Louis LAOUCHEZ, plasticien martiniquais, appelle à voter pour l'Art. 74

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L’évolution institutionnelle de la Martinique intéresse-t-elle les artistes martiniquais ?
 
Appel aux artistes lancé par le plasticien Louis Laouchez lors du meeting de Saint-Joseph, le vendredi 20 novembre dernier. 


Le créateur que je suis, le plasticien s’étonne du silence, de la passivité de certains Martiniquais et plus particulièrement des artistes qui sont sensés être témoins de leur temps voire des précurseurs. Je fais allusion à des plasticiens qui appartiennent à un réseau dont la tête pensante est complètement déconnectée des réalités culturelles martiniquaises.

Dèslors, les concernés s’autocensurent, les dénonciations ne sont pas permisessinon pas de privilèges ni d’expositions à l’extérieur de la Martinique.

Jeconçois mal que nous artistes martiniquais ne prenions pas notre part à ce débatinstitutionnel quels que soient les avantages dont nous bénéficions car nousavons peur que l’on sache de quel bord nous sommes. Nous n’avons pas le droitde nous taire. Englués dans nos habitudes, instruits de notre servitude, campéssur nos acquis illusoires, nous faisons fi de notre passé en fermant les yeuxsur notre devenir et celui de nos enfants. Quel héritage ! Avons-nous le droitde renier les luttes de nos aînés, leur exemple ?

Lesmots dignité et fierté sont-ils vains dans nos esprits ?

Etpourtant certains au plus haut niveau de l’Etat pensent qu’une évolutionstatutaire peut nous donner la possibilité de nous rattraper, de dire neserait-ce qu’un “oui” mais…, un “non”…mais… ou encore un non ferme ou un ouiferme…., c’est ça le sens de l’article 74 proposé par la Constitution française.

Desfemmes et des hommes d’ici, malades d’ambition, aveuglés par leurs petitspouvoirs osent penser que nous devons encore nous coucher et tendre la main.Ceux dont certains se réclament à cor et à cri n’ont-ils pas dénoncé depuislongtemps le génocide par substitution.? Nos terres petit à petit changent demain, nos emplois aussi. Quant à notre manger, notre boire, notre comportement,nos pensées, ils sont calqués sur ceux qui viennent de l’extérieur et fontlentement de nous des minoritaires dans notre pays.

Attendre! Attendre quoi ? Depuis 1946? Les ambitieux, les malades du pouvoir, les élusdu peuple qui n’ont pas grand-chose à leur actif estiment que le peuple n’estpas mûr, n’est pas prêt, qu’il est ignorant sauf quand il s’agit de les mettreen place satisfaisant ainsi leurs ambitions nocives.

Jeconstate que ceux des élus qui militent pour le 74 ont justement œuvré depuisleur arrivée aux responsabilités pour la conquête de notre dignité, de notreresponsabilité, pour la fierté de l’homme martiniquais debout… et parfois au périlde leur vie quand leurs adversaires, face à eux utilisaient des nervis, desmatraques voire des pistolets.

Quepeut-on reprocher à un Claude Lise, à un Alfred Marie-Jeanne et aux signatairesde ce collectif si ce n’est d’être des hommes dignes et intègres, à l’écoute deleurs électeurs ?

J’apprécieleur dévouement, le sens qu’ils ont de la responsabilité et de la dignité de lapersonne humaine.

Beaucoupparlent de l’article 73, l’article de l’immobilisme, de la facilité, l’articlede la négation de l’évolution, sans jamais se forger leur propre opinion, sansentendre les partisans du 74 qui répondent à toutes leurs questions posées en démontantles arguments fallacieux des malhonnêtes qui pensent que nous ne sommes pas prêtspour une évolution statutaire parce que nous sommes tous des crétins. Des crétinsqui ont donné à la France d’excellents professeurs dans toutes les disciplines,d’honorables agrégés et docteurs, des préfets, des hauts fonctionnaires et j’enpasse. Alors, ceux-là ne sont pas capables de trouver les meilleures voies pournotre évolution? Est-ce que ce sont les petites prétentieuses et prétentieux néshier,

lesmalhonnêtes tirant avantages de la cour à laquelle ils appartiennent qui vontnous donner une feuille de route à la hauteur de nos aspirations, à la hauteurdes problèmes posés par notre situation politique, sociale et culturelle ?

Ehbien, moi, artiste créateur, témoin de mon temps, j’ai le devoir de dénoncer lesilence coupable de ceux-là qui nombreux se disent être des hommes de gauche.

Etmoi, je ne veux pas être de ce camp-là car mes enfants me demanderont descomptes. Ils savent, et les vôtres aussi, que nous sommes aux premières loges d’unesituation catastrophique à tous les égards. Ils nous regardent, nous observent,ils nous jugent et plus que toute autre sentence, leur jugement sera on ne peutplus douloureux.

Aquel idéal, à quelle fierté, nous accrochons-nous ? Avons-nous définitivementchoisi le plat de lentilles pour assouvir des aspirations indignes et coupables?

Je m’adresseà vous artistes de toutes disciplines, à vous dont la liberté est permise, àvous qui devez dire le vrai et restituer le beau dans la splendeur. Car lebeau, dois-je vous le rappeler, est aussi celui de la grandeur, celui du don desoi, celui de servir son pays et de s’élever au rang des censeurs, celui de serelever, de se mettre debout en criant haut et fort : la Martinique est à nouset sera belle et bien viable que si tous ensemble nous le voulons, que si tousensemble nous guérissons de nos ambitions personnelles pour construire, pour bâtiret chanter tous réunis l’avènement d’une Martinique juste et plus éclairée pourle bien de tous.

Amisplasticiens, aidons nos élus qui ont œuvré pour notre bien, pour la culture dece pays à polir la pierre brute pour que demain notre édifice participe à l’universel,pour que dès maintenant, en nous appuyant sur nos réalités martiniquaises, nouspuissions échanger d’égal à égal.

Dois-jevous dire que sans cela nous serons des receveurs mais jamais des échangeurs ettoujours nous resterons des singeurs et des mineurs ?

Amisartistes, je l’ai déjà dit, un peuple n’est pas un peuple, une nation n’est pasune nation, une région n’est pas une région s’il n’a pas de culture.

De grâce,éloignons-nous de ceux qui œuvrent à la déculturation de notre pays car on nepeut laisser se battre nos élus qui prônent la responsabilité spécifique denotre région et de l’autre côté aider à notre acculturation.

Ceuxqui parmi nous enseignent les arts plastiques dans nos collèges, lycées etcentres de beaux-arts ont à cet égard une grande responsabilité. Qu’ils seremettent en question. Et pour atteindre pleinement cet objectif, seule l’évolutionstatutaire nous aidera.

Pournotre dignité, pour notre fierté, pour la conservation de notre identitéoriginelle, bref, pour rester debout, votons sans réserve pour l’article 74 etdisons-le autour de nous.

Jecondamne le silence de ceux qui se prétendent créateurs en suivant les autreset en caricaturant les expressions picturales de pays lointains.

Cefaisant, ils ne se rendent pas compte qu’ils participent au broyage de notrepays par ceux qui seront toujours plus forts parce que plus grands, plusnantis.

LouisLaouchez