PARIS (Reuters) - La candidate écologiste à la présidentielle, Eva Joly, a lancé sa campagne samedi par un discours musclé où elle a repoussé l'idée d'un retrait au profit du Parti socialiste et critiqué la "corruption" imputée au pouvoir Sarkozy
Pour son baptême du feu après sa désignation interne par une victoire-surprise en juillet contre Nicolas Hulot, l'ancienne juge née en Norvège a répliqué sèchement au Premier ministre, François Fillon, qui avait paru mettre en cause l'authenticité de son lien avec la France.
"A ceux qui ont eu l'outrecuidance de me manquer de respect, je dirais simplement ceci : moi, je me refuse à trier entre les Français selon leur date de naturalisation ou selon leur lieu de naissance", a-t-elle dit au terme des journées d'été de son parti à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) .
"Je suis Française par choix, par amour pour la France. Je ne suis jamais descendue dans les palais d'un dictateur. Je n'ai jamais confondu l'argent public et l'argent privé", a-t-elle ajouté, évoquant apparemment le séjour, fin 2010, de François Fillon en Egypte à l'invitation d'Hosni Moubarak.
Après trois jours de débat marqués par les rituelles voix discordantes internes à Europe écologie-Les Verts, Eva Joly a réaffirmé que, contrairement à ce que disait la porte-parole du parti Laurence Vichnievsky, son programme comprendrait bien le rétablissement du droit à la retraite à 60 ans.
Expliquant qu'elle n'excluait pas une victoire finale au scrutin de 2012, elle a aussi renvoyé dans les cordes le député européen Daniel Cohn-Bendit, qui estime qu'il faudrait envisager un retrait début 2012 à la lumière d'un réexamen des rapports de force entre droite et gauche avant le premier tour.
"vous m'avez choisie comme candidate écologiste, pas comme candidate au ratissage des voix écologistes pour le compte du PS", a-t-elle dit, très applaudie.
Le PS ne mérite pas à ses yeux tant d'égards car "il s'est trop souvent comporté de manière hégémonique voire méprisante par rapport à nos demandes légitimes", a "trop souvent renié ses engagements" et engage dans les régions des grands travaux nuisibles à l'environnement.
LE "RÉGIME" SARKOZY ACCUSÉ DE "CORRUPTION"
Rappelant son travail de juge d'instruction à Paris dans les années 1990 et 2000, Eva Joly a de plus promis de lutter contre la corruption. "Aujourd'hui comme hier, je reste déterminée à lutter contre la corruption y compris lorsqu'elle touche au plus haut sommet de l'Etat", a-t-elle dit.
Elle a cité les affaires mettant en cause l'ex-ministre du Budget Eric Woerth, l'ex-ministre de l'Economie Christine Lagarde, l'ex-ministre des Affaires étrangères Michèle Alliot-Marie et l'homme d'affaires Ziad Takieddine, présenté comme proche du camp Sarkozy et auquel la presse impute des manoeuvres financières douteuses.
Elle confirme qu'elle entend augmenter la pression fiscale sur les plus riches mais refuse la "règle d'or" proposée par Nicolas Sarkozy inscrivant dans la Constitution le principe de l'équilibre budgétaire, "inefficace économiquement et absurde politiquement".
"Non, M. Fillon, la France n'a pas besoin d'une union sacrée, elle a besoin de solutions nouvelles", a-t-elle dit.
Développant surtout des thèmes économiques et sociaux plutôt qu'environnementaux, elle propose d'interdire certains produits financiers comme une partie des CDS ("credit default swaps") et certaines techniques de spéculation comme les "ventes à découvert".
"Le temps de l'alternance est venue. Pour gagner la présidentielle, notre voix n'est pas un problème, elle est une solution. Nous allons démontrer que le vrai parti du changement, c'est nous", a-t-elle conclu.
Elle a joint sa voix à celles des militants qui scandaient "Nicolas, avec nous !" pour réclamer le retour de Nicolas Hulot, absent de la réunion. Les sondages la créditent actuellement d'environ 5% ou 6% des voix, mais elle dit vouloir dépasser la barre des 10%