"Le problème, c'est l'accumulation de cadenas et le fait que ça commence à affaisser la structure des parapets du Pont des Arts", s'inquiète Jean-Pierre Lecoq, maire (UMP) du VIe arrondissement de Paris. Il y en a tellement que certains sont accrochés à d'autres, faute de place sur le parapet. "Cela devient fou !", constate l'édile.
"Le danger, c'est qu'un jour il y ait un bout de parapet avec plusieurs kilos de cadenas qui tombe sur la tête des touristes sur une péniche, ça peut les blesser gravement, voire les tuer", s'alarme-t-il.
Récemment, des affichettes mystérieuses, interdisant le dépôt de cadenas sous peine d'amende de 20 euros, ont été accrochées sur le pont. Elles avaient une apparence officielle, mais la mairie de Paris et la préfecture ont démenti en être à l'origine.
"Ma suggestion, c'est que les cadenas soient retirés à intervalles réguliers quand on atteint un certain seuil, tous les six mois. Cela permet de venir et de revenir à Paris et comme ça, on aurait une situation plus satisfaisante et moins dangereuse à terme", avance l'élu parisien.
Toutefois, cette solution passerait mal aux yeux des touristes qui, pour certains, font des milliers de kilomètres pour venir célébrer leur idylle dans la capitale.
"Il ne faut pas les enlever, c'est le symbole de l'amour. Il faut plutôt consolider le pont", estime Naomi Jameson, touriste australienne, posant aux côtés de son petit ami sur le Pont des Arts devant le cadenas qu'ils viennent d'accrocher en se promettant l'amour éternel.
"Hérésie"
Raj Nair, touriste singapourien, considère pour sa part que "ça casse le mythe", alors que Mathilde Gouloumes, étudiante en mode à Paris, dénonce "une hérésie". "Quoi qu'il arrive, l'autorité qui les enlèverait porterait une atteinte grave à la ville. Paris, c'est la ville de l'amour", insiste-t-elle.
Certains touristes reconnaissent néanmoins que l'accumulation peut poser problème. "C'est vrai que c'est lourd. A ce rythme, ça va s'écrouler un jour. En plus, c'est anti-écolo et ce n'est pas une garantie pour un mariage réussi", analyse Amand Buytaert, touriste belge.
Les rambardes du Pont des Arts étant saturées, certains amoureux ont trouvé une alternative en accrochant leurs cadenas sur les lampadaires et la rambarde longeant le quai François Mitterrand.
D'autres ont pris d'assaut la passerelle Léopold Sédar Senghor, moins saturée, en face du Musée d'Orsay, et le pont de l'Archevêché, non loin de Notre-Dame, où de nombreux touristes s'ingénient à fixer leur cadenas.
De leur côté, les professionnels du tourisme ne sont pas inquiets. "On part du principe qu'il n'y a pas de problème pour la navigation. C'est à la mairie de Paris de faire retirer les cadenas ou de mettre des protections" si elle les juge dangereux, avance Nicolas Bottilagine, directeur technique aux Vedettes du Pont Neuf.
L'enlèvement complet des cadenas "n'est pas à l'ordre du jour. On trouve ça plutôt sympa. (...) Quand on constate que l'accumulation pose un problème de sécurité, à ce moment-là, on enlève les cadenas en trop dans les zones où c'est dangereux. On ne va pas débarrasser tout un pont de ses cadenas", assure un officiel de la mairie de Paris.
Le maire du VIe arrondissement, lui, prévient que "quand on n?agit pas, tôt ou tard il y a une catastrophe qui arrive. Le problème vous revient dans la figure avec une acuité supérieure".