Derrière la formulation courtoise et policée de cette interpellation, se dessine, en réalité, une mise en demeure sèche adressée au président de la Région, lui intimant de prendre enfin ses responsabilités dans le contexte d’une « panne » générale de l’économie martiniquaise.
Cette montée au front des chefs d’entreprises n’est donc pas banale, après 17 mois de gestion néo-ppm, le temps sans doute de permettre à l’actuelle équipe de faire ses preuves. Cette lettre ouverte, préparée depuis de longues semaines, amendée collectivement, apparaît donc comme la conclusion d’une rupture progressive entre celui qui avait tout promis à tous et le monde de l’entreprise qui l’avait puissamment aidé à prendre le contrôle de la Région…
La forme utilisée (une lettre ouverte publiée dans France-Antilles), la violence du titre (S.O.S. MARTINIQUE EN PANNE), le choix des termes employés, l’interpellation directe et nominative du président du Conseil Régional, tous ces éléments de discours et de communication expriment une mise en cause sans nuances de la faillite de la « gouvernance » néo-ppm en matière de développement économique de la Martinique.
Certes, cette prise de position n’a pas été conçue en réponse à la conférence de presse du président de Région, en date du 26 octobre ; le processus a été lancé bien avant. Elle met néanmoins en relief le caractère irresponsable et puéril du discours de Letchimy sur la situation de l’emploi en Martinique. Le président de Région se gargarise, en effet, de mots et de bulletins d’autosatisfaction alors que le pays sombre : « Un an après, nous sommes sur la bonne voie », « Nous avons assuré la stabilité sociale », « 2006 emplois ont été générés »(F.A. du jeudi 27 octobre 2011).
L’analyse de Contact-Entreprises, plus proche de la réalité de la situation décrite par l’INSEE et l’IEDOM, offre une vision radicalement opposée : « La Martinique est maintenant durablement installée dans une crise profonde », »le pire est à venir car nous n’avons pas encore touché le fond », le pays est « en panne » et « en récession »…
A deux jours d’intervalle, le contre-pied ne pouvait pas être plus cinglant et plus lourd de sens
L’ancien allié du néo-ppm ne met pas autre chose en lumière que l’échec du « plan de relance » et l’incapacité du président de Région à rétablir « la confiance ». Il lui reproche de ne pas avoir su donner les « signes positifs forts » qui « motivaient précédemment les acteurs privés, entreprises ou ménages »…
Ainsi, si on fait l’effort de lire entre les lignes, la « confiance » aurait disparu …avec l’arrivée des nouveaux « gouvernanceurs » au pouvoir en 2010 !
En conclusion, l’interpellation publique et la mise en cause brutale de Letchimy par Contact-Entreprises indiquent tout à la fois la gravité de la crise et la profondeur de la déception des acteurs économiques qui l’avaient porté au pouvoir. Cette perte de confiance touche aujourd’hui tous les secteurs de la population martiniquaise. Des signes comme le projet de location de deux étages de la Tour de la Pointe-Simon, à raison de 828 000 euros par an, voté par la majorité actuelle lors de la Commission Permanente du 13 septembre 2011, achève d’ajouter au malaise ambiant… L’ère de la « com » est finie… Les choses sérieuses commencent.
Francis CAROLE 30 octobre 2011
