ILE MAURICE - NAVIN RAMGOOLAM GRAND VAINQUEUR DES LEGISLATIVES

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ISSU DE LA MAJORITE HINDOUE, IL ACCEDERA AU POSTE DE PREMIER MINISTRE POUR LA 3° FOIS

 

PORT-LOUIS — Navin Chandra Ramgoolam, assuré d'être reconduit au poste de Premier ministre de l'Ile Maurice après la victoire électorale de sa coalition, va diriger pour la troisième fois le gouvernement de cette île relativement prospère de l'océan Indien.

Issu de la majorité hindoue du pays, âgé de 62 ans, M. Ramgoolam, médecin et avocat de formation, a surtout exercé la politique, une tradition familiale.


 

Son père, Seewoosagur Ramgoolam, a aussi été celui de l'indépendance mauricienne, et le leader historique du Parti travailliste (Ptr), au pouvoir de 1968 à 1982, jusqu'à sa défaite face à Sir Anerood Jugnauth, l'actuel président de la République.

 

Navin Ramgoolam dit être entré en politique "par accident". Personne n'ignore que le Parti travailliste était allé le chercher pour capitaliser sur le nom de Ramgoolam rendu célèbre par son père.

 

A l'époque, il lui avait fallu se faire un prénom, et aussi faire oublier quelques surnoms peu flatteurs, comme "Disco boy" ou "éternel étudiant".

Mais cet homme élancé et élégant, volontiers charmeur, a affirmé sa personnalité au fil de sa carrière et s?impose aujourd?hui comme un stratège redoutable. Son alliance avec le Mouvement Socialiste Mauricien dirigé par Pravind Jugnauth, fils de sir Anerood Jugnauth, a pris de court ses adversaires et a contribué à la victoire de sa coalition aux élections législatives de mercredi.

Né le 14 juillet 1947 à Port-Louis, il a fait ses études primaires et secondaires à Maurice, puis ses études universitaires à Dublin. Il a également passé de nombreuses années à Londres, où il a suivi sur le tard des études de droit et obtenu un diplôme d'avocat.

 

Marié sans enfant, Navin Ramgoolam aime les biographies politiques, le jazz et la musique classique. L'ordinateur, dit-il, "fait partie de son environnement".

M. Ramgoolam est devenu pour la première fois Premier ministre après sa victoire aux législatives de décembre 1995 à la tête d'une alliance entre son Parti travailliste et le Mouvement militant mauricien (MMM) de Paul Bérenger.

 

Devenu le principal adversaire de M. Ramgoolam après son éviction du gouvernement en 1997, Paul Bérenger à remporté les élections générales de 2000 en alliance avec le Mouvement Socialiste Militant de sir Anerood Jugnauth. Navin Ramgoolam a pris sa revanche lors du scrutin suivant de juillet 2005. Il a depuis mené une politique économique jugée pragmatique, s'efforçant de marier un libéralisme propre à séduire les investisseurs étrangers avec une protection sociale pour les plus défavorisés des 1,2 million de Mauriciens.

 

M. Ramgoolam doit maintenant tenir sa promesse électorale de "maintenir la prospérité économique de Maurice". La relative réussite économique de l'île, fondée sur le textile, le sucre et le tourisme de luxe, est menacée par la crise économique dans le monde, et en particulier dans l'Union européenne, son principal partenaire économique. 

Source : AFP

 

 

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Aujourd’hui, à 18 heures, les bureaux de votes purent annoncer la victoire de l’Alliance de l’Avenir, menée par le Parti Travailliste aux élections législatives de Maurice. Quelles observations puis-je faire au terme d’une campagne intense, avec des dérapages, mais qui, dans l’ensemble m’a révélé un peuple mauricien admirable, digne, qui s’est livré à un exercice de démocratie exemplaire. J’y ai décelé des germes d’un changement pour l’avenir politique de ce pays ancré au cœur de l’océan Indien, et qui fait montre d’une culture démocratique qui en étonnerait plus d’un!

I – Des pronostics déjoués

Fidèle à sa tradition de pays des jougadères (joueurs patentés) où tout peut donner lieu à des paris chez les bookmakers, les mauriciens ont pu apprendre que l’avance donnée aux travaillistes depuis la dissolution du Parlement par la coalition au pouvoir (Parti Travailliste/Parti Mauricien Xavier-Luc Duval/MSM) s’amenuisait progressivement. On a même parlé, la semaine dernière d’une victoire à l’arrachée de L’Alliance du Cœur (le MMM de Paul Bérenger en tête)… Arrivé à Maurice seulement depuis mercredi dernier, c’est donc avec les yeux d’un observateur quelque peu distant du jeu politique mauricien que je fais ces quelques observations, sur le vif, car les résultats ont été annoncés il y a seulement 4 heures. Car je me suis contenté de me promener dans cette île passionnée par ces consultations (même si le taux d’abstention a augmenté).

J’ai donc assisté à des défilés de voitures pétaradantes, parées des oriflammes de leurs alliances respectives à Triolet, le bastion du Premier Ministre et leader de l’alliance sortante. Je fus surpris de constater que les voitures mauves étaient plus nombreuses que celles des rouges (Travaillistes) qui avaient sillonné les rues du village le plus long de Maurice. Je voyais là un signe annonciateur de changement car les mauves semblaient devancer l’alliance gouvernementale non seulement en nombre, avec surtout avec ce «winning mood» (esprit de vainqueur) qui semblait manquer à Navin Ramgoolam, dont le visage semblait marqué par une gravité croissante, surtout après des dérapages verbaux, pratiqués aussi par Paul Bérenger, son challenger.

