SENAT - BUDGET 2011 : CLAUDE LISE DEMANDE A L'ETAT D'HONORER SES DETTES - 71 MILLIONS D'EUROS

Claude Lise vote contre le Budget 2011 

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Dans le cadre de la discussion sur le vote du budget Outre-Mer 2011 au Sénat, le Sénateur Claude LISE demande à la Ministre de l’Outre-mer et au Gouvernement d'honorer la dette de l’Etat au Conseil Général qui s’élève à plus de  71 millions d’euros. 

Le Sénateur demande à la Ministre de mettre en débat au parlement le plus rapidement possible le projet de la Collectivité Unique sur laquelle les électeurs ont été consultés il y a dix mois pour doter les élus d’un instrument de nature à accroître l’efficacité des politiques publiques locales de développement


 

Loi de finances pour 2011
Mission outre-mer

Intervention du sénateur Claude Lise

 

Monsieur le Président,

Madame la Ministre,

Chers Collègues

 

Si je devais m’en tenir à un exercice de comparaison des crédits de la mission outre-mer votée en 2010 et ceux prévus pour 2011, je pourrais me contenter de dire que, dans le contexte budgétaire actuel, vous avez su, Madame la Ministre, obtenir un arbitrage assez favorable. Votre budget ne baisse, en effet, que de 0,5 % en autorisations d’engagement et de 2,3% en crédits de paiement. Et je mesure bien les difficultés que vous avez dû surmonter pour arriver à ce résultat. 

Mais, vous le savez bien, ce n’est pas ce qu’attendent de moi ceux que je représente au sein de cette Haute Assemblée. Car ce qu’ils souhaitent, à l’évidence, c’est que je saisisse l’occasion qui m’est donnée d’appeler, une fois encore, l’attention du Gouvernement et du Sénat sur une situation qui est, vous le savez bien, plus que préoccupante.

La Martinique, en effet, va très mal. Elle s’enfonce dans une récession de plus en plus inquiétante qui dépasse déjà les 7 %. 

Pratiquement tous les secteurs d’activité sont touchés, avec évidemment pour conséquence une détérioration continue du marché de l’emploi. Le nombre de demandeurs d’emploi a progressé de 4,1 % en un an, portant le taux de chômage à plus de 25 % ! Un pourcentage en réalité sous estimé et qui, surtout s’agissant des jeunes de moins de 25 ans, dépasse les 61 % (selon une enquête récente de l’INSEE).

Le secteur du bâtiment et des travaux publics est particulièrement affecté. Il connaît une nouvelle réduction de son chiffre d’affaire cette année après une baisse de 30 % en 2009 ; la baisse d’activité se faisant surtout ressentir dans le secteur du logement privé (où l’on est passé de 4 000 logements construits en 2008 à environ 2 500 en 2010).

Le secteur touristique est également confronté  à de très grandes difficultés. Il accuse une baisse de plus de 8 % du tourisme de séjour et 20 % du tourisme de croisière. 

La plupart des autres secteurs connaissent également une baisse d’activité.

La situation sociale ne peut, dans ces conditions, que continuer à se dégrader. 

Un nombre croissant de Martiniquais subit les conséquences du chômage et de l’emploi précaire. Le nombre d’allocataires du RMI est reparti à la hausse. Le 5ième de la population vive au dessous du seuil de pauvreté. La situation des retraités se dégrade de plus en plus.

Les collectivités territoriales font évidemment le maximum pour jouer le rôle d’amortisseur social. En même temps, elles s’efforcent de soutenir les secteurs économiques en crise, notamment le BTP. Mais elles sont presque  toutes en grandes difficultés financières. C’est notamment le cas, bien sûr, du département, qui doit faire face à une véritable explosion de la demande sociale – l’obligeant à continuer d’aller au-delà de ses compétences légales – alors même qu’il voit geler des dotations déjà insuffisantes et croître une dette de l’Etat qui atteint plus de 71 millions d’euros.

On comprend, dans ces conditions, le sentiment de déception qu’éprouvent les Martiniquais face à la présente loi de finances. C’est qu’ils estiment, à bon droit, qu’en matière d’économies budgétaires, les DOM ont, de façon anticipée, très largement apporté leur contribution. 

