MARTINIQUE : SARKO ET LE PERE DE LA NATION SONT-ILS BONS ZIGUES ?

« N’EST-CE PAS, SERGE ? » :

QUAND SARKO TUTOIE LE PERE DE LA NATION…

vendredi 14 janvier 2011 par la rédaction de Montray Kreyol

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La Martinique est vraiment un pays où l’on hallucine tous les jours depuis que le parti du balisier a pris les rênes du Conseil régional. Un jour on nous promet 5.000 emplois à l’aide d’un plan de relance qui, plus souvent que rarement, ne fait que reprendre des projets déjà entamés ou, en tout cas, préparés pendant l’ancienne mandature ; un autre jour, on nous exhibe fièrement une commission chargée de demander à l’UNESCO de classer la montagne Pelée en site remarquable de l’humanité alors que Marie-Jeanne avait déjà lancé cette idée dans un discours prononcé il y a plus d’un an à l’Assemblée nationale ; un autre jour encore, on nous sollicite pour devenir des « bâtisseurs de paradis » alors que ces messieurs-dames n’ont jamais ouvert la bouche sur 30 ans d’empoisonnement au chlordécone et qu’ils ont même, en 2007, créé à la hâte une association de revendeuses, « Machann Foyal », qui s’est mise à dénoncer comme des fossoyeurs du peuple ceux qui…dénonçait le chlordécone. Sans compter que ça bétonne sec dans les communes PPM, surtout aux Trois-Ilets, la région située entre l’Anse Mitan et l’Anse à l’Ane étant livrée à une spéculation immobilière effrénée qui en fait disparaître les mornes boisés les uns après les autres, comme si le but était de construire un paradis de béton. 

Bref…

Le summum de l’hallucinant a été atteint pendant de la récente visite de Sarko. Lors de la conférence consacrée au tourisme et au développement économique à l’hôtel Bâteliere, chacun a pu voir et entendre à la télé le président de la 5è puissance économique mondiale carrément tutoyer par deux fois notre vénéré Père de la Nation !!! Citons-le :

- « N’est-ce pas, Serge ? »

- « Tu me fais confiance alors ? »

Le « N’est-ce pas, Serge ? » était une réponse mi-figue-pomme mi-raisin-bord-de-mer au Père de la Nation qui venait de proposer un projet de contrat Etat-Région sur 6, voire 10 ans. Le « Tu me fais confiance alors ? » avait trait à la question de l’évolution institutionnelle de la Martinique

Jamais pareille chose ne se serait produite face à des élus de l’Hexagone où le « vous » est de rigueur, même entre bons amis dès l’instant où il s’agit d’une réunion officielle et surtout télévisée. Comment donc comprendre ce « tu » pour le moins stupéfiant ? Au lieu que certaines sommités de la linguistique perdent leur temps à en écrire des tonnes sur la diglossie, l’écolinguistique et bla-bla-bla, voici un sujet qui aurait dû exciter leur savantise en matière d’analyse des pratiques langagières ! A notre modeste niveau, nous nous sommes permis de faire trois hypothèses :

1°. Sarko s’est cru revenu au bon vieux temps des colonies quand le Maître tutoyait le colonisé lequel lui donnait du « oui, missié » ou du « d’accord, Bwana ». Hypothèse à bien regarder fort peu probable car après le calamiteux discours de Dakar au cours duquel le locataire de l’Elysée nous avait appris « que l’Afrique n’est pas encore entrée de l’histoire », on sait que ses conseillers se sont employés à rectifier le tir. Certes maladroitement, mais chat échaudé craignant l’eau « frette », il n’est pas imaginable que Sarko ait pu récidiver en tutoyant notre vénéré Père de la Nation. Exit donc cette hypothèse…

2°. Sarko est réputé pour avoir un maniement hasardeux de la syntaxe du français et s’est déjà fait épingler à moult reprises par la presse hexagonale, y compris parfois de Droite. Réputé aussi pour user d’un niveau de langue trivial, frisant l’argot en certaines circonstances. Chacun se souvient de son fameux « Casse-toi, pauv’ con ! ». Dans ce cas, il n’y aurait aucune atteinte à la dignité de notre vénéré Père de la Nation. Notre honneur serait sauf. Sarko a l’habitude de s’exprimer comme ça, y compris face à des Gaulois, c’est tout. Donc pas de quoi en prendre la mouche !

