Une large majorité a adopté la résolution déposée par le PS
Les socialistes rêvaient d’un «moment d’unité nationale». Leur propositon de résolution pour la reconnaissance d'un Etat palestinien n'a pas fait consensus, mais a été adoptée à une large majorité, ce mardi, par les députés : 339 ont voté pour, 151 contre, 16 se sont abstenus et 68 n’ont pas pris part au vote.
Debout, les députés de gauche ont longuement applaudi l’adoption du texte, tandis que la droite quittait un hémicycle bien plus garni que vendredi dernier, où seuls une cinquantaine de parlementaires avaient assisté au débat.
Après le vote des Parlements britannique et espagnol et le geste de la Suède en octobre, les parlementaires français ont donc à leur tour fait un premier pas vers la reconnaissance de l’Etat de Palestine. Un premier pas très symbolique, puisque la résolution, sans valeur contraignante, n’engage en rien l’exécutif. Les opposants au texte n’ont d’ailleurs pas manqué de noter que ni Manuel Valls ni Laurent Fabius - qui s’est exprimé vendredi lors du débat - n’étaient présents lors des explications de vote. D’après la formulation de la résolution, «l’Assemblée nationale […] invite le gouvernement français à reconnaître l’État de Palestine en vue d’obtenir un règlement définitif du conflit.»
Une «invitation» aux airs d’«injonction» qui a déplu aux lecteurs pointilleux de la Constitution. Lesquels ont rappelé qu’une résolution parlementaire ne devait pas dicter la conduite de sa politique au gouvernement. Encore moins en matière de politique étrangère, ont fait valoir des députés de droite, qui voient dans les questions diplomatiques la chasse gardée du président de la République. «On est clairement dans le domaine réservé à l’exécutif, ce vote affaiblit la voix de la France», a répété Christian Jacob (UMP). Sur le fond, les anti-résolution estiment que la reconnaissance de la Palestine ne doit pas être unilatérale mais intervenir à l’issue d’accords de paix, alors que la gauche compte sur cette reconnaissance pour réamorcer des pourparlers au point mort depuis des mois. «Notre résolution est un appui clair et résolu à une relance du processus de négociation», explique François Loncle, qui faisait partie des députés PS à l’initiative de la résolution (avec Benoît Hamon, Gwenegan Bui, Pouria Amirshahi).
Parmi les députés PS, seul un (René Rouquet) a voté contre et cinq se sont abstenus, dont Armand Jung, président du groupe d’amitié France-Israël et François Pupponi, député-maire de Sarcelles.
LE GROUPE UMP SUR LA LIGNE DE SARKOZY
Au sein du groupe UMP, la grande majorité a suivi la consigne et voté contre (136), comme Luc Chatel, Laurent Wauquiez ou NKM. Les très pro-israéliens Hervé Mariton, Claude Goasguen, Christian Estrosi, se sont évidemment opposés au texte, le maire de Nice condamnant«un choix honteux et indigne» de la majorité de gauche. Une ligne raccord avec celle du nouveau chef du parti, Nicolas Sarkozy, qu’il a lui-même exprimée, ce mardi matin en réunion de groupe, devant les députés. «Il a évidemment contribué» à cette décision de voter contre, a jugé Christian Jacob. Son groupe s’est durci, ces dernières semaines, sur la reconnaissance de la Palestine, alors qu’il avait d’abord envisagé de ne pas participer au vote. Ce qu’ont fait 48 députés (dont François Fillon et Valérie Pécresse). Ils ont tout de même été neuf à approuver le texte, dont Nicole Ameline, Bérengère Poletti et Jacques Myard, bien loin de la «petite vingtaine» qu’Axel Poniatowski espérait rallier.
Les centristes qui avaient la liberté de vote se sont divisés: quatre ont voté pour, 14 contre, notamment Jean-Christophe Fromantin, Meyer Habib, député des Français de l’étranger dont la circonscription englobe Israël, Jean-Christophe Lagarde et le président du groupe, Philippe Vigier.
La résolution a, à l’inverse, fait le plein des voix auprès des députés EE-LV et du Front de gauche. Le communiste François Asensi - dont le groupe GDR avait déjà déposé une vingtaine de textes appelant à la reconnaissance de la Palestine - a applaudi un «vote devant l’histoire, de justice et de paix» et rappelé le «droit des peuples à disposer d’eux-mêmes». Et le chef de file des députés écologistes, François de Rugy a insisté sur «l’esprit d’équilibre»: «le droit inaliénable du peuple palestinien à se doter d’un Etat doit être en toutes circonstances réaffirmé comme doit être réaffirmé le droit d’Israël à vivre en paix et en sécurité.» Les radicaux de gauche soit n’ont pas pris part au vote, soit ont voté pour, «même s’ils ont exprimé des réserves sur la procédure, le choix du moment, les nuances», a précisé leur orateur, Paul Giacobbi. Comme son collègue Gilbert Collard, la députée FN Marion Maréchal-Le Pen s’est finalement abstenue, après avoir pourtant annoncé qu’elle approuverait le texte parce qu’il «donnera[it] des droits et des devoirs pour lutter contre le terrorisme».
Les sénateurs se prononceront, eux, sur une résolution similaire, le 11 décembre
SOURCE : Libération