« Monsieur LETCHIMY, vous ne pouvez pas tromper tout le monde tout le temps ! »
Intervention de Louis BOUTRIN
PLÉNIÈRE DU 22 SEPTEMBRE 2015
Cela fait un peu plus de 5 ans que je siège dans cet hémicycle et je dois vous reconnaître une qualité indéniable, c’est votre remarquable capacité à instrumentaliser l’opinion publique. Vos annonces démagogiques de 8.000 emplois créés et de 1.400 emplois-aidés, hier, lors de l’émission Décryptage constituent une belle illustration.
Alors, c’est vrai qu ‘en 2010 vous avez su tromper une fois 400 000 martiniquais. Et si on s’inspirait d’Abraham LINCOLN on pourrait vous rétorquer que « Vous pouvez tromper quelques personnes tout le temps et tout le monde quelques fois, mais vous ne pouvez pas tromper tout le monde tout le temps ».
Dès lors, de cette maxime du grand abolitionniste américain, on pourrait déduire qu’il vous sera difficile de tromper plusieurs fois 400.000 martiniquais car, malgré votre communication tonitruante, vous avez été pris la main dans le sac et les pieds dans le tapis du Code Général des Collectivités Territoriales. Et là, vous aurez toutes les peines du monde à vous désenkayer !
REVENONS-EN
AUX FAITS !
Par un communiqué de Presse du Conseil Régional en
date du 3 août 2015, vous nous informiez que « Dans un courrier du
lundi 3 août 2015 la 1ère VP du CR apporte des éléments au président
du CR sur sa mise en examen « pour recel d’abus de biens sociaux »
dans l’affaire SARL « les deux font la paire » (Paragraphe 1).
Soyez rassuré, Madame CONCONNE, comme tous les justiciables,
bénéficie de la présomption d’innocence et nous n’aborderons pas cet aspect de
son affaire.
Cependant, au paragraphe 3 de votre communiqué de
presse, de manière très explicite, vous précisez : « Dans ce
courrier Catherine CONCONNE remet au Président du Conseil Région sa
démission de toutes ses fonctions d’élus à la Collectivité ».
Dans ce même communiqué de Presse, au paragraphe 6,
vous affirmez : « Cette affaire n’étant aucunement liée à ses
missions dans la collectivité, Serge LETCHIMY a décidé de ne pas accepter
la démission de Catherine CONCONNE de ses fonctions d’élue régionale et
de première Vice-Présidente de l’institution » (x 2 fois).
Cette annonce de la démission de Madame CONCONNE et
son refus ont été confirmés par vous-même en qualité de Président du Conseil
régional lors de plusieurs interventions sur les médias notamment,
⁃
au JT d’ATV
du 4 août à 19 h 00
⁃
au JT de
M1ÈRE du 4 août à 19H 00
QUE TOUS LES TÉLÉSPECTATEURS ONT VUES ET
ENTENDUES !
Nous rappelons
aux martiniquais qui nous écoutent qu’un Président de Conseil régional
n’a aucun pouvoir pour apprécier l’opportunité de la démission volontaire d’un
conseiller régional. Il a pour obligation de donner immédiatement
avis de cette lettre au Préfet de Région, qui en prend acte afin de
désigner le remplaçant.
Il ressort de ces éléments factuels qu’en
violation des dispositions législatives relatives à la démission volontaire
d’un conseiller régional, vous vous êtes octroyé des prérogatives qui ne vous
sont pas reconnues par la loi.
QUE DIT LA
LOI, À CET EFFET ?
Aux
termes de l’article L.4132-2 du Code Général des Collectivités Territoriales
« : « Lorsqu'un conseiller régional donne sa démission, il
l'adresse au président du conseil régional qui en donne immédiatement
avis au représentant de l'État dans la Région ».
La
démission devient définitive dès la réception de la lettre de
démission par le président du Conseil régional qui n’a pas à se prononcer sur
le refus ou l’acceptation de la démission.
Devant
votre obstination à bafouer des dispositions essentielles du CGCT, nous avons
dû faire un recours hiérarchique auprès du Préfet de Région et ce, dès le 12
août 2015. Recours également transmis au Premier Ministre et au Ministre de
l’Intérieur.
Force
est de constater que plus d’un mois après, le Préfet de Région n’a toujours pas
dénié nous adresser sa réponse. Nous ne faisons pas de commentaires sur
l’attitude du Préfet mais les Martiniquais qui nous écoutent sauront
interpréter ce silence complice.
La
jurisprudence administrative précise que la démission volontaire d’un
conseiller entre en vigueur dès sa réception et ce, même si le conseiller
se rétracte après réception de la lettre (CE, 12 février 2003, Commune
de la Seyne-sur-Mer ; TA Grenoble, 31 mars 1992).
Le
Conseil d’État précise encore que « Le conseiller dont la
démission est entrée en vigueur ne peut plus participer aux délibérations du
Conseil municipal ». (CE, 26 mai 1995, Commune
de Vieux-Habitants, n° 167914).
Monsieur
le Président, si on s’en tient à cette jurisprudence du Conseil d’État, toutes
les délibérations prises, aujourd’hui, en présence de Madame CONCONNE seront
entachées d’irrégularité.
Dès
lors, la présence de notre ex-collègue dans l’hémicycle aujourd’hui, est de
nature à troubler le fonctionnement de l’institution régionale et l’ordre
public. Si elle est maintenue, nous serons contraints et forcés de quitter
l’hémicycle.
POUR
CONCLURE,
Nous
tenons à préciser que depuis Mars 2010, les Martiniquais qui suivent nos plénières
ont su apprécier notre rigueur, notre sérieux, notre vigilance mais surtout
notre assiduité aux travaux de cette collectivité. Ils comprendront donc
aisément notre désapprobation, notre refus d’encourager votre dérive
autocratique et notre décision de ne pas siéger en présence de Madame CONCONNE.
Louis
BOUTRIN