.

Le président Pascal Almy plonge dans son dossier et cite quelques extraits du texte qui appelle les préfets à veiller à la "maturation collective" des décisions, au "dialogue continu avec les collectivités", à la "prise en compte des dynamiques territoriales en jeu, des stratégies et des contraintes de développement".  Thierry Lataste goûte cet opportun rappel.

- Je vous remercie de cette lecture, Monsieur le président.   

Et comme l'occasion lui est donnée de renvoyer chacun à ses responsabilités, il ajoute:

Je vous invite à relire, comme je l'ai fait pour cette déposition, les articles publiés dans la presse quotidienne régionale avant Xynthia. Vous verrez que les services de l'Etat sont toujours en accusation sur le trop plein de contraintes qu'ils imposent et que l'on y salue avec constance la résistance opposée par la municipalité...

A la barre se tient un homme, petit de taille, grand par sa fonction, redoutablement adroit dans son verbe. Thierry Lataste, ancien préfet de Vendée, est aujourd'hui directeur de cabinet du ministre de l'intérieur Bernard Cazeneuve, après avoir exercé les mêmes fonctions auprès de son prédécesseur place Beauvau, Manuel Valls.

Cité comme témoin au procès Xynthia devant le tribunal de grande instance des Sables d'Olonne, lundi 29 septembre, il n'a pas grand chose à craindre. D'une part, parce que ses attributions du moment au sommet de l'Etat lui confèrent une indiscutable autorité sur ses interlocuteurs et d'autre part, parce que ses prérogatives à la tête du département ont pris fin le 14 février 2010, soit quelques jours avant que la tempête Xynthia ne déferle sur les côtes vendéennes, et entraîne la mort de 29 personnes à la Faute-sur-Mer.

Fort de cette double sécurité personnelle, il a livré, entre les lignes, une illustration de la schizophrénie nationale, qui veut moins d'Etat quand tout va bien et plus d'Etat quand les choses tournent mal.

Lorsqu'il est arrivé en Vendée, en juillet, 2007, Thierry Lataste savait que, parmi les tâches qui l'attendaient, figurait la mise en oeuvre d'un plan de prévention des risques d'inondation (PPRI) dans plusieurs communes littorales du département. Celle de La Faute-sur-Mer comptait à la fois parmi les plus concernées et les plus récalcitrantes. Aux injonctions et interdictions préfectorales répondaient de multiples procédures intentées par le maire René Marratier avec l'appui de son conseil municipal, devant le tribunal administratif. "Le comportement de déni du maire de la Faute-sur-Mer était tout à fait caractérisé. C'est ce que j'ai rencontré de plus difficile à faire bouger dans toute ma carrière" observe Thierry Lataste.

Une attitude dont il relève toutefois qu'elle n'est pas isolée parmi les élus municipaux, surtout dans les communes où s'exerce une forte pression foncière. En écho aux propos de l'historien Thierry Sauzeau, entendu au deuxième jour du procès, le préfet constate qu' "en France, le risque s'oublie, le risque se néglige, et la trace des catastrophes s'efface vite". "Les représentants des services de l'Etat sont perçus comme venant de l'extérieur, n'ayant aucune connaissance de la réalité communale dont seuls les élus seraient détenteurs", poursuit-il. Il ajoute: "La loi littoral a été votée au milieu des années 80 et n'a toujours pas ses décrets d'application. Et à chaque législature, il se trouve des élus pour tenter d'alléger ses contraintes".

Aux avocats des parties civiles qui s'étonnent que le préfet n'ait pas "tapé du poing sur la table" face au maire de la Faute-sur-Mer et à son attitude dilatoire, aux conseils des prévenus qui tentent à leur tour de pointer la défaillance de ses contrôles, Thierry Lataste répond courtoisement que ceux qui reprochent aujourd'hui à l'Etat sa lenteur dans la mise en place des plans de prévention des risques étaient ceux-là mêmes qui exigeaient hier de sa part plus de concertation. Il évoque la circulaire signée du ministre de l'écologie, Jean-Louis Borloo en juillet 2007 sur "l'élaboration concertée" des plans de prévention des risques entre l'Etat et les communes. "Les services de l'Etat qui étaient engagés dans des négociations difficiles avec les communes se sont sentis affaiblis par cette circulaire", affirme Thierry Lataste.

Le président Pascal Almy plonge dans son dossier et cite quelques extraits du texte qui appelle les préfets à veiller à la "maturation collective" des décisions, au "dialogue continu avec les collectivités", à la "prise en compte des dynamiques territoriales en jeu, des stratégies et des contraintes de développement".  Thierry Lataste goûte cet opportun rappel.

- Je vous remercie de cette lecture, Monsieur le président.   

Et comme l'occasion lui est donnée de renvoyer chacun à ses responsabilités, il ajoute:

 Je vous invite à relire, comme je l'ai fait pour cette déposition, les articles publiés dans la presse quotidienne régionale avant Xynthia. Vous verrez que les services de l'Etat sont toujours en accusation sur le trop plein de contraintes qu'ils imposent et que l'on y salue avec constance la résistance opposée par la municipalité...

source : AFP