AMIANTE - AUBRY : TAUBIRA REFILE LA PATATE CHAUDE AU CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE

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Martine Aubry sera fixée sur son sort le 17 mai. 

 

La cour d'appel de Paris a examiné à huis clos la contestation de la mise en examen de Martine Aubry dans l'affaire de l'amiante. La chambre de l'instruction de la cour a mis sa décision en délibéré au 17 mai.

 


Début novembre 2012, la juge d'instruction Marie-Odile Bertelle-Geffroy mettait en examen Martine Aubry pour «blessures et homicides involontaires» dans l'affaire de l'amiante. Elle reproche à l'ex-patronne du PS des faits remontant à la période 1984-1987, quand elle était directrice des relations du travail au ministère du Travail.

Ce jeudi, dès 14 heures, la chambre de l'instruction a examiné à huis clos les requêtes en nullité déposées par neuf personnes poursuivies dans l'enquête sur l'exposition à l'amiante de salariés de l'usine Ferodo-Valeo de Condé-sur-Noireau (Calvados). Sa décision a été mise en délibéré au 17 mai. «J'ai toujours dit, et ce depuis le jour où ma cliente a été mise en examen, que ça ne tenait pas une seconde, confie Yves Baudelot, l'avocat de Martine Aubry. Il faut des indices graves et concordants d'une faute caractérisée. Or, on cherche tellement cette faute que le Parquet général a requis l'annulation de cette mise en examen! Aucun élément dans le dossier ne permet pas d'accuser sa cliente.»

Le ministère public demande l'annulation de l'ensemble des mises en examen. «L'affaire est pliée, confie d'ailleurs en off une source judiciaire. La mise en examen de Martine Aubry sera levée.»

Le poids du lobby de l'amiante

La juge d'instruction s'est intéressée à l'influence du Comité permanent amiante (CPA), le lobby des industriels de l'amiante. En 2005, un rapport d'information sénatorial attribuait justement l'inertie de l'État au CPA. Cette structure était composée de scientifiques, tels que les pneumologues Jean Bignon et Patrick Brochard (mis en examen lui aussi), de représentants des industriels, mais aussi des syndicats et des ministères concernés (ministère du Travail, de l'Industrie et de la Santé).

Martine Aubry assure n'avoir jamais entendu parler du CPA, même si son bras droit, Jean-Luc Pasquier, y siégeait. Le rapport du Sénat évoque un «modèle de lobbying, de communication et de manipulation» qui «a su exploiter en l'absence de l'État, de pseudo-incertitudes scientifiques qui pourtant étaient levées, pour la plupart par la littérature anglo-saxonne la plus sérieuse de l'époque».

En parallèle à cette affaire de l'amiante, il y a l'affaire, en quelque sorte, avec «l'affaire Bertella-Geffroy». Début mars, elle devait faire ses cartons, le ministère de la Justice ayant annoncé début janvier que la juge d'instruction devait quitter ses fonctions. La magistrate étant soumise à la loi qui limite à dix ans les fonctions d'un juge spécialisé. Mais, vendredi dernier, la Chancellerie a annoncé que la ministre de la Justice, Christiane Taubira, sollicitait l'avis du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) avant de se prononcer sur la mutation de la juge. Rendez-vous donc le 15 mars prochain.

«Taubira refile la patate chaude au Conseil supérieur de la magistrature»

Nombre d'observateurs ont vu dans cette mutation une sanction de la juge pour avoir mis en examen Martine Aubry. «Il est évident que c'est la mise en examen de Martine Aubry qui a coûté sa place à Bertella-Geffroy», confie au Figaro une source judiciaire. «Le ministère s'est rendu compte qu'il faisait une connerie et que cette histoire allait lui revenir dans la figure comme un boomerang. C'est pourquoi Taubira a choisi de passer par le CSM pour lui refiler la patate chaude. Il fallait éviter que ce soit une décision 100% politique», raconte une autre.

Enfin, cette phrase d'un avocat: «Pourquoi se séparer d'un juge qui ne sort jamais rien à part quand il met quelqu'un comme Martine Aubry en examen? C'est complètement contre-productif!» Conclusion de tous ces interlocuteurs: la mise en examen de Martine Aubry va être levée et la juge Bertella-Geffroy restera à son poste pour les deux ans qui lui restent avant de partir à la retraite. Balle au centre