UNE VERITE QUI RISQUE DE DERANGER !

68 scientifiques et experts internationaux ont demandé  à Bruxelles une interdiction formelle de construction de tout nouvel incinérateur et un moratoire sur les autorisations de co-incinération.
24 juin 1999,
séance plénière du Conseil Régional de Martinique. A l’ordre du jour,
le dossier de l’incinérateur du SICEM (Syndicat intercommunal du Centre
de la Martinique). L’enjeu de cette plénière est capital. La subvention
régionale de 25 millions de Francs (MF) devrait permettre au SICEM
d’être éligible aux fonds européens pour un projet d’investissement de
332 MF.
La question est sur toutes les lèvres : Alfred Marie-Jeanne,
nouvellement élu à la présidence du Conseil Régional, va-t-il, par son
consentement, confirmer le vote du 30 avril 1997 et autoriser ainsi la
construction d’un incinérateur d’ordures ménagères en Martinique ?


Interpellé directement par courrier, un dossier complet comportant un rapport d’analyse du Ministère de l’Environnement ainsi que les conclusions du « Comité de la Prévention et de Précaution » relatives aux « recommandations dioxines » lui a été remis.

Selon les écologistes, ce projet, du fait des rejets toxiques de dioxine et de furane, posera à l’avenir des problèmes de pollution et de santé publique. Une certaine effervescence règne dans et autour de l’hémicycle de Plateau Roy : pour la première fois, des associations interviendront au cours d’une plénière régionale. La démocratie participative semble s’organiser à Plateau Roy pourtant les choses sont très mal s'engagées : la visioconférence depuis Paris avec le Pr. André Picot, toxicochimiste, directeur de recherche au CNRS, après quelques surprenants ratés techniques (image de bonne qualité mais absence de son) est annulée sur ordre du président de la Région. Malgré l’audition des associations écologistes, de Médecins du Monde Antilles, et plusieurs heures de débat, la cause est entendue. Des élus, transformés en porte parole des promoteurs, reprennent à la virgule près les arguments contenus dans le dossier de présentation. Après une trahison retentissante et moult volte-face, le vote est sans appel : 40 "Pour" et 1 "Abstention", celle du Conseiller Louis Boutrin. Sa véhémente plaidoirie en faveur du principe de précaution, l’évocation de l’affaire des œufs contaminés à la dioxine, la démission récente des Ministres de la Santé et de l’Agriculture de Belgique et surtout, le rappel de la responsabilité pénale des élus régionaux, rien, absolument rien, n’a pu changer le cours d’une histoire déjà écrite.

9 novembre 2006, à l’issue de l’Appel de Paris, 68 experts internationaux ont ratifié le mémorandum qui demande aux instances européennes de mettre en œuvre des mesures pour protéger la santé et surtout réduire le nombre de déclenchements de cancers. Parmi les préconisations, l’interdiction formelle de construction de tout nouvel incinérateur, et un moratoire sur toute nouvelle autorisation de coïncinération (boues des stations d’épuration – déchets médicaux et hospitaliers – bois traités – déchets dangereux). Au nombre des signataires, on retrouve des personnalités éminentes telles que les deux Prix Nobel de Médecine français, les Professeurs François Jacob et Jean Dausset, de nombreux membres des Académies des Sciences et de Médecine parmi lesquels les Prs Jean Bernard, Yves Coppens, François Gros, Lucien Israel, Luc Montagnier, des personnalités médiatiques, humanistes comme Nicolas Hulot, Albert Jacquard, Boutros Boutros-Ghali (ancien secrétaire général de l'ONU), sans oublier le Pr. Belpomme, cancérologue, instigateur de cet Appel de Paris. Au terme de leurs travaux et s’appuyant sur des recherches récentes, ces scientifiques ont déclaré que « l'incinération aveugle des déchets, telle que la propose la directive 2000/76/CE est en l'état extrêmement dangereuse, sans garantie de sécurité sanitaire, polluante pour l'environnement et de plus  insuffisamment rentable économiquement ».

La cancérogénicité des fumées des incinérateurs est aujourd’hui admise par le gotha de la communauté scientifique. Et, le danger est tel, qu’il fait pression sur la plus haute autorité politique de l’Europe pour interdire les incinérateurs. Voilà une vérité qui risque de déranger tous ceux qui ont entériné les propositions de CGEA – Onyx (groupe VIVENDI Environnement), exploitant de l’usine d’incinération de Dillon. Une décision prise en dépit du bon sens et dont on commence à peine à mesurer les conséquences sur la santé des martiniquais.