Psy: mensonges et manipulations! ça se soigne!

smartineau.jpg« Je suis souvent de mauvaise foi » !

Pris la main dans le sac, ils nient farouchement et vous perdent dans leurs fausses justifications. Menteurs et manipulateurs à l’extrême, d’où leur vient cet aplomb sidérant pour tordre la vérité ?D’après le philosophe Jean-Paul Sartre, qui fut
l’un des premiers à la théoriser dans L’Etre et le Néant, la mauvaise
foi est « un mensonge à soi », une fuite volontaire et consciente face
à la vérité. Derrière ce comportement, il existe souvent un rapport
biaisé à la vérité qui s’enracine dans l’enfance : la valeur du « vrai
» n’a pas été intégrée.

La sagesse créole dira: Lè ou konpwann ou kouyonné on moun sé vou mem ou kouyonné.

 

Mais non, je te jure, je n’ai pas touché au gâteau ! » Quel enfant n’a pas, les joues couvertes de chocolat, clamé haut et fort son innocence ? Un gros mensonge ? Pas seulement. Car malgré les preuves évidentes qui le trahissent, l’enfant continue de défendre sa cause, au point de sembler lui-même croire en son innocence. Parce qu’il ne doute pas du fait que son entourage puisse percevoir le monde comme lui et à travers lui.

« Les personnes de mauvaise foi restent dans l’exercice de cette toute-puissance infantile, explique Yolande Mayanobe, psychologue clinicienne. Par leur comportement, elles témoignent d’un ego surdimensionné, d’une prétention à se considérer au-dessus de tout, y compris de la vérité. »

Un rapport faussé à la vérité


D’après le philosophe Jean-Paul Sartre, qui fut l’un des premiers à la théoriser dans L’Etre et le Néant, la mauvaise foi est « un mensonge à soi », une fuite volontaire et consciente face à la vérité. Derrière ce comportement, il existe souvent un rapport biaisé à la vérité qui s’enracine dans l’enfance : la valeur du « vrai » n’a pas été intégrée.

Pourquoi ? Parce que dans l’environnement familial, mensonge et vérité n’ont pas été clairement distingués et que le mensonge n’était pas puni. Ou, à l’inverse, parce que les fautes avouées étaient toujours sévèrement réprimées, et le courage d’avouer, jamais reconnu. « Quand le mensonge tient lieu de bouclier, la mauvaise foi peut devenir un mode de fonctionnement systématique et perdre sa dimension immorale », précise Yolande Mayanobe.


Une fragilité narcissique

Cette force de conviction révèle souvent une fragilité narcissique profonde. « Quand mon supérieur m’a fait remarquer que j’avais oublié de lui rendre un dossier, j’ai assuré l’avoir déposé sur son bureau. J’avais trop peur qu’il me vire ! raconte Pierrick, juriste de 26 ans. Et j’ai été si affirmatif qu’il m’a cru. » Pour la personne de peu d’assurance, devoir défendre ses arguments envers et contre tous devient paradoxalement un moyen de s’affirmer.

Une incapacité à exprimer ses désirs

Mais la mauvaise foi n’est pas seulement un problème de « soi à soi ». Elle s’inscrit aussi dans la relation à l’autre et relève alors d’« un processus dans lequel une personne cache ce qu’elle veut afin de mieux l’obtenir, persuadée que c’est le seul moyen d’y parvenir », remarque Hervé Magnin, thérapeute spécialisé dans la communication.

« Je m’arrange toujours pour aller au cinéma avec quelqu’un, témoigne Hélène, 34 ans. Mais je ne dis jamais que c’est juste pour éviter d’être seule. » Cette incapacité à exprimer ses vrais désirs tient au fait que l’adulte n’a pas bénéficié, enfant, d’une écoute et d’une mise en confiance suffisantes. « S’il ne peut pas passer par la porte, il passera par la fenêtre », conclut Hervé Magnin.


Projetez-vous sur le long terme

La mauvaise foi peut servir sur le moment, mais quelles en seront les conséquences à long terme ? En vous engageant sur cette voie, vous rendez impossible la construction de relations durables et de confiance. Et si votre image sociale se trouve d’abord préservée, vous prenez le risque d’être un jour démasqué.


Entourez-vous de gens de confiance

Appliqué à défendre votre cause ou à obtenir ce que vous souhaitez sans le dire, vous en oubliez d’écouter les autres. Pourtant, certains ont sans doute les moyens de vous mettre en confiance et de vous proposer un jeu relationnel sincère. Si vous souhaitez progresser dans le sens d’un « parler vrai », sachez d’abord vous entourer de gens avec qui vous vous sentirez à l’aise pour expérimenter une « vraie » communication.


Exprimez vos émotions

Qu’est-ce que je ressens quand je suis de mauvaise foi ? Dans quel état émotionnel cela me plonge-t-il ? Interrogez-vous. Même adepte de longue date
de ce mode de fonctionnement, vous ne pourrez pas ne pas ressentir le malaise interne qu’il provoque en vous. En osant exprimer cette émotion, et toutes celles qui vous incitent à agir ainsi, vous parviendrez peu à peu à être de nouveau en phase avec vous-même. Et à expérimenter le bien-être que la vérité peut procurer.
 
Conseils à l’entourage
 
Sans entrer dans le jeu de votre interlocuteur, vous pouvez commencer par jouer au faux naïf, un peu à la manière de l’inspecteur Columbo.
 
Prenez tout ce qu’il dit au premier degré, de façon à le mettre face à ses incohérences… sans agressivité.
 
Il continue dans le même registre ? Peut-être vous faut-il restaurer sa confiance.
 
Vous pouvez par exemple lui expliquer, progressivement et respectueusement, l’importance qu’a, à vos yeux, l’honnêteté dans une relation. Vous arriverez peut-être alors à aviver sa confiance en vous et à lui donner le goût du « parler vrai ».
 
TEMOIGNAGE

Valentine, 38 ans,chef de projet dans une PME : « J’ai été démasquée, j’ai dû démissionner »

« Admettre mes torts ou mes lacunes me semblait la pire des humiliations. J’usais donc beaucoup de mauvaise foi, surtout professionnellement. Jusqu’au jour où j’ai été “découverte”. Je dirigeaisun chantier de construction et j’ai mal suivi un plan ; j’ai alors dissimulé les plans originaux et convaincu l’entreprise que je faisais selon ses souhaits. Mais mon assistant m’a “trahie”.

Ce jour-là, j’ai eu si honte que j’ai démissionné. Depuis, j’essaye d’assumer mes erreurs. Car le pire, quand on s’enferme dans ses propres mensonges, est de se perdre soi-même, de se mépriser, bien plus que lorsque l’on reconnaît honnêtement ses faiblesses. »

 
A LIRE :

“Ces gens qui ont toujours raison” d’Hervé Magnin.
Ils transforment la vérité pour parvenir à leurs fins, refusent d’assumer leurs actes… Comment ne plus être victime de leur attitude ? Des clés pour comprendre la mauvaise foi de ceux qui nous entourent, et mieux y faire face (Eyrolles, 2005).