CANAL DES ESCLAVES :
La concrétisation d'une revendication récurrente des Martiniquais
Construit en 1770 par les esclaves pour irriguer les distilleries de Beauregard, Anse Latouche (Carbet), de Blondel et Desfontaines (Saint-Pierre), le Canal des esclaves est un ouvrage hydraulique chargé de mémoire. Il fut laissé à l’abandon après l’éruption de 1902, rouvert en 1955 puis entretenu par l’ex-Département qui l’inscrit au Plan Départemental des Itinéraires de Promenade et de Randonnées (PDIPR). Son entretien est financé par la CTM dans le cadre de ses compétences et responsabilités au titre du PDIPR. La CTM porte également un projet de valorisation du site qui comprend notamment la mise en place d’une muséographie, d’une signalétique, d’un parcours de botanique tropicale et d’un projet d’hydro-électricité d’où sa demande de transfert de domanialité à l’Etat. En effet, suite à un arrêt du 3 mai 2007 de la Cour de Cassation, l’Etat est reconnu comme propriétaire de l’ouvrage hydraulique.
Le vote à l’unanimité de l’Assemblée de Martinique le 21 septembre 2018 est la concrétisation d’une revendication récurrente des Martiniquais. Il permettra au Président de l’Exécutif de finaliser ce transfert, de signer une convention avec le Préfet afin de financer les travaux qui seront réalisés par la CTM. Retour sur un haut lieu de mémoire de l’histoire de la Martinique.
4,3 Kilomètres, c’est la distance que vous aurez à parcourir sur ce sentier de randonnée qui demeure un lieu de commémoration en mémoire des esclaves. Jadis long de 12 km et large de 30 centimètres par endroit, ce sentier ne finit pas de forcer l’admiration mais interpelle les consciences quant aux conditions de travail de ceux qui, à dos d’hommes, ont dû transporter d’énormes blocs de pierre pour adosser, à flanc de falaise, un ouvrage hydraulique qui prend sa source dans la Rivière du Carbet, au quartier Fond Mascret (Fond Saint-Denis).
Actuellement, le Canal de Beauregard alimente sur près de 100 hectares un réseau de distribution d’eau qui dessert principalement les bananeraies de l’Habitation Beauregard. Les propriétaires des lieux, les Consorts Marraud Des Grottes, ont revendiqué la propriété du canal. Le litige qui a duré plusieurs années a trouvé son épilogue devant la Cour d’Appel en avril 2006 par une décision qui a reconnu l’Etat propriétaire du foncier et de l’ouvrage hydraulique. Décision confirmée par un arrêt de la Cour de Cassation en mai 2007 qui reconnaît le canal comme faisant partie du Domaine Public Fluvial de l’Etat.
Quant au parcours de randonnée pédestre, c’est l’opportunité d’admirer la diversité d’une flore exceptionnelle et des vues panoramiques sur le Petit Piton et les magnifiques cascades du parcours.
Il est impraticable depuis la tempête Matthew (2016) et l’ouragan Maria (2017) malgré les travaux réalisés en 2017. Reste à réaliser le curage de l’ouvrage et le traitement des fuites d’eau en pied de muret. Ces travaux estimés à 300.000 € feront l’objet d’une convention avec l’Etat et seront réalisés par la CTM qui prévoit, entre autre, l’aménagement des portes d’entrée du sentier, le confortement du tunnel de la Maison Rousse, l’accès au bassin en aval du captage et la sécurisation des tronçons. Autant de travaux qui nécessitaient la maîtrise du foncier et de l’ouvrage hydraulique ainsi que le transfert de domanialité.
Avec l’ouverture programmée du Canal des Esclaves, c’est un des deux parcours encore impraticables que la CTM finalisera dans les mois à venir. Une aubaine pour l’économie touristique de la commune de Fond Saint-Denis.
Louis BOUTRIN
