La.Martinique a enregistré une forte hausse des prix des carburants à la pompe le 1er janvier 2017 qui a donné lieu à un amalgame honteux et malhonnête de la part de l’opposition EPNM et de certains médias. On a pu entendre, par exemple, sur RCI le mardi 3 janvier 2016 au matin le Secrétaire général du néo-PPM affirmer mensongèrement que la CTM avait augmenté le prix du gazole de 19 centimes d’euro par litre.
Il faut redire que ces augmentations résultent de la conjonction fortuite de deux facteurs. D’une part la répercussion de la forte poussée des cours du pétrole brut suite aux décisions de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP). Et d’autre part des décisions prises par la Collectivité Territoriale de Martinique en plénière du 24 novembre 2016 de relever les taxes sur les carburants pour faire face pour le budget 2017 à la situation financière catastrophique laissée par la gestion EPNM et à la baisse drastique et continue de dotations de l’Etat.
Une situation financière catastrophique de la CTM
En effet, la CTM a hérité de déficits divers : plus de 87 millions d’euros sur les comptes administratifs 2015 ; 13 millions d’euros pour l’Afpa ; 1,8 million d’euros pour la SEM Energie ; etc. Elle supporte une montagne d’engagements de la gestion précédente (4,4 milliards d’euros au bas mot) ainsi qu’une dette globale en 2016, y compris les emprunts garantis du TCSP, de 677,3 millions d’euros entrainant un remboursement annuel de 58,6 millions d’euros avant réaménagement. Quoiqu’en disent certains cercles mal intentionnés en Haut lieu.
Dans le même temps la contribution de l’Etat (dotation globale de fonctionnement notamment) a baissé de 26,2 millions d’euros depuis 2014 dont près de 10 millions en moins pour 2017 et cela en application du « pacte de responsabilité » du gouvernement Hollande/Valls voté au Parlement par les élus du néo-PPM et de EPNM.
En outre, le manque à gagner de la part de l’Etat à la charge de la CTM pour les allocations aux personnes âgées (APA) et atteintes de handicap (PCH/ACTP) sera de 57,68 millions d’euros en 2017 sur un budget de soutien aux personnes âgées et handicapées de 83,64 millions d’euros que la CTM devra financer.
Nous pourrions allonger la liste aisément.
Pour faire face aux obligations de la CTM et participer à l’effort de relance de l’activité en 2017 il a fallu relever une part de la fiscalité dépendant de ses décisions (taxes sur les carburants par exemple) et recourir à l’emprunt (100 millions d’euros).
Rappelons quelques données.
En Guadeloupe, le prix à la pompe est identique pour le gazole (1,19 €/l) et inférieur d’un centime sur le Super sans plomb (1,38 €/l). La hausse est également de 2,05 € pour le gaz. En Guyane, le Super SP est à 1,54 €/l et le gazole à 1,34 €/l.
En France également, les prix suivent la même tendance en décembre dernier. Le prix moyen constaté en décembre est de 1,36 €/l pour le Super sans plomb (soit – 3 cts qu’en Martinique) contre 1,32 €/l en novembre et de 1,19 €/l pour le gazole routier (prix identique qu’en Martinique) contre 1,15 €/l en novembre.
Il faut donc relativiser l’effort demandé.
Une hausse spectaculaire des cours internationaux du pétrole brut
Il faut rappeler que le code de l'énergie ( articles R 671-1 à R 671-13 et R 221-1 à R 221-30) prévoit que les prix des produits pétroliers et du gaz sont révisés dans les DOM antillo-guyanais chaque mois en fonction de l’évolution des cours et de la parité monétaire euro/dollar constatées lors du mois précédent, ainsi que des quantités de produits achetés et vendus par la SARA, enregistrées dans ses comptes.
Selon la Préfecture de Martinique, après la baisse de 5 cts pour le sans plomb et de 3 cts pour le gazole au 1er décembre 2016, il a fallu constater courant décembre 2016 un fort rebond des cotations, à savoir :
Un accord historique de l’OPEP le 30 novembre 2016
Il faut prendre en considération que les 14 membres de l’Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole (OPEP) ont conclu mercredi 30 novembre à Vienne le premier accord de réduction de la production depuis 2008 pour faire remonter les cours du pétrole brut descendu au plus bas ces dernières années en raison de la surproduction pétrolière et de la baisse de croissance économique dans le monde. Les prix sont tombés de 114 dollars le baril en juin 2014 à 32,6 dollars en décembre 2015. Des pays comme le Vénézuela, l’Algérie, le Nigéria, etc, pour lesquels le pétrole est une ressource essentielle étaient économiquement étranglés. Ce compromis qui aura nécessité des mois de pourparlers et au final un effort particulier de l'Arabie saoudite ainsi que des concessions à l'Iran pour tenter de faire remonter les cours. En particulier il a fallu que l’Arabie Saoudite, plus gros producteur de l’OPEP, voit son budget gravement en déficit (98 milliards de dollars en 2015) ; un déficit aggravé par sa sale guerre au Yémen, pour qu’elle accepte de diminuer sa production pouvant faire remonter les cours pétroliers. La Russie, qui ne fait pas partie du cartel et est en récession sévère, participe elle aussi à la réduction de l'offre excédentaire mondiale. Du jamais vu depuis 15 ans. L'effet sur le prix du baril a été spectaculaire et le jour même, le Brent s'échangeait à 50,23 dollars, en hausse de 8,30%, tandis que le brut léger américain (West Texas Intermediate, WTI) s'adjugeait 9% à 49,28 dollars. La hausse a continué en décembre.
