TRIBUNAL ADMINISTRATIF : LES TRICHEURS DÉMASQUÉS

TRIBUNAL ADMINISTRATIF : LES TRICHEURS DÉMASQUÉS
 
par Francis CAROLE 

carole.fdf.jpg

En dépit du rejet ordonné, le jugement portant sur le recours que nous avons introduit en mars 2014 concernant les résultats des élections municipales de Fort-de-France confirme les irrégularités permanentes qui caractérisent le déroulement des scrutins dans notre ville.

Notre avocat, maître Philippe Edmond-Mariette, l'a brillamment démontré lors de l'audience du 5 novembre.
Les batailles politiques que nous menons, depuis de nombreuses années,  au même titre que notre recours devant les instances judiciaires, ont pour objectifs de mettre un terme au système frauduleux organisé par le parti au pouvoir dans la capitale et de garantir les conditions optimales de transparence des opérations de vote

Les irrégularités soulignées par le Tribunal Administratif de Fort-de-France corroborent les violations systématiques du code électoral qui ont empêché une véritable expression démocratique des électrices et électeurs de notre ville et ont faussé les résultats des élections.

1.D'abord, le Tribunal Administratif reconnaît le non respect des règles relatives à la communication sur internet et la violation de l'article L 49 du Code Électoral ainsi que des articles L 48-1 et L 48-2.

L'article L 49 stipule :

"À partir de la veille du scrutin à zéro heure, il est interdit de distribuer ou faire distribuer des bulletins, circulaires et autres documents. À partir de la veille du scrutin à zéro heure, il est également interdit de diffuser ou de faire diffuser par tout moyen de communication au public, par voie électronique tout message ayant le caractère de propagande électorale."

La campagne électorale en vue du 1er tour du scrutin municipal de mars 2014 s’achevant le samedi 22 mars à minuit,  la diffusion de tout message à caractère de propagande électorale était interdite à cette date et à cette heure.

Toutes les listes se sont scrupuleusement tenues à cette interdiction, à l'exception de la liste du néo-PPM, puisque le samedi 22 mars, méprisant les règles élémentaires fixées par la loi, Catherine CONCONNE, membre de la liste incriminée, appelait, sur les réseaux sociaux, à voter en faveur de son chef de file !

D'autres éléments de propagande électorale (textes et vidéo) étaient diffusés le samedi 22 mars, après la clôture de la campagne, par les mêmes personnes, dûment identifiées et preuves à l'appui.

Les  juges confirment « que la diffusion du texte litigieux, après la limite fixée à l’article L. 49 susmentionné, a constitué une "irrégularité" qu'ils qualifient eux-mêmes de "condamnable".

Ils n'en tirent malheureusement pas toutes les conséquences...


2-Le Tribunal Administratif reconnaît, d'autre part, ce qui s'apparente bien à un système de pression organisé sur les électeurs, le jour même du vote. Les pratiques mises en œuvre dans les bureaux de vote méconnaissent les principes d’égalité dans la compétition, de secret et de liberté du vote et violent l'article L 67 du Code Électoral.

En effet, lors du déroulement des opérations de vote, nos délégués et ceux de la liste de Gabriel Lagrancourt ont signalé un dispositif de « pointage » organisé dont le but consistait à identifier les électeurs qui n'avaient pas encore voté et à communiquer leurs noms à l’extérieur du bureau de vote afin de les inciter à venir voter.

Mieux ! Les membres de la commission de contrôle des opérations électorales (qui dépendent de la préfecture) ont témoigné, par écrit, de l'existence de ces manœuvres.

Ainsi, le Tribunal Administratif déclare :

"Il ressort de l'examen des procès-verbaux des opérations électorales, d'une part, que les membres de la commission de contrôle des opérations électorales ont relevé que dans douze bureaux de vote sur les soixante bureaux que compte la commune, pendant une partie au moins du scrutin, il était systématiquement procédé par des représentants de la liste conduite par Monsieur Laguerre à un pointage des électeurs n'ayant pas encore voté, et, d'autre part, que dans dix bureaux de vote, dont deux signalés par la commission des opérations électorales, les représentants de la liste conduite par Monsieur CAROLE ont procédé aux mêmes constatations, que ni les observations contraires, de circonstance, portées sur les procès verbaux des 3ème et 41ème bureaux de vote par des délégués de la liste « Démocrates et progressistes » ni les attestations postérieures, établies pour les besoins de l’instance par des délégués et assesseurs de cette liste, ne sont de nature à infirmer ces constatations"...