 J’ai ressenti un flottement dans le camp de l’Alliance de l’Avenir, et beaucoup de mauriciens ont parlé, ces derniers jours, d’élections «serrées»… Rien n’était joué d’avance…

II – Les nouvelles donnes

Aujourd’hui donc, la télévision nationale, la MaBC1, a consacré l’essentiel de ses amissions au décompte des votes, avec les traditionnels commentaires sur les tendances perceptibles dès les premiers milliers de votes de 20 circonscriptions de l’île, et de celle de l’île Rodrigues.

Dès midi, les premières estimations laissaient poindre une victoire possible de l’Alliance de l’Avenir. Les décomptes n’ont jamais entamé cette crête bleue-blanche-rouge. Cependant, il y a une surprise de taille au sein même de l’Alliance victorieuse: le MSM de Pravind Jugnauth, fils de l’ex-Premier Ministre, Aneerood Jugnauth, récolte une douzaine de sièges, chose qui était impensable seulement la veille. Les jeux sont, en quelque sorte, ouverts pour considérer le MSM comme une sorte d’alternative au sein même de la majorité gouvernementale, pour voir dans Pravind Jugnauth un probable successeur de Ramgoolam. Une sorte de rééquilibrage de pouvoir au sein même de l’électorat mauricien hindou traditionnel, qui enverrait peut-être ici un message quant à une alternance intra alliance pour le poste de Premier Ministre après le mandat de Navin Ramgoolam.

Autre surprise de taille, le vote partagé de la Plaine Verte, circonscription à majorité musulmane, et circonscription-phare de Maurice, un vote bariolé qui revêt une double physionomie. La première: c’est la seule circonscription à avoir voté un candidat de l’Alliance de l’Avenir (Rashid Beebeejaun, n° 2 du gouvernement), un de l’Alliance du cœur, et un député du FSM, en la personne de Cehl Meeah, ancien leader du Hizboullah. La deuxième a trait à cette même répartition de voix inédite, qui écorne le bipartisme de facto du système électoral mauricien. Est-ce qu’une troisième force naîtrait au sein de cette circonscription? Est-ce aussi un message envoyé aux politiciens qui demandent de voter en bloc, c’est-à-dire, les trois candidats du parti sur la liste? Les électeurs de cette circonscription qui fut l’ancien bastion du MMM de Paul Bérenger, et qui avait voté les trois candidats du Parti Travailliste en 2005, disent-ils aux politiciens que l’électorat peut aussi voir ses intérêts passer en premier, avant la fidélité à un parti? En tout cas, ce fait électoral est assez nouveau pour que l’on s’y attarde à l’avenir.

On pourrait aussi y voir, en sus d’une certaine désaffection pour les partis traditionnels, un désir du mauricien pour un scrutin proportionnel, du moins, plus fidèle à la diversité de ses ressentis sociologiques et politiques. Car le système électoral basé sur le scrutin majoritaire, tout en garantissant une stabilité gouvernementale en favorisant les partis principaux, cependant, ne tient pas assez compte des nuances et des différences de l’électorat, surtout quand il s’agit d’une «nation arc-en-ciel». On peut voir ce vote plus contrasté dans les régions urbaines, ce qui a joué contre les challengers de Ramgoolam, qui escomptaient un vote massif dans les villes, à l’opposé de l’électorat de l’équipe gouvernementale, essentiellement rurale à sa base. Si le village a voté massivement pour Ramgoolam, la ville a pondéré ses choix.

Est-ce là un clivage naissant entre deux cultures politiques? Cette question mérite d’être posée, tant ces élections dénotent un comportement électoral avec des indications nouvelles.

Vers une nouvelle perception politique ?

Les résultats de ces élections, avec ces éléments surprenants, indiqueraient aussi une nouvelle façon de voir la politique à Maurice, due essentiellement au rajeunissement de l’électorat. Les jeunes pourraient voir la politique davantage sous l’aune des enjeux réels, connaissant la globalisation et les nouveaux moyens de communications. Donc, ils s’éloigneraient d’une façon traditionnelle de faire de la politique au pays.

J’ai pu constater de visu que les pollutions visuelles du passé, banderoles sur les routes, affichages sauvages… ont considérablement diminué. Par contre j’ai eu des messages avec des vidéos des candidats sur Facebook, des sms circulaient (colportant les nouvelles rumeurs pour affaiblir l’adversaire, souvent à connotations sectaires et racistes, car cette fibre est encore très sensible à Maurice).

Dans l’ensemble, me semble-t-il, les mauriciens ont reconduit l’équipe de Navin Ramgoolam pour l’excellent travail que son gouvernement a accompli au niveau économique, dans le sillage de la crise financière. Un vote de confiance aussi pour sa capacité à rassembler les mauriciens autour de son programme gouvernemental.

J’ai pu assister ici, en dépit de quelques intimidations ou quelques actes isolés de violence, le plus grave étant l’agression de l’adjoint au maire de la ville de Curepipe, à une pratique du vote éprouvée. Le peuple mauricien a démontré une maturité tant dans son comportement devant la chose démocratique que dans ses choix, n’hésitant pas à panacher ses voix, afin que des prises de conscience soient effectuées dans les états-majors des partis politiques. Un calme impressionnant a régné, les débats à la télévision découlaient d’une pratique initiée dans les années 60, et le respect, au sein de la population fut palpable. Ce fait m’a fait toucher du doigt ce qu’une démocratie «de proximité», en raison de la petitesse de l’île, mais aussi par rapport aux attentes des électeurs.

Maurice, à n’en point douter, vient de donner, lors de ces élections, une grande preuve de sa culture démocratique au monde, de sa maturité politique, et les mauriciens et les mauriciennes peuvent légitimement s’en réjouir. 

Khal Torabully, île Maurice, 6 mai 2010