Après la condamnation à perpétuité d'Yvan Colonna

manifcolonna2.jpg

15 000 Corses dans la rue

Pour les nationalistes, il y a désormais " une affaire Colonna". Ils n'espéraient rien des débats judiciaires. Aussi, loin de les surprendre, le verdict de la cour d'assises conforte leur conviction : pour eux, Yvan Colonna est victime d'une " vengeance ordonnée au nom de la raison d'Etat".  


Le berger de Cargèse devient une sorte de martyr de la cause, un héros de la lutte, le symbole d'une justice aux ordres qui condamne un " innocent" pour laver l'affront fait à la République. La manifestation prévue samedi 28 mars à Ajaccio devait constituer la première étape d'une campagne qui s'annonce longue

Depuis qu'Yvan Colonna et ses avocats ont quitté la salle d'audience le 11 mars, des rassemblements ont eu lieu à Ajaccio, Bastia, Corte ou Porto-Vecchio. A chaque fois, plusieurs centaines de personnes se sont réunies pour fustiger " la violation des droits de la défense et une atteinte aux principes de l'impartialité".S'ils ont déserté le prétoire, les avocats d'Yvan Colonna, aux premiers rangs desquels l'ancien bâtonnier d'Ajaccio Me Antoine Sollacaro et l'un des leaders autonomistes, le Bastiais Me Gilles Simeoni, n'ont pas rechigné à plaider "la déloyauté des juges". Une manière de préparer ce qui va suivre : les organisations nationalistes vont essayer de faire d'Yvan Colonna la figure emblématique de leur combat. Des tee-shirts à son effigie, "Gloire à toi Yvan", sont déjà en vente.

 

RELATIVE DISCRÉTION

 

Mais au-delà de cette unanimité de façade, la défense d'Yvan Colonna ne tardera pas à faire l'objet d'une vive rivalité entre les divers courants nationalistes, indépendantistes d'un côté, autonomistes de l'autre. Les seconds, dont la soeur d'Yvan Colonna, Christine, est l'une des élus à l'Assemblée territoriale, sont des adversaires déclarés de la violence et partisans du dialogue. Ils sont à l'origine du comité de soutien et des initiatives organisées dans la période récente. Leur ambition est d'élargir aux autres forces politiques de l'île, de gauche mais aussi de droite, la solidarité en faveur d'Yvan Colonna. Le prix à payer pour que cette stratégie réussisse, c'est que la contestation tienne à distance les plus radicaux soucieux d'en découdre avec les forces de l'ordre et les clandestins qui ne manqueront pas de ressortir les cagoules dans les nuits à venir.

Les indépendantistes ne partagent pas cette démarche. Ils continuent d'apporter leur soutien aux"soldats" éparpillés dans les différents FLNC, devenus au fil des ans des groupes livrés à eux mêmes sans réelle structure. Solidaires d'Yvan Colonna, ils s'en sont tenus pour l'heure, à une relative discrétion, se contentant de participer aux initiatives prises par le comité de soutien. Ils devraient maintenant intensifier leur action et faire de la libération d'Yvan Colonna un de leurs objectifs. En perte de vitesse électorale, les forces regroupées au sein de Corsica Libera parient sur un retour à une confrontation directe avec " l'Etat colonial". Partisans d'opérations spectaculaires - à l'instar de l'occupation de la maison de Christian Clavier à Porto-Vecchio fin août 2008 -, ils ne désespèrent pas de récupérer le terrain perdu sur les autonomistes lors du scrutin régional de 2010, le plus important pour la mouvance nationaliste.