LULA reçu à Washington par OBAMA
Washington - 14 h30. Le président brésilien a été reçu par Barack Obama. Au menu, la crise mondiale mais aussi les relations avec H. Chavez et l'embargo sur Cuba. Dixième puissance économique mondiale, le Brésil est un interlocuteur incontournable.
Obama compte sur l'appui de Lula avant le Sommet du G20 à Londres et le Sommet des Amériques mi-avril à Trinidad-and-Tobago.
Voir également article de Libération : Le Brésil de Lula, allié stratégique d'Obama
Lula est le premier dirigeant latino-américain à être reçu à la Maison Blanche depuis le début de la présidence Obama, ce qui constitue "une reconnaissance de la place du Brésil dans le monde", a souligné le responsable du département d'Etat chargé de l'Amérique latine, Tom Shannon. La rencontre devait être en grande partie consacrée à la préparation du sommet du G20, dont les ministres des Finances et banquiers centraux se sont réunis samedi au sud de Londres pour tenter de trouver une position commune sur les moyens de relancer l'économie mondiale. "Outre les thèmes comme la coopération bilatérale et avec les pays tiers, l'ordre du jour comprend des discussions sur les options en cours pour faire face à la crise, en particulier les mécanismes pour normaliser le crédit au commerce", avait récemment indiqué le ministre brésilien des Affaires étrangères, Celso Amorim. Le Brésil a joué un rôle fondamental à la première réunion du G20 sur la crise à Washington, en novembre dernier, à laquelle Barack Obama, tout juste élu mais pas encore entré en fonctions, ne participait pas. Le Brésil avait notamment été l'un des pays chargés de rédiger une déclaration commune des chefs d'Etats. Plusieurs sujets de désaccord devront être aplanis en vue du succès du sommet: les grands pays émergents, dont le Brésil, se sont inquiétés samedi de la menace protectionniste, un sujet qui devait aussi être évoqué entre MM. Obama et Lula. Ce dernier devait notamment soulever le sujet des barrières commerciales imposées à l'éthanol brésilien sur le marché américain. Par ailleurs, Barack Obama a réclamé jeudi des membres du G20 des mesures de relance "suffisamment fortes" pour faire face à la crise mondiale, ainsi qu'une coordination pour réguler le système financier. Mais les Européens, Paris et Berlin notamment, s'opposent à de nouveaux plans de relance. Avant de rencontrer son homologue brésilien, le président américain a appelé vendredi le roi Abdallah d'Arabie Saoudite et lui a exprimé "la nécessité de coordonner les efforts internationaux pour rétablir la croissance économique". Il en a fait autant avec la présidente argentine Cristina Kirchner, à qui il a parlé "des moyens de travailler ensemble à résoudre la crise financière mondiale", selon la Maison Blanche. MM. Obama et Lula se retrouveront non seulement à Londres dans un peu plus de deux semaines, mais aussi à Trinité-et-Tobago mi-avril pour le sommet des Amériques. Dans cette perspective, la rencontre de samedi, avait expliqué M. Amorim, devait être l'occasion pour Lula de présenter à Barack Obama "sa vision générale de la région". "Je crois que le message, dans ses grandes lignes, sera de demander plus de dialogue et de compréhension envers la région", a-t-il dit, indiquant que les relations avec le président vénézuélien Hugo Chavez et l'embargo américain sur Cuba pourraient être discutés. Le Brésil allié stratégique d'Obama in Libération.fr C’est un privilège que les présidents américains réservent à leurs plus proches alliés. Premier chef d’Etat latino-américain à être reçu par Barack Obama, le Brésilien Luiz Inácio Lula da Silva devait s’entretenir ce samedi, - et donc en plein week-end - avec le nouveau locataire de la Maison Blanche. Plus grand pays d’Amérique latine, «le Brésil est l’interlocuteur privilégié des Etats-Unis dans la région, explique Rubens Barbosa, ancien ambassadeur à Washington. Pour eux, Lula est un facteur de modération de la gauche radicale du continent», emmenée par le président vénézuélien Hugo Chávez. Chef de file de la