Nous n’avons pas la diversité dans la peau. Un constat affligeant annoncé le 27 avril 2010 par la commission médias et diversités présidée par Bernard Spitz. Les travaux menés par les trente membres de cette commission entre 2009 et 2010 à la demande de Yazid Sabeg, Commissaire à la diversité et à l’égalité des chances, font état d’une absence criante de la diversité au sein des entreprises de média. Un bilan sans surprise : la société française peine avec ses minorités. Depuis dix ans, les études, les rapports de missions, les recommandations de tant d’experts sur le sujet dressent le même bilan. Dans ce contexte, la commission médias et diversités apparaît comme un état des lieux supplémentaire. Un de plus.
Diversité ou diversités
La commission Sabeg, réunissant des experts de la communication et des personnalités engagées en faveur de la diversité, a formulé 17 propositions applicables concrètement. Regroupées autour de cinq grands axes fondateurs, ces recommandations ont pour objectif de mieux prendre en compte les diversités, ethno-culturelle et sociale et d’impulser une dynamique nouvelle. « Inciter les entreprises de médias à s’engager pour la diversité », « généraliser la transparence dans les recrutement », et « mieux mesurer la diversité dans les médias » font partie des grandes directions à suivre. De nombreuses entreprises de médias ont déjà adhérées à la charte pour le développement de la diversité. Parmi elles, l’Agence France Presse (AFP), Le Figaro, les chaines hertziennes publiques ou commerciales, NRJ … La commission a d’ailleurs veillé à généraliser la mesure de la diversité instaurée par le Conseil supérieur de l’audiovisuel sur les chaînes hertziennes gratuites à l’ensemble des médias. Tous les secteurs sont représentés : de la presse écrite à l’audiovisuel en passant par la radio et le web. La signature d’une charte est une chose, le passage à l’acte en est une autre. Les entreprises média restent les recruteurs mais selon Jean-Marc Crantor, rapporteur du pôle information de la Commission, « les esprits sont de plus en plus ouverts, cela progresse lentement, mais cela progresse. »
Le diktat du whiteness
Poudrée de talc blanc, les médias français, contrairement à nos voisins anglo-saxons, ont longtemps ignoré la frange colorée de leur population. Programmateurs, rédacteurs en chef, producteurs de séries ou de films, publicitaires sont presque exclusivement des « personnes non colorées. » C’est tout naturellement qu’ils prolongent leur propre représentation de la société dans leur conception des contenus audiovisuels par exemple, déformant sans même y penser le reflet du miroir qu’ils ont en main. « Les Blancs créent l’image dominante du monde et ne se rendent pas vraiment compte qu’ils construisent le monde à leur image » explique Richard Dyer, théoricien du cinéma américain. Une sous-représentation des minorités visibles qui conduit à une sourde frustration. Le rapport médias et diversités établit qu’à peine 6% des locuteurs à la télévision sont issus de la diversité. Un reflet pâle et déformant.
PAR LEILA KADDOUR-BOUDADI