Martinique. Jessica 24 ans est dans un coma artificiel, grièvement brûlée dans l'incendie de son domicile à Saint-Esprit. D'après les éléments de l'enquête, il s'agirait d'un incendie criminel à la suite d'une dispute avec son petit-ami. Ne soyons plus complices, réagissons. Les hommes antillais souffrent certes de séquelles...Mais, il est temps à présent pour les femmes de refuser l'engrenage de la violence.
La violence, c’est l’absence de réciprocité quand l’un donne tout et ne reçoit rien ; quand la force est toujours dans le même camp. Là commence le piège. Bien avant la gifle.
Les violences conjugales: des chiffres éloquents
Il arrive ainsi au chiffre de 410.000 femmes déclarant en 2007 avoir subi des violences de leur conjoint ou ex-conjoint en 2005 et 2006, soit 2,3% des femmes de cette tranche d'âge. Donc, seuls environ 21% des faits donneraient lieu à une plainte, conclut l'OND.
Pour les faits dénoncés à la police et la gendarmerie, c'est la Creuse qui enregistre le plus faible nombre de cas par rapport à sa population féminine (6,1 pour 10.000 femmes). La Seine-Saint-Denis est celui qui détient le record inverse avec 50,1 faits pour 10.000 femmes.
La moyenne nationale étant de 18,7, trois autres départements sont en-dessous de 10 (Vendée, Maine-et-Loire, Ain). Les départements enregistrant des taux supérieurs à 20 sont les Bouches-du-Rhône (25,3), les départements d'outre-mer et du nord comme le Pas-de-Calais (23,2%).
Le taux dépasse 30 en Guyane, Seine-Saint-Denis et dans le Val-d'Oise.
Même si ces différences peuvent s'expliquer par une appréhension différente du phénomène par les autorités, "il serait difficile de soutenir que le taux de 50,1 de la Seine-Saint-Denis en soit pas en partie le révélateur d'un phénomène social", déclare l'OND dans son étude.
Formes de violence :
Il serait abusif de réduire la violence aux coups explique le psychiatre Philippe Brenot. Qu’elle s’exprime par la négligence, le silence, l’absence ou les mots, elle reste extrême dans les relations entre les hommes et les femmes. «Je dénonce la violence ordinaire, banale, quotidiennes, la violence, sourde et aveugle de l’existence féminine, triste héritière d’une domination masculine que beaucoup pensent disparue mais qui restent le ferment de la mésentente conjugale » écrit-il.
Marie-France, Hirigoyen auteure de Harcèlement moral et Femmes sous emprise va plus loin dans les violences faites aux femmes :
« La difficulté à repérer les violences psychologiques vient de ce que la limite en est imprécise, explique-t-elle. Un même acte peut prendre des significations différentes suivant le contexte. S’il est possible d’évaluer les aspects physiques de la violence, il est en revanche beaucoup plus difficile de mesurer ce que ressent une victime de violence psychologique. »
Il s’agit moins de se demander « Est-ce que c’est normal ? » que « Est-ce que cela me convient ? » Dans un couple, la vraie difficulté, c’est de trouver une souplesse, un espace de liberté dans lequel les désirs de chacun peuvent s’épanouir.
L’un des grands classiques de la violence psychologique est l’isolement, à la fois cause et conséquence de la maltraitance.
«Ou désidé kaskod ?! An ké montre’w sa? »
Claquer les portes, briser des objets pour manifester sa mauvaise humeur, mais aussi rouler à toute allure, faire crisser les pneus de la voiture, jouer « l’air de rien » avec un objet dangereux, malmener un animal domestique : ces comportements constituent des actes d’intimidation. Il s’agit tout de même bien d’une violence indirecte, qui envoie un message clair : « Regarde ma force ! Regarde ce que je peux (te) faire ! »
« Sé pa fot mwen»
Tous les violents ainsi que toutes leurs victimes disposent d’une vaste panoplie d’excuses, au moins dans un premier temps, pour justifier l’apparition de la violence. Parce qu’un couple, c’est d’abord une histoire d’amour, une envie de comprendre l’autre, et même d’aimer ses fêlures. Dans la plupart des cas, c’est vrai : ce n’est pas sa faute. Stress, blessures d’enfances, maladie mentale, perversité, éducation, fragilité… La violence a toujours une origine. Mais ce n’est pas une raison pour la laisser s’installer. Surtout lorsque les spécialistes affirment que, prise à temps, elle peut être soignée, et remise à sa place. Avant la première gifle.
« An nou gadé pli lwen »
À la culpabilité de se laisser maltraiter, les victimes ajoutent souvent celle de ne pas savoir (ou oser) partir. Parce que tout le monde leur répète que c’est la seule solution… Pourtant, si elle ne met pas la victime en danger vital, et ne relève pas d’une pathologie grave de l’un des deux partenaires (perversion narcissique, paranoïa, psychopathie…), la violence de couple se soigne aussi.
"Femmes sous emprise, les ressorts de la violence dans le couple" de Marie-France Hirigoyen, Oh ! Editions, 252 p., 18,90 €
"Le Harcèlement moral: la violence perverse au quotidien" Syros, "Hors collection", 216 pages,1998 © Éditions La Découverte & Syros, Paris, 1998, 95 F / 14,48 Euros
ADRESSES UTILES :
Les locaux de L'Union des Femmes de la Martinique sont situés :
- 24, rue Galliéni - 97200 Fort-de-France -
- Tél : 0596 71 26 26 -
http://www.uniondesfemmesmartinique.com/#
Le site de Marie-France Hirigoyen
http://www.harcelementmoral.com , pour trouver informations et pistes de réflexion.
Institut national d’aide aux victimes et de médiation
http://www.inavem.org
Fédération nationale solidarité femmes
http://sosfemmes.com
Centre national d’information et de documentation des femmes et des familles
http://www.infofemmes.com