gauche light ,le Brésilien débarque à Washington en médiateur. A la demande de Chávez, il tentera un rapprochement entre Venezuela et Etats-Unis. Lula compte également demander à son hôte des gestes de bonne volonté envers l’ensemble de l’Amérique latine afin d’atténuer le sentiment anti-américain qui s’y est développé à nouveau. Catapulté. Mais le Brésil ne se contente plus de son statut de puissance régionale. «Lula veut peser sur les affaires du monde et cela constitue une rupture, car le Brésil est traditionnellement un pays plutôt fermé» , analyse Alfredo Valladão, directeur de la chaire Mercosur à Sciences-Po. Il y a encore quelques années, afficher de telles ambitions aurait d’ailleurs été impensable. L’hyperinflation n’a été enrayée qu’en 1994. Après des ratés, l’économie brésilienne a finalement décollé, se hissant, en 2007, au dixième rang mondial, juste derrière l’Espagne et le Canada mais devant la Russie et l’Inde.«Pour la première fois de son histoire, le Brésil se rend compte qu’il commence à avoir un impact sur le monde» , reprend Valladão. Premier exportateur de plusieurs matières premières (café, sucre, viande, minerai de fer, entre autres), il influe sur les cours mondiaux et s’est imposé dans le cercle restreint des négociateurs du cycle de Doha de libéralisation du commercial international. Détenteur du gros de la forêt amazonienne (à cheval sur plusieurs pays), le Brésil est un interlocuteur incontournable dans les discussions sur le changement climatique. Et le voilà en passe d’être catapulté parmi les dix premiers producteurs de pétrole grâce à la découverte en haute mer de gisements potentiellement énormes. Pour accroître son poids politique, le Brésil de Lula a décidé de jouer un rôle plus actif en Amérique latine. En 2004, le pays a accepté de prendre la tête de la mission onusienne de maintien de la paix en Haïti, la première placée sous sa houlette. Et c’est à son initiative que le Conseil de défense sud-américain a récemment vu le jour, pour permettre aux pays de la région de régler entre eux leurs différends sans l’intervention de Washington. L’intégration régionale, priorité du Brésil, est regardée comme un tremplin pour ses ambitions internationales. Lula veut mettre son pays partout. Il réclame, entre autres, l’élargissement du G 8 et un siège permanent au Conseil de sécurité de l’ONU. Porte-parole. Depuis l’arrivée au pouvoir de l’ancien métallo, il y a cinq ans, le Brésil a inauguré 35 nouvelles ambassades, surtout en Afrique, continent dont les voix pèsent lourd à l’ONU. L’ouverture sur l’Afrique, mais aussi sur l’Inde et la Chine, répond également à la volonté du Président de se poser en porte-parole des pays du Sud.«Le Brésil se montre plus actif que la Chine alors qu’il a moins de 15 % de sa population, fait remarquer Rubens Barbosa. Ou peut-être justement pour cela. Les Chinois ne revendiquent rien, car ils savent qu’il est impossible de les ignorer. Le Brésil, lui, est comme un gamin qui veut attirer l’attention pour montrer qu’il est là et qu’il est fort.» L’opposition critique les «maigres» résultats de cet activisme tous azimuts. Brasília a certes créé en 2003 un groupe de vingt pays émergents qui défendent activement leurs intérêts à l’Organisation mondiale du commerce (OMC), mais il a échoué à leur faire accepter un compromis lors des discussions de l’an dernier à Genève. Le Brésil n’a pas réussi non plus à faire élire son candidat à la tête de l’OMC. Egalement critiquées, l’initiative du chef de la diplomatie, Celso Amorim, qui s’est rendu au Proche-Orient en début d’année pour tenter d’arracher un cessez-le-feu entre Israël et le Hamas, ou encore la volonté affichée de s’inviter sur le dossier de la dénucléarisation de la Corée du Nord, où le Brésil s’apprête à inaugurer une ambassade. «La diplomatie de Lula boxe au-dessus de sa catégorie, renchérit Alfredo Valladão. Le Brésil n’est pas encore une puissance mondiale. Il a les moyens de le devenir un jour, mais il lui faudra résoudre d’abord ses problèmes intérieurs.»