"Mes chers compatriotes,
Permettez-moi tout d’abord d’avoir une pensée pour ceux qui nous ont quittés au cours de l’année 2010, souvent dans des conditions tragiques, emportés par la violence aveugle ou les accidents de la route, qui sont les véritables fléaux de notre société.
Permettez-moi aussi d’exprimer une pensée pour celles et ceux qui, dans notre pays, vivent dans la souffrance, la pauvreté et souvent l’exclusion. Ce sont nos sœurs, nos frères, nos amis, nos voisins immédiats.
Il est important de ne jamais oublier qu’en Martinique, près de 80.000 personnes vivent en dessous du seuil de pauvreté. Que le taux de chômage de 21 à 23%, demeure inacceptable. Que trois jeunes actifs sur cinq se trouvent dans un désoeuvrement tragique. Que de nombreuses personnes âgées connaissent l’isolement, la précarité, et une dépendance qui parfois porte atteinte à leur dignité.
Ce sont des urgences qui devront occuper l’essentiel de nos préoccupations et de nos politiques publiques.
Pourtant, cela ne doit pas nous isoler du monde, et nous amener au repli sur nous-mêmes. Nous ne pouvons rester indifférents au drame haïtien. Nous ne pouvons nous détourner du sort des otages dans le monde, et surtout réduire notre vigilance en ce qui concerne notre compatriote Thierry Dol, et son retour exigé parmi nous. De même, nous devons garder à l’esprit ces hommes, ces femmes, ces enfants qui, aux quatre coins de la planète, sont plongés dans des guerres absurdes, et qui connaissent jour après jour, l’humiliation, les sévices, les violences meurtrières. Tous ceux et celles à qui l’on refuse le simple droit d’exister. Ceux qui dans le monde, meurent chaque jour parce qu’ils n’ont rien à manger ou à boire. Ceux qui, à l’orée de ce 21ème siècle, subissent encore toutes les formes du viol et de la barbarie. Cela nous concerne car toute atteinte à une personne, menace directement toute l’espèce humaine.
Même si nous affichons un niveau d’équipement et de consommation parfois supérieur à ceux de nos frères de la Caraïbe, notre économie et notre société sont encore incapables de répondre à deux difficultés majeures : le chômage structurel, et un taux d’importations trop élevé, en confrontation directe avec toute tentative de production locale. Ces handicaps laissent des milliers de personnes sur le bord de la route. Notre responsabilité est de tout faire, dans une solidarité constructive, dans un progrès partagé, dans une démocratie rénovée, pour réussir les fondations d’une Martinique plus saine !
Pour atteindre cet objectif, il nous faudra être courageux, déterminés, imaginatifs. Il nous faudra surtout refuser toutes les formes d’immobilisme et de renoncement. Je profite donc de cette occasion, pour vous exhorter à un effort collectif sans précédent, afin que cette année 2011 soit celle d’une redynamisation !
Les difficultés n’affaiblissent que ceux qui n’ont pas confiance en eux-mêmes. Notre Histoire est le témoin de ces moments où le peuple martiniquais, en son entier, a su se mobiliser, et « saisir…. la déveine au collet ». Il nous faut croire en notre créativité. Il nous faut ouvrir de nouveaux horizons en matière de stimulations économiques, culturelles et sociales. Il nous faut nous inscrire dans des projets d’innovation et d’avenir en ce qui concerne l’énergie, l’agriculture, la pêche, le transport, le tourisme… Il faut que notre patrimoine historique, naturel, culturel, soit au cœur de notre visibilité mondiale, de nos dynamiques d’épanouissement et de recherches. Du grand Nord au Sud le plus extrême, de Fort de France jusqu’à la pointe de la Caravelle, il nous faudra trouver les voies d’une plus grande fluidité et du meilleur des équilibres possibles !
C’est d’une nouvelle culture du développement dont je veux parler. Une culture innovante, solidaire, progressiste. Une culture conforme aux mutations du monde, mais fondée sur notre identité, nos patrimoines et notre histoire. Une culture d’imagination mais aussi et surtout de responsabilité dans une République capable de garantir à la fois l’égalité des droits et l’expression des différences !
Aucune solution ne saurait venir de l’extérieur ! Aucune espérance ne saurait se décréter ! La pauvreté et la misère ne sont pas des fatalités, mais le symptôme d’un manque de volonté. Aucun progrès ne sera possible si l’injustice devient une chose acceptable et si l’exclusion s’inscrit dans la banalité ! Il nous est possible de forcer le destin si chacun s’implique, se mobilise, et si l’effort individuel soutient un effort collectif !
Je voudrais conclure en m’adressant à la jeunesse Votre situation n’a jamais été aussi difficile. Aucune perspective ne se dessine pour la plupart d’entre vous et les dérives de toutes natures s’intensifient pour votre génération. Certes, nous avons le devoir de créer le cadre indispensable à l’épanouissement de tous. Mais la réussite d’une telle politique dépend aussi de vous ; de la détermination que vous mettrez, à l’école, au travail, dans la famille, dans le respect des valeurs essentielles, pour saisir chaque opportunité que la vie offrira. C’est ainsi, avec courage, persévérance et grande résolution, que vous profiterez de tout ce qui vous sera accessible, sur votre terre et dans le monde. Votre génération fournit de très mauvais exemples, mais elle présente aussi des réussites admirables, de l’excellence et de grandes ambitions. Il suffit de vous rencontrer pour savoir que tout n’est pas perdu, et qu’il faut simplement offrir de l’oxygène à ces lumières que vous portez et qui ne demandent qu’à éclairer un avenir prospère ! Nos plans de relance, nos programmes de développement, nos réformes, Notre plan ambition-jeunes Répondent à cette haute exigence. Ils sont pour vous. Ils sont à vous. Nourrissez-les de vos idées, de vos audaces, de votre investissement !
Mes chers compatriotes, notre bataille s’effectue contre toutes les formes d’obscurantisme, de déviance et d’exclusion. Pas seulement à l’échelle de notre pays, mais à celle de la Caraïbe et du monde. C’est au cœur de ce combat très large que se détermineront les voies et les moyens d’une Martinique nouvelle !
Il y a près de 400.000 martiniquais qui vivent en Martinique. Et quelques 300.000 qui se trouvent dans le monde et notamment dans l’hexagone ! Nous sommes donc au bas mot 700.000 !
Quel vent contraire pourrait s’opposer à la volonté de 700.000 personnes ? Renverser les impossibles ne dépend que de nous !
J’ai toute confiance en vous, et pleine confiance en notre Martinique.
Très bonne année 2011 à toutes, et à tous ! "
28 décembre 2010
Serge LETCHIMY