En outre, la demande des produits est supérieure aux prévisions dans l’OCDE (pays les plus riches du monde) pour cette période.
Cette forte hausse des cours des matières premières, en application de la réglementation des prix des produits pétroliers dans les DOM, a conduit en Martinique et- en Guadeloupe à une revalorisation par les Préfectures de 9 centimes du prix à la pompe du super sans plomb et du gazole. Voilà la vérité occultée par l’opposition EPNM.
Taxes sur les carburants : Sans changement depuis 18 ans
Le reste de la majoration, à savoir + 2 cts pour le Super sans plomb et + 10 cts pour le gazole, provient de l’augmentation de la fiscalité locale votée par l’Assemblée de Martinique le 24 novembre 2016, c’est-à- dire avant l’accord de l’OPEP.
Ces taxes sur les carburants sont quasiment les seules sur lesquelles la CTM a le pouvoir d’agir légalement (dans des limites contraintes) dans le cadre de l’article 73 de la constitution. Or elles étaient en Martinique à un niveau beaucoup plus faible que dans les autres collectivités d’outre-mer et en France. Elles n’avaient pas changé depuis 1998, soit depuis 18 ans, alors que le niveau général des prix a augmenté entre temps officiellement de 30 %.
Qu’on en juge.
S’agissant des carburants il faut savoir que :
Montant de la TSC en €/Hectolitre(ou cts/l)
Produit/Territoire |
Guadeloupe |
Martinique |
Plafond autorisé par la loi |
Ecart Guadeloupe/ Martinique |
Super SP |
49,937 €/hl |
47,613 €/hl |
67,39 €/hl |
+ 2,324 €/hl |
Gazole |
28,090 €/hl |
22,120 €/hl |
49,81 €/hl |
+5,87 €/hl |
Le relèvement des taxes est un peu plus fort sur le gazole que sur le super carburant sans plomb tout simplement parce qu’elles étaient plus en retard par rapport à la France, à la Guadeloupe et aux autres DOM. De plus, il faut tenir compte du caractère polluant du gazole et cesser d’encourager économiquement sa consommation comme c’était le cas avec une différence de taxes de moins 22 centimes d’euro par litre par rapport au Super SP.
Une affectation transparente du produit supplémentaire des taxes
Il faut souligner encore que ces augmentations de taxes ont été délibérées publiquement par les élus martiniquais le 24 novembre 2016.
Selon les estimations de la CTM, le produit de la partie de ces augmentations qui vient des taxes va permettre d’injecter plus de 13,7 millions d’euros pour l’activité et l’emploi dans l’entretien des routes par la CTM et les communes et le financement du transport par les communautés de communes (Cacem, Espace Sud et Cap Nord). L’octroi de mer supplémentaire permettra, par exemple, aux communes de faire face à leur quote-part du SDIS. La répartition de ces sommes est réalisée selon des critères objectifs définis par la loi et le règlement (population, nombre de kms de routes, etc).
Les professionnels qui bénéficient de la détaxation (marins-pêcheurs, etc) et du remboursement de taxes (taxis, etc) du fait de la nature de leur activité ne subiront pas ces augmentations.
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VENTILATION DU PRODUIT DES TAXES |
Observations |
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Taxes |
CTM |
Communes et Communautés communes |
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Octroi de mer |
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4 905 244,00 € |
Dont près d’1 million d’euros pour FDF |
Octroi de mer régional |
1 424 878,40 € |
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Pour les investissements de la CTM |
TSC(FIRT) |
5 870 174,10 € |
1 467 543,53 € |
Alimente le fonds routier et des transports (FIRT) |
Total |
7 295 052,50 € |
6 372 787,53 € |
13 667 840,01 € |
En conclusion, il est profondément malhonnête d’avoir laissé des finances dans un état de délabrement avancé et d’un même balan d’inciter les citoyens à refuser des mesures de redressement indispensables pour contribuer à amorcer la relance de l’activité et de l’emploi et assumer la solidarité à l’égard des compatriotes les plus défavorisés. En politique il y a une limite morale à la démagogie. La CTM fait appel à l’esprit de responsabilité des Martiniquaises et des Martiniquais pour affronter l’avenir et aller de l’avant.
Michel Branchi
Président de la Commission de Finances de la CTM