ONU : Un statut d'ETAT NON MEMBRE pour la Palestine.
JERUSALEM. Les membres du gouvernement israélien se sont efforcés vendredi, sans grand succès, de minimiser la lourde défaite subie avec la reconnaissance implicite de l'existence d'un Etat palestinien à l'Onu.
Par 138 voix contre 9 et avec 41 abstentions, l'Assemblée générale de l'Onu a accordé jeudi à l'Autorité palestinienne le statut d'"Etat non membre".
Dans les faits rien n'a changé. Les barrages de l'armée israéliennes sont toujours aussi présents sur les routes de Cisjordanie, où le quotidien des colons est le même.
Sur le plan diplomatique en revanche, l'isolement n'a jamais été aussi marqué, puisque trois grands pays seulement, les Etats-Unis, le Canada et la République tchèque, se sont rangés du côté de l'Etat hébreu.
"Même des amis de longue date tels que l'Allemagne ont refusé d'être avec nous. Il y avait des facteur extérieurs, mais il est difficile de ne pas voir qu'il s'agit d'un échec total de notre diplomatie, qui aura évidement des conséquences", a déclaré un haut fonctionnaire ayant requis l'anonymat.
Certes "contrarié", le gouvernement israélien n'a toutefois pas été surpris, a assuré son porte-parole, Marc Regev.
"L'Assemblée générale tient parfois du théâtre de l'absurde, qui approuve automatiquement une fois par an des résolutions anti-israéliennes ridicules", a-t-il déclaré.
GOUFFRE
Le résultat du scrutin montre toutefois l'étendue du gouffre qui s'est creusé entre l'Europe et l'équipe de Benjamin Netanyahu en ce qui concerne les colonies de Cisjordanie et les relations avec l'Autorité palestinienne.
"Le gouvernement n'a pas su mesurer la gravité de la remise en question de la légitimité fondamentale d'Israël en Europe. L'initiative palestinienne à l'Onu s'avère être une défaite plus cuisante que prévu", estime Gidi Grinstein, directeur de l'institut Reut, un cercle de réflexion de Tel Aviv.
Malgré ses démentis, Israël a bel et bien été pris de court.
La semaine dernière, alors que son armée combattait les islamistes de la bande de Gaza, la plupart des puissances occidentales reconnaissaient son droit légitime à la sécurité, mise en péril par les tirs de roquettes en provenance de l'enclave palestinienne.
Le cessez-le-feu conclu après huit jours de bombardements a ensuite été perçu comme une victoire du Hamas aux dépens de Mahmoud Abbas et de l'Organisation de la Palestine (OLP).
En conséquence, les Occidentaux, qui ont englouti des millions de dollars dans l'aide à l'Autorité autonome pour en faire un interlocuteur crédible du processus de paix, se sont sentis dans l'obligation de lui accorder leur soutien à l'Onu.
Avant le conflit de la bande de Gaza, les Palestiniens tablaient sur 115 suffrages en faveur de leur résolution. Ils en ont donc obtenu 23 de plus.
A Jérusalem, on insiste sur le poids considérable du vote américain, en ajoutant que la perspective d'une paix durable s'est encore éloignée.
"S'il faut choisir entre les Etats-Unis, allié le plus proche d'Israël qui figure moralement au-dessus de toutes les autres nations et les 138 autres Etats, j'opterai toujours pour les Etats-Unis", a déclaré le vice-ministre des Affaires étrangères, Danny Ayalon.
MINORITÉ MORALE
Le gouvernement israélien, qui n'avait aucune illusion quant à l'issue du vote de l'Assemblée générale, espérait toutefois rassembler une "minorité morale" qui ne s'est pas dessinée.
Depuis, les membres du gouvernement se font moins menaçants, mais promettent de vives représailles si l'Autorité palestinienne venait à poursuivre Israël devant la Cour pénale internationale (CPI), comme son nouveau statut l'y autorise.
A Ramallah, on assure qu'il n'y a aucune urgence, mais la menace reste présente et on espère que cette perspective amènera les autorités israéliennes à faire preuve de créativité dans la relance du processus de paix.
Dans les rangs du gouvernement, on juge qu'il revient aux Palestiniens de faire le premier pas, en renonçant par exemple au droit au retour des réfugiés de 1948 et de leurs descendants.
"Ce vote de l'Onu est un signal fort adressé aux Israéliens pour leur dire qu'ils ne peuvent plus laisser le sujet sous le tapis", analyse Alon Liel, ancien directeur général du ministère des Affaires étrangères.
Reste qu'à l'approche des élections du 22 janvier, un revirement semble exclu. Les sondages promettent la victoire à la coalition emmenée par Benjamin Netanyahu, où les partisans de la colonisation sont nombreux. Le Likoud, dont le Premier ministre est issu, a qui plus est mis le cap à droite, ce qui ne favorisera pas les concessions.
"La stratégie à l'égard de l'Autorité et de l'Etat palestinien sera probablement à l'ordre du jour du prochain gouvernement cet hiver", prédit toutefois Gidi Grinstein, de l'Institut Reut.
"La révision de sa stratégie pourrait se traduire par un engagement actif en faveur de l'extension des pouvoirs et des responsabilités de l'Autorité palestinienne (...) et, en fin de compte, par une reconnaissance de l'Autorité palestinienne en tant qu'Etat", conclut-il.
SOURCE : REUTERS