Depuis 1999, la République française a inscrit dans sa Constitution que "la loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives". Dix ans après la loi du 6 juin 2000 qui, s'appuyant sur ce principe devenu constitutionnel, fixait aux partis politiques l'obligation de parité des candidatures dans les scrutins de liste et imposait des sanctions financières à ceux qui s'y déroberaient aux élections législatives, qu'en est-il ? Le constat est simple : là où la loi impose la parité, l'objectif est atteint. Ou presque. Quand la contrainte n'est que partielle, les progrès sont lents. Quelques chiffres.
Au Parlement, tout d'abord. La proportion de candidatures féminines aux élections législatives était de 41,6 % en 2007 contre 23,2 % dix ans plus tôt. Toutefois, la proportion de femmes élues à l'Assemblée nationale n'atteint que 18,5% contre 12,1% un an plus tôt. Au niveau mondial, la France se place en 65e position en termes de présence des femmes dans la première chambre législative, au 19e rang des pays européens. Les grands partis préfèrent clairement s'acquitter d'une sanction financière que se soumettre à la parité des candidatures. Pis, les circonscriptions dites ingagnables sont prioritairement réservées aux femmes. Ainsi, pour ne pas respecter les dispositions légales en faveur de la parité aux législatives, l'UMP se prive chaque année de plus de 4 millions d'euros de financement.
Les disparités sont moins grandes au Sénat, qui combine un scrutin majoritaire pour les départements élisant jusqu'à trois sénateurs et un scrutin proportionnel à partir de quatre sénateurs. Du coup, la proportion de femmes au Palais du Luxembourg grimpe à 22,4 %. Là aussi, cependant, on note que la proportion de femmes élues sénatrices n'atteint pas 10 % dans les départements où s'applique le scrutin majoritaire alors qu'elle est de 27,5 % dans les départements où le scrutin a lieu à la proportionnelle.
Au niveau des collectivités territoriales, les différences sont tout aussi sensibles selon que le conseil est élu au scrutin majoritaire ou à la proportionnelle.
Dans les conseils municipaux, la présence des femmes est de 32,2 % dans les communes de moins de 3500 habitants et de plus de 48 % au-delà. Toutefois, 86 % des maires sont des hommes.
Dans les conseils généraux, élus au scrutin uninominal majoritaire, la proportion de femmes est d'à peine 12,3 % tandis que 95 % des départements sont présidés par des hommes.
Enfin, dans les conseils régionaux, où s'applique la proportionnelle, les femmes représentent 48 % des élus. Seuls deux conseils régionaux, toutefois, sont présidés par une femme.
DES PÉNALITÉS FINANCIÈRES DÉRISOIRES
Le projet de loi sur la réforme territoriale prévoit la création de conseillers territoriaux qui siégeront à la fois dans les conseils généraux et dans les conseils régionaux. Actuellement, les élus sont au nombre de 1880 dans les conseils régionaux et de 4037 dans les conseils généraux, soit un total de 5917, dont 1422 femmes (24 %). Selon le tableau des effectifs prévus par le gouvernement, 3471 conseillers territoriaux vont se substituer aux 3903 conseillers généraux et 1757 conseillers régionaux (soit un total de 5 640 élus) concernés par le champ de la réforme.
Après avoir dans un premier temps envisagé un scrutin mixte combinant 80 % d'élus au scrutin majoritaire et 20 % à la proportionnelle, le gouvernement a toutefois décidé d'imposer un mode de scrutin uninominal majoritaire pour l'ensemble des conseillers territoriaux. L'effet combiné de la réduction du nombre d'élus et de la généralisation du scrutin majoritaire va entraîner mécaniquement un recul de la parité dans les assemblées territoriales. Ce n'est pas la dérisoire sanction financière introduite in extremis dans le texte qui, à cet égard, risque d'exercer un effet dissuasif sur les partis.
Patrick Roger in LeMonde.fr