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À 15 h 30, le ministère public a ainsi demandé au tribunal de déclarer le prévenu coupable « d'apologie de crime contre l'humanité » et d' « incitation à la discrimination et la haine raciale » . Le parquet estime en outre que lorsqu'il prononce les phrases incriminées, face caméra, le prévenu est tout à fait responsable et conscient de ce qu'il dit.
Le procureur rejoint en cela, à quelques nuances près, l'argumentation des quatre associations, parties civiles au procès (1). « Quand le prévenu déclare que les historiens exagèrent un peu, qu'il y avait aussi de bons côtés dans l'esclavage, Monsieur Huygues-Despointes ne s'exprime pas en tant qu'historien, ni en tant que journaliste, mais comme descendant de colons blancs - il n'aime pas le terme béké » . Relativisme, minoration du crime, réhabilitation de certains auteurs : pour Me Égéa, de la Licra, ces mots constituent une apologie au sens du droit, c'est-à-dire une « justification d'un certain nombre d'événements » .
Selon le procureur, l'entrepreneur martiniquais, abusé par le journaliste mais jouissant de toutes ses facultés mentales, a dévoilé devant la caméra la « réalité de ce qu'il pense » même s'il ne voulait pas que cela soit diffusé. « Vous n'avez peut-être pas été piégé, mais vous avez été trompé ça, c'est sûr » .
Le diffuseur responsable
Les avocats de la défense se sont acharnés à démonter les accusations qui portent sur leur client : « Je persiste à croire que les faits ne sont pas qualifiés. Ce dossier aurait dû bénéficier d'un non-lieu » , plaide Me Ader, spécialiste en droit de la presse. Selon cet avocat, qui intervenait aux côtés de Me Sénart et Me Rioual, toute la faute incombe au diffuseur du documentaire, qui a délibérément mis le feu aux poudres en pleine période de manifestations sociales. Selon lui, aucune trace d'apologie - au sens d'éloge - dans les phrases de son client.
Sur l'incitation à la discrimination et à la haine raciale, Me Rioual renchérit même : « Le lendemain de la diffusion du documentaire sur Canal + les slogans que j'entendais monter de la rue n'incitaient pas à la haine contre l'homme noir, non! Ils appelaient au meurtre des békés! »
Citant l'actuel président de la République, Nicolas Sarkozy, dans le discours de Dakar qui avait suscité de nombreuses réactions en juillet 2007, l'avocate a argumenté : « Lorsque le président dit : « tous les colons n'étaient pas des voleurs, tous les colons n'étaient pas des exploiteurs. Il y avait parmi eux des hommes mauvais mais il y avait aussi des hommes de bonne volonté » , c'est un calque des propos de M. Despointes. Et pourtant, on ne l'a pas poursuivi pour apologie de crime contre l'humanité ! »
Après deux jours de procès intenses, le tribunal a mis l'affaire en délibéré jusqu'au 15 novembre.
SOURCE : FA Martininque