La pilule anti-obésité est-elle dangereuse ?

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Alli, l'ami des femmes ?

Distribuée depuis quelques mois, la pilule miracle qui fait maigrir fait aujourd'hui l'objet d'une enquête aux Etats-Unis. Les autorités américaines examinent en effet plusieurs rapports mettant en cause le médicament dans des cas de lésions de foie.

Ces rapports reçus entre 1999 et 2008 visent essentiellement le Xenical, la version sur ordonnance de la pilule Alli.

 Si certains patients ont subi de graves lésions, d'autres ont perdu leur foie. Mais, les autorités sanitaires n'établissent pour le moment aucune association définitive. Côté laboratoires Glaxo, distributeur de la pilule Alli en France, on assure qu'il n'y a " pas de preuve de dégâts provoqués par Alli au niveau du foie ". Le groupe se défend en insistant sur les problèmes de santé liés au foie rencontrés par les obèses.S.P

 

Alli : la pilule qui fait maigrir fait surtout aller aux toilettes 

Source : Rue89  La pilule Alli débarque cemercredi 6 mai en pharmacie. Nutritionnistes et associations de personnes ensurpoids s'étaient inquiétés de ses effets. Voici ce que nous écrivions le 19 février après l'annonce de son autorisation de mise sur le marché.


Un nouvel allié pour la minceur ? Débarquée aux Etats-Unis en juin 2007, la pilule était en rupture de stocks dès les premiers jours.

En France, les pharmaciens se frottent les mains. Alli a déjà généré 230 millions de dollars de chiffre d'affaires annuel pour GSK.

Alli vous propose un contrat simple et radical à la fois : si vous mangez trop gras, il vous fait éliminer à coups de fortes diarrhées. GSK vise 150 000 clients, essentiellement des clientes, pour la première année.

Attention aux pièges, nombreux, que vous tend Alli

Sur le marché très lucratif de la minceur, aucun médicament n'avait jusque là soigné l'obésité sans effet secondaire grave : les coupe-faim, qui agissent sur des neuromédiateurs, ne marchent pas, disent les médecins.

L'Acomplia, lancée par Sanofi-Aventis, a d'ailleurs été retiré du marché en octobre.

La chirurgie, notamment la pose d'un anneau gastrique pour diminuer le volume de l'estomac, est certes efficace mais lourde, contraignante et risquée.

Alli, qui consiste à s'infliger la punition de déféquer des graisses en cas d'excès, devrait donc faire un carton. Les forums féminins s'excitent déjà sur cette formule magique pour la ligne, vendue en contrebande sur Internet.

Mais attention aux pièges, nombreux, que vous tend Alli.

Punis-moi si je mange trop gras

Alli est réservé aux personnes en surpoids, c'est-à-dire dont l'indice de masse corporelle (IMC), que l'on calcule en divisant son poids par sa taille au carré, est supérieur à 25 (le chiffre est de 30 pour les obèses). Ce qui revient à peser environ 75 kilos pour 1,60 m, et concernait 29,2% de la population française en 2006 selon l'étude ObEpi

 

La voie explorée par Alli est la suivante : pour se débarrasser des graisses, le plus simple, c'est de ne pas les métaboliser. Concrètement, c'est un « inhibiteur de lipase », qui limite l'action de l'enzyme chargée de « casser » les lipides ingérées en petites briques facilement assimilables par l'organisme.

 

Il utilise l'orlistat, la molécule employée dans le Xenical, un médicament des laboratoires Roche à qui GSK l'a rachetée. Elle est demi-dosée (60 mg au lieu de 120) mais promet 80% de l'efficacité du Xenical.

Quand on ingère Alli, on est contraint d'être soit très discipliné (fini les craquages alimentaires), soit très disponible.

Comprendre : jamais loin des toilettes, car manger des graisses malgré les préconisations entraîne des désagréments peu ragoûtants, façon « gastro » (flatulences grasses, voire diarrhées incontrôlables).

Alli est donc surtout une façon d'externaliser sa volonté de régime : « Oblige-moi à manger sainement. Et punis-moi si je le fais pas ». Fais-moi mal, Alli, Alli, Alli…

Un régime imposé

Alli promet de vous faire perdre un kilo de plus pour deux de perdus par le régime qu'il impose. Car, comme l'explique Martine Frey, directrice médicale chez GSK, c'est une « récompense » qui accompagne un régime :

 

« Si l'on ne fait pas le régime qui va avec, on n'a que les inconvénients [la diarrhée, ndlr], mais on ne perd pas de poids. C'est un encouragement à avoir une alimentation saine et vertueuse : si on mange trop de gras, il tire le signal d'alarme. Alli permet de prendre conscience de ce qu'il faut faire.

Maigrir, ça passe par une alimentation saine et équilibrée, et une augmentation de l'activité physique. Ce n'est pas une pilule magique qui vous fait perdre trois kilos en trois jours, c'est une démarche sur le long terme, qui n'est pas efficace si on suit pas le régime. »

Autre inconvénient, Alli provoque des carences en vitamines. D'ailleurs, le site américain d'Alli incite les candidats au régime à prendre un complément multivitaminé pour rétablir l'équilibre.

Les pharmaciens au poste de contrôle

 

Problème, en vente libre derrière le comptoir du pharmacien, il risque d'être largement détourné. Le rôle de conseil du pharmacien est largement mis en valeur par GSK, qui sortira un livret d'accompagnement à la prise du produit et formera les professionnels.

Mais rien ne garantit que les commerçants vérifieront que le client est bien en surpoids.

En vente à deux euros par jour environ (le prix sera fixé librement par les pharmaciens), pour un traitement de trois mois, il sera abordable, et donc tentant, y compris pour les midinettes qui se trouvent trop rondes à l'approche de l'été.

 

Pourquoi s'infliger de tels désagréments, alors que suivre simplement le régime indiqué suffit à faire fondre les deux tiers du poids perdus avec une cure d'Alli ? Si, comme promis, le traitement permet de perdre 5 à 10% de sa masse corporelle, ce n'est pas non plus un régime miracle.

La principale vertu d'Alli est donc de vous apprendre à repérer les « graisses cachées », celles qui sont incorporées dans les aliments, comme la graisse d'un steak, par exemple. Comme si on pouvait manger gras sans s'en rendre compte, et qu'il fallait aller aux toilettes pour vraiment le réaliser !

Si la sanction des toilettes s'éloigne, les mauvaises habitudes peuvent revenir

 

Jean-Philippe Zermati, nutritionniste comportementaliste président du Gros (Groupe de réflexion sur l'obésité et le surpoids), craint qu'Alli « stigmatise une catégorie d'aliments » alors que maigrir, c'est avoir « une approche globale », qui n'inclut ni ne bannit aucun type d'aliment.

 

Dès que la sanction des toilettes s'éloigne (parce que la cure s'arrête ou qu'on la stoppe, incapable de tenir), le risque est qu'on se remette à manger n'importe quoi, et en grandes quantités, histoire de compenser la frustration. Pas vraiment la meilleure façon de sortir de la spirale.

La président de l'association de personnes de forte corpulence Allegro Fortissimo, Viviane Gacquière, a d'ailleurs écrit à la ministre de la Santé pour lui demander carrément d'interdire Alli :

 

« L'autorisation de ce médicament en vente libre (représente) un réel danger touchant aux mesures “sauvages” utilisées par un grand nombre de personnes pour maigrir même quand leur surpoids n'est pas pathologique, un mirage pour les personnes en obésité et des conséquences non négligeables sur la santé des patients consommateurs de cette spécialité. »