Barack Obama annonce la reprise des relations avec Cuba, après plus de cinquante ans d’embargo : «Todos somos americanos».
Tournant historique. Barack Obama a annoncé la reprise des relations avec Cuba dans un discours très attendu mercredi soir à la Maison Blanche. Son homologue, Raúl Castro, faisait simultanément le même geste depuis La Havane. Les liens diplomatiques sont suspendus entre les deux pays depuis 1961. Le président américain a annoncé l’installation à venir d’une ambassade à La Havane. Il s’est engagé à rendre «plus facile la possibilité pour les Américains de voyager à Cuba» pour permettre aux familles de se rapprocher. Et le porte-parole de l'exécutif Josh Earnest n'a pas exclu une visite présidentielle à Cuba : «Si [le président] avait une occasion de se rendre sur place, [il] ne la laisserait pas passer».
PHOTO : «Fin de l’injustice» dit ce panneau à La Havane. Il représente cinq Cubains détenus aux Etats-Unis, dont trois ont été relâchés aujourd’hui. Source : Reuters
Barack Obama a également reconnu que «l’isolement de Cuba n’a pas fonctionné». Il s’est engagé à amorcer, dans son pays, le débat pour la levée de l’embargo. «Todos somos americanos», a-t-il ajouté en espagnol («Nous sommes tous américains»).
De son côté, Raúl Castro a insisté sur la question de l’embargo : «Cela ne veut pas dire que l’essentiel est réglé. Le blocus […] qui a provoqué d’énormes dommages humains et économiques à notre pays doit cesser.»
Les déclarations des deux présidents font suite à la libération d’Alan Gross, 65 ans, ancien contractuel de l’agence fédérale américaine pour le développement international (Usaid), détenu à Cuba depuis cinq ans. Alan Gross et un espion américain dont on ignore l’identité ont été relâchés mercredi en échange de trois prisonniers cubains, arrêtés en 1998 pour espionnage.
Cet échange de prisonniers marque une évolution dans les relations glaciales qu’entretiennent les deux pays depuis un demi-siècle. Washington a déclaré un embargo économique, commercial et financier à La Havane en 1962, dans le contexte de la Guerre froide. C’est le plus long blocus de l’histoire contemporaine.
Washington conditionnait la levée de l’embargo, ou l’allégement des sanctions, à la libération d’Alan Gross, condamné en 2011 à quinze ans de prison.
«Ouvrir la porte […] pour le commerce, les voyages et l’échange d’idées va conduire à des changements positifs à Cuba, que notre politique d’exclusion n’a pas réussi à produire depuis plus de cinquante ans», a déclaré dans un communiqué le sénateur Richard Durbin, numéro 2 du Sénat et proche du président américain.
De son côté, La Havane dénonce quotidiennement les «condamnations injustes» de cinq de ses agents, «héros de la lutte antiterroriste» dont font partie les trois Cubains libérés.
Cette étape historique est l’aboutissement de plusieurs mois de négociations. Le pape François a joué un rôle de médiation en recevant en octobre au Vatican des délégations des deux pays. Auparavant, la poignée de main échangée par Barack Obama et Raúl Castro lors des cérémonies d’hommage à Nelson Mandela avait illustré leur volonté d’entamer le processus de rapprochement.