ITALIE : La CJCE interdit le crucifix dans les écoles

crucifix.jpg

Tollé du Vatican et des partis politiques


 
La décision de la Cour de Justice de la Communauté Européenne est critiquée par le Vatican et les principaux partis politiques.


«Cette Europe ne sait que défendre les courges de Halloween» : le secrétaire d'État du Vatican, le cardinal Tarcisio Bertone, commente avec sarcasme l'injection faite par la Cour européenne de justice à l'Italie de décrocher le crucifix des salles de classe.


De part et d'autre du Tibre, au Vatican comme dans toute l'Italie, la sentence rendue mardi par le tribunal européen n'en finit pas de susciter une très vive indignation. Silvio Berlusconi l'estime «absolument inacceptable» : «Elle nous fait douter du bon sens de l'Europe», affirme-t-il. Il la considère comme «un pas de plus vers la négation des racines chrétiennes de l'Europe ». Le nouveau leader du Parti démocrate d'opposition, Pierluigi Bersani, estime que «le bon sens est victime du droit» : «une antique tradition comme le crucifix ne fait tort à personne». Quant au ministre de la Défense Ignazio La Russa, il pense que «jamais l'Italie n'appliquera la sentence». Sa collègue de l'instruction publique Mariastella Gelmini annonce d'ailleurs un pourvoi en appel : «le crucifix fait partie de notre histoire. Personne, pas même un tribunal européen, ne parviendra à effacer notre identité», proclame-t-elle.

Un élément de l'identité nationale 

De gauche à droite, y compris dans les cercles laïcs, mis à part quelques communistes, la réprobation est unanime. Une même indignation parcourt le Vatican. «Cette sentence nous laisse sans voix. Nous ne parvenons pas à nous l'expliquer», déclare le cardinal Giovanni Battista Re. Le préfet de la Congrégation des évêques accuse les sept juges de Strasbourg de n'avoir pas tenu compte du fait que le crucifix est «un symbole universel des valeurs qui constituent le fondement de notre identité chrétienne». La Conférence épiscopale italienne(CEI) dit «son amertume et sa perplexité» et voit dans cette sentence une conception «partielle et idéologique».

Les sept juges de Strasbourg, dont un Italien d'origine polonaise, Vladimiro Zagrebelsky, ont statué sur le recours d'une Finlandaise établie en Italie de longue date, Soile Tuulinki Lautsi. Cette femme, mariée à un médecin toscan, avait été déboutée précédemment de tous les tribunaux italiens dans son insistance à obtenir le retrait du crucifix dans l'école secondaire d'Arezzo où étudiaient ses deux enfants.

Le crucifix a fait son apparition dans les écoles du pays avec l'unité de l'Italie, en 1861. En 1924 et en 1928, deux décrets royaux ont confirmé son droit d'exister dans les établissements scolaires. Droit réaffirmé en février 2006 par décision du Conseil d'État. Au-delà du symbole religieux, les Italiens voient dans le crucifix un élément qualifiant de leur histoire, de leur culture et de leur identité nationale. Le tribunal européen le considère pourtant comme «une violation du droit des parents à éduquer leurs enfants selon leurs convictions (sic !)».

Il est cependant peu probable que cette sentence soit suivie d'effet. Elle risque au contraire de renforcer ceux qui ont peur d'une Italie multiethnique et multiculturelle et voient dans l'Europe une atteinte à leur identité nationale. «Nous sommes les nouveaux croisés qui défendons l'Église catholique», a réaffirmé la Ligue du Nord, le parti populiste et xénophobe de Umberto Bossi. «La décision de Strasbourg sert le message politique de la Ligue», relève Stefano Folli, un éditorialiste qui fait autorité.