"Les preuves, qui continuent à s'accumuler, sont assez fortes pour justifier une classification au niveau 2b" – un des cinq niveaux de la classification qui définit des produits "peut-être cancérogènes pour l'homme"–, a estimé Jonathan Samet, président du groupe de travail.
Il s'exprimait à l'issue d'une réunion à laquelle ont participé pendant huit jours à Lyon une trentaine d'experts de quatorze pays sous l'égide du Centre international de recherche sur le cancer (CIRC).
CLASSÉ AU MÊME NIVEAU QUE LES VAPEURS D'ESSENCE
"Le groupe de travail a fondé cette classification (...) sur des études épidémiologiques montrant un risque accru de gliome, un type de cancer du cerveau associé avec l'usage du téléphone sans fil", a dit Jonathan Samet lors d'une conférence de presse téléphonique. Ce classement signifie qu'"il peut y avoir un risque, et que donc nous devons surveiller de près le lien entre les téléphones portables et le risque de cancer", a-t-il ajouté.
Selon Gérard Lasfargues, directeur général adjoint de l'Agence de sécurité sanitaire de l'environnement (Anses), le classement du CIRC était jusqu'à maintenant un cran en dessous (soit "inclassable quant à sa cancérogénicité pour l'homme"). Le nouveau classement est identique à celui de la laine de verre et des vapeurs d'essence.
"Il est important que des recherches complémentaires soient menées sur l'utilisation intensive, sur le long terme, des téléphones portables", a souligné Christopher Wild, directeur du CIRC. "Dans l'attente de la disponibilité de telles informations, il est important de prendre des mesures pragmatiques afin de réduire l'exposition [aux ondes]", a-t-il ajouté.
UN RISQUE NON QUANTIFIÉ
Kurt Straif, du CIRC, a évoqué des moyens de réduire l'exposition. "Ce qui probablement entraîne le plus haut niveau d'exposition, c'est utiliser le portable pour des appels", a-t-il souligné. "Si vous l'utilisez pour des SMS, ou avec un kit mains libres pour les appels, vous abaissez l'exposition de dix fois", a-t-il ajouté.
Les experts ont estimé que s'il existait un lien possible pour les gliomes et les neurinomes de l'acoustique, il n'était pas possible de tirer des conclusions pour les autres types de cancer. Le groupe de travail n'a pas quantifié le risque. Selon le professeur Lasfargues, il se base sur l'étude Interphone, qui a étudié un usage du portable jusqu'en 2004 et a montré une augmentation de 40 % du risque de gliomes chez les plus gros utilisateurs (à l'époque définis comme utilisant l'appareil pendant en moyenne trente minutes par jour durant dix ans).
Le docteur Robert Baan, chercheur au CIRC, a souligné la difficulté de l'exercice en se basant sur une étude relativement ancienne. "Concernant les forts utilisateurs, il faut faire attention, car les données épidémiologiques remontent à dix ans. Entre-temps, la technologie a beaucoup évolué et les téléphones modernes ont une émission beaucoup plus basse que les anciens", a-t-il expliqué.
"Il y a une amélioration de la technologie mais il y a aussi une augmentation de l'usage, il est difficile de faire la balance entre les deux", a-t-il ajouté. Les experts, qui étudiaient aussi les risques posés par d'autres champs électromagnétiques, tels que radars, micro-ondes, émetteurs de radio ou télévision, ou télécommunication sans fil, ont considéré que les preuves étaient dans ce cas insuffisantes.
SOURCE : LeMonde.fr