En effet, la LODEOM votée en mai 2009, comportait déjà des mesures de restriction en matière de défiscalisation, notamment sur le logement locatif libre et en matière d’exonérations de charges sociales pour les entreprises.

Mais, qui plus est, certains dispositifs importants de cette loi ne sont toujours pas applicables ou susceptibles d’être concrètement mis en œuvre, alors même qu’ils ont été présentés comme particulièrement prometteurs. C’est le cas des zones franches d’activité, de l’aide au fret, de l’aide à la rénovation hôtelière, et surtout du nouvel outil de défiscalisation dans le logement social.

Les économies ainsi réalisées par l’Etat peuvent être évaluées à près de 900 millions d’euros !

On aurait dû en tenir compte dans l’application de la politique actuelle de rigueur. En effet, ces économies ont été opérées sur des dispositifs trouvant, pour la plupart, leur justification dans la nécessité de trouver des réponses adaptées à un mal développement structurel.

C’est ce mal développement que l’on s’empresse de perdre de vue dès qu’il s’agit de passer des grands effets d’annonce à l’action effective. 

Tout comme on oublie alors les accents lyriques sur ce qu’apportent les outre-mer à la France et à l’Europe pour se livrer aux plus froids raisonnements comptables. 

Et ce sont ces raisonnements qui actuellement prévalent dans le cadre d’une politique marquée par une baisse de l’effort global pour l’outre-mer (de près de 1 % en AE après une baisse de 4,2 % en 2010) et par des coups portés à la défiscalisation ; et je regrette évidemment que le Gouvernement soit resté sourd aux propositions d’amendements tendant à sauver un secteur innovant comme celui du photovoltaïque.

Vous l’avez compris, Madame la Ministre, la déception que je suis obligé d’exprimer ne concerne pas essentiellement votre budget, qui ne représente d’ailleurs que 16,5 % de l’effort budgétaire global pour l’outre-mer.

Je tiens, malgré tout, à m’interroger sur le niveau des crédits inscrits sur la LBU. Je connais le discours sur leur sous consommation. Je veux cependant attirer votre attention sur le fait que cette année, en Martinique, le CDH du 16 novembre a mis en évidence que 99 % des crédits de paiements délégués étaient déjà consommés et qu’il existait, compte tenu des programmes de locatifs sociaux pouvant encore être lancés, un besoin complémentaire en AE de 10,7 millions d’euros pour 2010.

C’est donc, en réalité, l’ensemble de la politique actuellement menée qui s’avère particulièrement décevante.

Face aux enjeux réels du développement des DOM. Et elle l’est, évidemment, à la mesure des espoirs suscités par de trop fréquents et bruyants effets d’annonce.

Alors, ce qu’il faut, Madame la Ministre, c’est une courageuse remise en cause de cette politique ; et je sais que vous pouvez y contribuer. Cela pourrait commencer par une réelle attention portée aux différents amendements qu’il nous a été possible de déposer aujourd’hui.

Ensuite par la mise en œuvre rapide, et sans inutile contrainte procédurale, de tous les dispositifs de la LODEOM et de toutes les mesures du Comité Interministériel de l’Outre-Mer. Enfin, par l’inscription de crédits supplémentaires, dans le cadre d’un collectif budgétaire, de façon à dynamiser la politique du logement social et à redonner aux collectivités territoriales asphyxiées, les moyens de faire face à leurs responsabilités et à celles que l’Etat les incite à assumer à sa place.

En ce qui concerne la Martinique, vous comprendrez, Madame la Ministre, que j’ajoute en terminant le souhait que, conformément aux engagements du Président de la République, la collectivité unique sur laquelle les électeurs ont été consultés il y a dix mois, fasse, le plus rapidement possible, l’objet d’un débat au Parlement. 

Dans une situation aussi alarmante que celle que connaît la Martinique, on comprendrait difficilement que l’on tarde trop à doter ses élus d’un instrument de nature à accroître l’efficacité des politiques locales de développement.

Un développement qu’il devient urgent de concevoir et promouvoir à la hauteur de l’engagement des forces vives de la Martinique et des attentes d’une jeunesse impatiente de participer à la construction de son avenir. 


Sénat, 1er décembre 2010


 
Sénateur Claude Lise, 


Président du Conseil Général.