RETOUR AUX SOURCES POUR LA ROUTE DU RHUM

Saint-Malo - Pointe-à-Pitre, départ Dimanche prochain.

route.rhum1.jpg

De nombreux projets relancent ces géants marins, à admirer sur la Route du rhum dès dimanche prochain. PHOTO : Groupama 3, au départ du Trophé Jules Verne


Les géants des mers reviennent sur la mythique transatlantique entre Saint-Malo et Pointe-à-Pitre. Vingt-quatre ans se sont écoulés depuis la dernière édition «ultime» au cours de laquelle Loïc Caradec disparaissait au large du golfe de Gascogne. Ce drame avait entraîné une limitation de la taille des bateaux à 60 pieds (18,28m) qui a prévalu de 1990 à 2006. Mais la polémique sur la fiabilité de ces multicoques a rebondi après l'hécatombe de l'édition 2002, seulement trois des dix-huit concurrents engagés arrivant à bon port.

 

La disparition de la classe des 60 pieds Orma a ouvert la voie au retour de l'esprit libertaire à l'origine de la création en 1978, par Michel Etevenon, de la Route du rhum. Pour la première fois, les maxitrimarans les plus rapides du moment vont s'affronter en course. Trois d'entre eux détiennent les plus grands records: tour du monde en équipage pour Groupama 3 de Franck Cammas; tour du monde en solitaire pour Idec de Francis Joyon; traversée de l'Atlantique Nord en solitaire pour Sodebo de Thomas Coville. Oman Air Majan de Sidney Gavignet a pulvérisé celui du tour des îles Britanniques. Et Gitana 11 n'est autre que le tenant du titre et du record de la course (7 jrs 17 h 19 min 6 sec), un ancien 60 pieds profondément modifié et allongé pour que son nouveau skipper, Yann Guichard, puisse rivaliser avec les géants de plus de 30 mètres.

 

Multicoques, le retour des monstres des mer
par Laurence Schreiner 

L'avenir de la voile ne peut s'écrire qu'en multicoques assènent depuis longtemps déjà les plus grands marins français, attachés à l'un des derniers espaces de liberté tant d'un point de vue architectural que sportif. Depuis trois ans, et la disparition de la classe des 60 pieds Orma qui fit les beaux jours de ces machines surpuissantes, ils avaient pourtant disparu du paysage des courses océaniques. Les quelques maxi-trimarans mis à l'eau depuis ont été conçus essentiellement pour un programme de grands records, quasiment tous aux mains de skippeurs français aujourd'hui. Le dernier en date, le trophée Jules Verne, a été conquis en mars par Franck Cammas et son équipage à bord de Groupama 3 . Un record que Pascal Bidégorry va tenter de ravir cet hiver aux commandes de Banque Populaire V. 

Ouverture à l'étranger

«La passion est au cœur de l'essentiel de la vie des multicoques. Ces bateaux existent par les marins et pour les marins, parce que des hommes un peu fous ont eu envie de construire et de naviguer sur ces bateaux si particuliers», rappelle Francis Joyon, l'homme le plus rapide autour de la planète à bord d'Idec, qui renoue avec la course à l'occasion de cette Route du rhum de nouveau ouverte aux multicoques «ultimes».

La nature ayant horreur du vide, des projets ont fleuri dès 2007, de la «World Sailing League», proposée par le Néo-Zélandais Russel Coutts et l'Américain Paul Cayard, au circuit des MOD 70 (des trimarans monotypes de 70 pieds) initié par l'ancien directeur de la classe Orma, Franck David. En vain, ces belles présentations sur papier glacé étant restées sans suite. Jusqu'à ce que les choses évoluent favorablement. L'investissement d'un entrepreneur providentiel va finalement permettre aux premiers MOD 70 d'être mis à l'eau l'an prochain pour un circuit lancé en 2011, avec l'ambition affichée d'y attirer des équipes internationales.

Mais le nouvel élan donné aux multicoques est venu d'outre-Atlantique et du match-racing. Le duel de la 33e Coupe de l'America entre le trimaran suisse Alinghi et le catamaran américain Oracle a donné en février dernier un coup de projecteur sans précédent sur cette discipline qui avait jusque-là du mal à toucher les pays anglo-saxons. De là à pérenniser ce choix d'embarcations pour la future édition, il y avait un fossé culturel à combler. Oracle, le nouveau «defender», l'a franchi. En officialisant en septembre que la vénérable épreuve se disputerait exclusivement sur des multicoques, son patron, Russell Coutts, a intronisé ces bateaux fantastiques comme références de la voile de demain.

Les Français ne sont donc plus seuls au monde. Même si deux équipes, la britannique et l'allemande, ont renoncé à entrer dans ce nouveau format, la course en multicoques va s'ouvrir à l'étranger. Ce qui ne manquera pas de profiter, du moins dans les prochaines années, aux architectes, chantiers et navigateurs de France qui, depuis quarante ans, se délectent de ses machines innovantes.

SOURCE : LeFigaro.fr