TAUX ANORMALEMENT ÉLEVÉ DE MALFORMATIONS CONGÉNITALES APRÈS MARIAGES ENTRE COUSINS GERMAINS

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Mariages entre cousins germains : Les risques en chiffres

 

Des chercheurs mettent en évidence le taux anormalement élevé de malformations congénitales dans la communauté pakistanaise de Grande-Bretagne.

Au départ, ce groupe de médecins et généticiens britanniques cherchait à  comprendre les raisons des taux anormalement élevés de mortalité infantile observés au sein de la communauté pakistanaise. Dirigé par le Dr Eamonn Sheridan (Leeds Institute of Biomedical & Clinical Sciences), il démontre aujourd’hui que les mariages consanguins peuvent multiplier par deux le risque d’apparition d’une anomalie génétique congénitale. Leurs résultats viennent d’être publiés sur le site de l’hebdomadaire médical britannique The Lancet.

Ces chercheurs ont examiné dans le détail l'influence de différents facteurs connus pour avoir une influence négative sur la santé de l’enfant à naître comme la consommation de tabac, d’alcool ou encore l’obésité de la femme enceinte. Ce travail a été fait à Bradford, une ville du nord de l’Angleterre où vivent de nombreuses communautés ethniques différentes et où le taux de mortalité infantile est près du double de celui du pays, sur 11.396 dossiers médicaux de nouveau-nés de la cohorte Born in Bradford.

Parmi eux 386 (3%) présentaient une anomalie congénitale: malformations corporelles (cardiaques, nerveuses, urinaires, pulmonaires) et chromosomiques (trisomie 21). Le taux observé (305.74 pour 10.000 naissances vivantes) était près du double de celui de la moyenne nationale britannique (165,90 pour 10.000). Il est vite apparu que ce risque concernait plus particulièrement les mères d'origine pakistanaise que celles d'origine britannique «blanc».

Dans l'ensemble des dossiers étudiés, 2013 (soit 18%) concernaient des enfants d’origine pakistanaise descendants d'unions de cousins germains. Si elle est bien liée à un doublement du risque de naissance d’enfants malformés, cette consanguinité n’est associée à aucune carence ou comportement connus pour être facteur de malformation.

Au total, selon les chercheurs près d’un tiers (31%) de toutes les anomalies observées chez les enfants d'origine pakistanaise pourraient être attribuées à cette consanguinité. Une augmentation similaire est observée chez les enfants des mères blanches d'origine britannique âgées de plus 34 ans à la naissance. Dans tous les groupes ethniques des niveaux élevés d’éducation sont associés à une réduction du risque. Pour autant, le statut socio-économique n'explique pas l'augmentation des taux de malformations congénitales observés chez les femmes d’origine pakistanaise.

«Il est important de noter que l'augmentation absolue du risque est faible (de 3% à 6%), ce qui signifie que seule une petite minorité (de 3 à 6 %) des enfants nés de couples qui sont parents par le sang développeront une affection d’origine congénitale», met en garde le Dr Sheridan contre les extrapolations à connotations racistes qui pourraient être faites. Elle explique aussi que ce même risque se situe entre 2% à 4% chez les femmes britanniques blanches donnant la vie après 34 ans. Des observations faites auprès de la communauté pakistanaise vivant en Norvège avaient montré une diminution rapide de la proportion des mariages consanguins.

Les chercheurs estiment que leurs  résultats permettront d’aider le travail des personnels de santé employés dans les services prénataux et pédiatriques de conseil génétique. «Cette étude est la première à fournir des conclusions fiables après avoir pu explorer toutes les causes des anomalies congénitales dans une population où figurent en  nombre suffisant deux groupes l’un consanguin et l’autre non. Une information claire et accessible sur ces risques faibles mais importants risques évitables devrait être largement diffusée aux communautés locales et être inclus dans le cadre de la consultation prénatale et la planification des services de santé», estime le Pr Neil Small (Université de Bradford), l’un des auteurs de ce travail.

Pragmatiques, les chercheurs britanniques estiment que les risques inhérents à la consanguinité entre cousins germains devraient être exposés avant la conception au même titre que le sont ceux causés par la consommation de tabac, d’alcool et de certains médicaments par la femme enceinte. The Lancet souligne que les mariages consanguins sont des pratiques courantes dans de nombreuses populations totalisant  plus d'un milliard de personnes à travers le monde.

Les mariages consanguins sont des mariages entre deux personnes ayant au moins un ancêtre commun. Ce type d’union augmente le risque statistique de transmission de maladies d’origine génétique. Selon les pays, des dispositions législatives (ou coutumières) interdisent (ou non) ce type d’union lorsque le degré de parenté (et donc le risque génétique) est trop important.

JY. NAU in slate.fr