NOUVELLE CALEDONIE : SARKOZY CONFRONTE A LA QUESTION DU DOUBLE DRAPEAU

drapeau.kanak.bbr2.jpgLes drapeaux tricolore et kanak sur les édifices publics.

 
Les bannières tricolore et kanak sont hissées ensemble sur les établissements publics de Nouvelle-Calédonie depuis l'année dernière. Un sujet polémique que Nicolas Sarkozy n'a pas pu éviter lors de sa visite sur l'archipel

 

Arrivé ce vendredi matin à Nouméa, pour son premier déplacement en Nouvelle-Calédonie depuis son élection, Nicolas Sarkozy débarque dans un climat politique plutôt apaisé. Les évènements de la petite île de Maré, qui avaient causé quatre morts et une trentaine de blessés début août pour des raisons principalement locales (prix du billet de la compagnie aérienne, conflits coutumiers…), ne se sont finalement pas propagés à l’ensemble de la Nouvelle-Calédonie. Les tensions et les inégalités sociales restent pourtant très vives.

Depuis un an, et la visite de François Fillon, la vie politique locale, dont la question indépendantiste a longtemps été la seule grande ligne de fracture, est en train de se recomposer – lentement – après avoir été secouée par un séisme du double drapeau. Désormais sont hissées sur les établissements publics de Nouvelle-Calédonie les bannières tricolore et kanak.

Pourtant, ce matin sur la grande place Bir Hakeim, où Sarkozy prononce un hommage aux volontaires du bataillon du Pacifique, flotte une quinzaine de drapeaux. Mais tous sont tricolores. Dans le maigre public venu assister au discours présidentiel, même chose. Que du bleu-blanc-rouge. Cette mère de famille, de culture kanak mais contre l’indépendance, raconte: «les gendarmes ont interdit l’accès à tous ceux qui portaient le drapeau du Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS)». Elle est venue en famille. Son fils agite deux petits drapeaux tricolores, sa fille, qui vient d’intégrer la Marine nationale défile sous le nez du Président. Mais, elle, elle ne comprend pas pourquoi le drapeau kanak n’a pas le droit aux honneurs du jour. «Ce n’est pas possible, ici on est à Nouméa, un fief où Sarkozy a fait 88% à la présidentielle et où la question du double drapeau est toujours sensible», répond Gaël Yanno, député UMP.

«Ça a été tès douloureux»

C’est en février 2010 que Pierre Frogier, l’autre député UMP de la Nouvelle-Calédonie, prend tout le monde par surprise en proposant que les deux drapeaux cohabitent désormais. Gaël Yanno s’en souvient comme si c’était hier: «J’étais dans l’avion quand j’ai appris l’initiative de Pierre. Je n’ai pas compris. Pour moi, c’était comme si on hissait le drapeau palestinien sur la Knesset». Yanno a fait son chemin de croix. «Ça a été très douloureux, mais aujourd’hui je suis convainu que c’est la bonne démarche si on veut rester indissociables demain.» Le vendredi 16 juillet 2010, la veille de la venue de François Fillon, à 6h30 du matin, le drapeau indépendantiste a été hissé, pour la première fois, au fronton de la mairie de Nouméa. «Il n’y a pas eu de cérémonie, car le maire avait refusé de venir», se souvient Yanno.

Ce matin, sur la place des cocotiers, l’autre grande place de Nouméa, les anti-indépendantistes, emmenés par Philippe Gomès, dissident de l’UMP, étaient quelques dizaines à manifester pour appeler à un drapeau commun, qui remplacerait celui du FLNKS, au côté de la bannière tricolore.

Nicolas Sarkozy, qui a reconnu avoir longuement réfléchi avant de soutenir le double drapeau, s’est donc adressé d’abord à son propre camp, toujours divisé sur la question: «on peut combattre l’idée mais on ne peut pas accuser ceux qui font ce geste de douter de leur sincérité sur la Nouvelle-Calédonie et la République française». Samedi, pour la première fois, la délégation calédonienne défilera lors de la cérémonie d’ouverture des XIVe Jeux du Pacifique derrière les deux drapeaux. Français et kanak.

SOURCE : Libération