Une pratique, contestée par l'opposition, désormais bannie !
Les élus interdits de reverser leurs surplus d'indemnités Le député socialiste René Dosière, à l'origine de la mesure parlementaire. Le Parlement a abrogé une mesure qui permettait aux «cumulards» de reverser à un collègue les sommes perçues au-delà du plafond de 8300 euros. De l'argent qui restera dans les caisses des collectivités.
Les indemnités des élus sont plafonnées à 8300 euros, mais le surplus engendré par le cumul des mandats pouvait jusqu'à présent être reversé à un ou une collègue de leur choix, membre d'une assemblée territoriale, ce qui pouvait engendrer abus et clientélisme. Cette disposition, appelée «écrêtement», ne peut désormais plus s'appliquer, à la suite d'un amendement adopté mardi soir par le Parlement lors d'une commission mixte paritaire. Le surplus restera donc dans les caisses des collectivités territoriales, ville, département, région ou communauté de communes.
«Des rapports des chambres territoriales et de la Cour des comptes ont à plusieurs reprises contesté que l'argent public destiné à un élu puisse être ainsi versé à un autre. La Cour des comptes considère préférable qu'il n'y ait plus d'écrêtement et que la somme demeure tout simplement dans les caisses de la collectivité. Je vous propose donc de supprimer l'écrêtement», a défendu René Dosière, le député socialiste qui a déposé le texte, lors du débat parlementaire le 28 juin dernier. Cette disposition législative était aussi dénoncée par l'association anticorruption Anticor, qui, citée par le site d'information Mediapart, estime que l'écrêtement entrainerait des «risques de dépendance, de collusion et de corruption».
Une «palanquée» de «petits cumulards locaux»
Plusieurs députés UMP ont aussi soutenu cet amendement, comme Franck Gilard. Interrogé par Mediapart, il explique : «Les gens sont toujours prompts à pointer les avantages des parlementaires, mais il est temps de s'intéresser aux petits cumulards locaux, un peu obscurs, qui sont une palanquée».
Car des abus avaient vraisemblablement lieu, à droite comme à gauche. «Beaucoup d'élus écrêtent et reversent à un copain, qui leur refile ensuite l'argent sous la table, en douce !», dénonce un élu interrogé par Mediapart. Les indemnités en supplément étaient aussi parfois reversées à un membre de la famille. Le site avance plusieurs exemples. Ainsi du député Patrick Balkany (UMP), qui avait fait reverser les siennes à son épouse et première adjointe, Isabelle Balkany, en 2008, alors qu'il était maire de Levallois. Ou du conseiller régional de Haute-Normandie Franck Martin, du Parti radical de gauche, également maire de Louviers et président de communauté d'agglomération, qui a fait voter le reversement de son indemnité à sa compagne, également adjointe à Louviers. Soit 1000 euros par mois.
«La règle qui doit être intangible, ce doit être la transparence»
L'Association des maires de France, présidée par le député UMP Jacques Pélissard, également maire de Lons-le-Saunier, s'est opposée à l'amendement. Sans prendre clairement position, Christian Jacob, le responsable du groupe UMP à l'Assemblée nationale, interrogé par France Info, avait répondu : «la règle qui doit être intangible, ce doit être la transparence». Une allusion au fait que l'écrêtement ne peut avoir lieu que sur délibération nominative de l'assemblée concernée. «On peut difficilement trouver plus encadré que ce qui se fait en France, puisque les mandats sont limités à deux, que les indemnités sont publiques, et qu'elles sont plafonnées», avait-il ajouté .
Plusieurs élus, parmi lesquels Marie-Luce Penchard, la ministre de l'Outre-mer, et Philippe Gosselin, le rapporteur du texte, s'y étaient opposés, mais pour des raisons de «forme», estimant qu'il s'agissait là d'un «cavalier législatif», c'est-à-dire d'un texte qui ne se trouve pas à sa place. L'amendement a en effet été glissé dans un projet de loi sur les collectivités territoriales de Guyane et de Martinique. «Nous avons entendu tout à l'heure un certain nombre de parlementaires exprimer leur souci de ne pas stigmatiser l'Outre-mer à l'occasion de l'examen de ce texte. Soulever une telle question, alors que nous débattons d'une évolution institutionnelle, n'est peut-être pas opportun», avait argumenté la ministre lors du débat parlementaire. Elle n'a pas été écoutée.
SOURCE : Le Figaro.fr