Les juges établissent explicitement les avantages  que ces pratiques illégales peuvent conférer à la liste du néo-PPM :

"Considérant que la divulgation préférentielle à des tiers de renseignements recueillis par un membre du bureau de vote, en cours de scrutin, et l'octroi, dans cette mesure, de facilités particulières au profit de candidats d'une des listes en présence, est de nature, tant à porter atteinte à l'égalité des moyens dont l'ensemble des candidats peuvent légalement user qu'à permettre l'exercice de pressions de dernière heure susceptibles d'altérer la liberté de vote."

Pourquoi un constat aussi clair et aussi lucide, mettant en lumière les risques de "pressions susceptibles d'altérer la liberté de vote", ne conduit-il pas à une décision des juges plus conforme à la gravité des violations dénoncées ?


3-Le Tribunal Administratif reconnaît que le procès verbal du 48 ème bureau a été transformé.

Le mémoire produit pour notre recours montre clairement, preuves à l'appui, que des procès verbaux d'opérations de vote transmis en préfecture sont différents de ceux se trouvant en mairie ! Ces différences ont été relevées pour les procès-verbaux des bureaux n°5, 14, 27, 48, soit 4 bureaux.

Sur des procès-verbaux qui ont été adressés en Préfecture, on retrouve systématiquement la même phrase «Le scrutin s’est déroulé dans le calme et la sérénité », alors que les doubles de ces mêmes documents étaient gardés en mairie avec des observations et protestations des représentants des autres listes ou les observations de la Commission de Contrôle.

Le Tribunal Administratif confirme, partiellement, ce qui, pour tout esprit sérieux, relève de la falsification :

"S'il est vrai que, comme le relève Monsieur Carole, le procès verbal du 48 ème bureau transmis au préfet n'est pas celui sur lequel la commission des opérations électorales a porté ses observations, cette circonstance blâmable, sur laquelle monsieur Laguerre ne fournit au tribunal aucune explication, n'est toutefois pas de nature à porter atteinte à la sincérité du scrutin..."

Comment expliquer que deux procès verbaux différents sortent d'un même bureau de vote ? 

Chacun appréciera... Mais il est désormais clairement établi que des procès verbaux rédigés dans les bureaux de vote de Fort-de-France ne sont pas les mêmes que la municipalité transfère à la préfecture. Les observations qui risquent de gêner disparaissent ainsi des écritures.

Un tel constat donne à réfléchir sur l'éthique de ceux qui dirigent cette municipalité et sur l'ampleur possible des faux en écritures publiques de tous genres, en périodes électorales comme dans les actes administratifs...


Pour conclure, nous savons, d'expérience, que l'évocation de "l'écart des voix" entre les candidats, même lorsque des malversations sont démontrées, sert de prétexte au refus des tribunaux d'annuler des élections. La décision est d'ailleurs plus politique que juridique. On se rend donc compte qu'une liste peut piétiner le Code Électoral et être déclarée gagnante par un tribunal. Or, c'est justement le non respect des règles électorales qui permet, en partie, à de telles listes de creuser l'écart par rapport à leurs concurrents. 

Le respect du code électoral est ainsi devenu un élément d'appréciation secondaire. De fait, une prime est accordée au tricheur. 

Cette dérive mérite d'autant plus d'être soulignée et combattue sans faiblesse que la loi électorale permet désormais à une liste disposant de la majorité des suffrages exprimés de l'emporter dès le premier tour, quel que soit le nombre de suffrages exprimés.

Dans le cas des élections municipales de mars 2014, à Fort-de-France, la lecture comptable des résultats montre qu'au regard des 24738 suffrages exprimés (sur plus de 65000 électeurs) et des 12839 voix obtenues par le candidat néo-PPM, le second tour s'est joué à 470 voix. La fraude a ainsi permis de gagner au moins 8 suffrages supplémentaires dans les 60 bureaux et de faire basculer l'issue du scrutin.

L’ampleur de la fraude organisée pour pousser les électeurs à voter en faveur du néo-PPM et les violations du code électoral, jugées "blâmables" et "condamnables" par le Tribunal Administratif de Fort-de-France lui-même, ont empêché la tenue de ce second tour.

Nous prenons cependant acte, pour l'heure, du jugement du Tribunal Administratif et poursuivons avec sérénité et détermination la tâche entreprise pour que des élections complètement transparentes se déroulent enfin dans notre ville.


Francis CAROLE
UNION POUR LE CHANGEMENT À FORT-DE-FRANCE
Fort-de-France
Le 07/11/2015