3°. Sarko et notre Père de la Nation sont de bons « zigues ». D’excellents amis, quoi ! Des gens qui ont l’habitude de se rencontrer, de discuter, par l’entremise de personnalités biancarellesques sans doute, et forcément donc de se tutoyer. « La langue de Sarko s’est donc échappée » lorsqu’en pleine réunion publique et télévisée, il a demandé au Père de la nation s’il lui faisait confiance. Comme la deuxième hypothèse, celle-ci n’est ni improbable ni absurde. Elle est même à considérer avec grand soin.

A moins qu’il existe une quatrième hypothèse, mais nous ne voyons pas laquelle, force est de reconnaître que ce tutoiement n’est pas du tout anecdotique et pose la question de la crédibilité de nos élus face à un président charmeur et grand maître de la communication médiatique. Car si la deuxième hypothèse est la bonne, notre Père de la Nation aurait dû réagir sur-le-champ et rappeler le président de la 5è puissance économique mondiale au respect des règles les plus élémentaires de la politesse. Ne dit-on pas que « la politesse est française » ? En tutoyant notre vénéré Père de la Nation et en l’appelant par son prénom, Sarko nous a, en effet, tutoyé nous aussi, « le peuple martiniquais » et là, Ti Sonson « pa pwan’y ». Il ne l’a pas du tout avalé !

- « Sarko konpwann nou sé timanmay-li ! » (Sarko nous prend pour ses enfants ou quoi ?) s’est-il indigné dans son bar préféré des Terres-Sainvilles, entre deux coups de tafia.

Par contre, si c’est la troisième hypothèse qui est la bonne, alors là c’est trente-douze mille fois plus grave, mesdames et messieurs de la compagnie. Trente-douze mille quarante fois plus grave ! Chacun se souvient que le Nègre Fondamental avait refusé de rencontrer Sarko avant de céder, il est vrai, à de pressantes sollicitations, mais à cette occasion, il en avait profité pour faire la leçon à un président médusé et qui est resté bec coué. Bravo, Mémée ! « Je suis un Nègre et je vous emmerde ! ». Ca, c’est avoir des « graines » ! En tout cas, jamais le Nègre Fondamental ne se serait laissé tutoyer de la sorte, lui l’éminent écrivain, surtout par quelqu’un comme Sarko qui considère que lire « La Princesse de Clèves » est une perte de temps.

Grave aussi parce qu’on se souvient que le scribe semi-officiel du Père de la Nation s’était fendu d’un grand article dans la presse hexagonale, au moment où la visite de Sarko à Césaire était annoncée, article dans lequel il pourfendait le président français et dont le titre, ô combien explicite, était « De loin ». Ce qui pourrait se traduire en créole par « Pa rété la, misié-a ! » ou encore « Nou pa bizwen wè’w isiya ! ». Or, aujourd’hui, voici Sarko « De près » ! Voici Sarko dans nos murs et se permettant même de tutoyer le Père de la Nation et pourtant son scribe se tait !!! Sa bouche est cousue raide-et-dur. Comprenne qui pourra…

On n’a entendu, non plus, aucune réaction de la part des conseillers régionaux bouledogues du PPM chargés de vociférer chaque fois qu’un élu de l’opposition prend la parole. Apparemment, il est plus courageux de vitupérer contre les Békés, « les Blancs » et les « Z’Oreilles » sur les plateaux-télé que de tacler Sarko pendant qu’il est présent sur le sol martiniquais (pour Le Pen, c’est plus facile, il ne dispose pas d’une armée de « manblos » pour le protéger comme Sarko).

En tout cas, à défaut de développer la Martinique au moins le PPM nous donne-t-il matière à nous gondoler. Merci, chers (es) amis (es) pour ces moments de franche rigolade qui nous permettent de supporter un quotidien grisâtre et un devenir encore plus glauque !

Dieu reconnaîtra les siens !...

SOURCE : Montray Kreyol