Le port de pêche départemental de Grand ‘Rivière
par Arthur Trébeau
Ce projet d’aménagement d’un montant initial de 23 032 959 € HT consistait à faire de ce port une infrastructure dédiée à la pèche ( 1 333 820 € HT) et au transport de passagers (21 699 139 € HT). Il devait permettre :
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Ce chantier, initialement prévu comme très gros pourvoyeur d’emplois divers et variés, a ruiné les espoirs de la quasi majorité des prétendants. En effet, plus de 250 personnes majoritairement issues des communes du Grand ‘Nord se sont portées volontaires en s’inscrivant sur le registre ouvert à cet effet par la municipalité. Et, contrairement à ce qui était annoncé, l’entreprise portugaise qui officiait sur le chantier était complètement autonome quant au recrutement, et ainsi, on a pu dénombrer que 5 embauches de locaux
Dès le début du chantier, l’ASSAUPAMAR (ASsociation pour la SAUvegarde du PAtrimoine MARtiniquais) a alerté à plusieurs reprises la collectivité territoriale sur des risques potentiels de dysfonctionnements d’ordre environnemental tels que les prélèvements de roches dans le lit des rivières, les nuisances sonores et sur les problèmes inhérents à la poussière dégagée sur le chantier.
A titre d’exemple, les préconisations mentionnées dans le cahier des clauses techniques particulières (CCTP) concernant l’enrochement naturel (article 4.11) n’ont pas été respectées. En effet, à la page 48 du CCTP, il est stipulé : «L'Entrepreneur soumettra à l'agrément du maître d'œuvre les carrières qu'il a choisies. Les propositions devront être accompagnées de toutes les justifications nécessaires relatives à la nature de la roche en place, à ses conditions d'exploitation et aux quantités de matériaux que peuvent fournir ces carrières ». Hors un prélèvement massif de roches a été entrepris dans le lit majeur de plusieurs rivières telles que la rivière de la Capot au quartier VIVE sur la commune du Lorrain.
Par ailleurs, la société responsable des travaux avait installé une entreprise de concassage de roches dans le vieux bourg au lieu dit Bagasse qui fonctionnait de 06 h 30 à 17 h 30, sans interruption avec un bruit strident, insupportable. Le 19 juin 2008, suite à l’intervention sur le terrain de l’ASSAUPAMAR, le Conseil Général a fait arrêter ce chantier. Ce même jour, l’association a obtenu que des mesures efficaces soient prises pour atténuer substantiellement la poussière dégagée par le chantier. Avant la fin du chantier, l’ASSAUPAMAR a, à nouveau, interpellé la collectivité sur les risques encourus en cas de forte houle par les habitants du quartier Bagasse. L’enrochement censé protéger les habitations, a été enlevé et utilisé pour l’aménagement du futur plan d’eau et à ce jour, la situation n’a pas évolué.
Dès le début du mois de juin 2010, soit 3 mois seulement après la livraison du plan d’eau, on apercevait le début d’un ensablement en bordure de la digue. Aujourd’hui, le plan d’eau fait face à un sérieux problème d’ensablement, des habitations ont subis des dommages collatéraux dus au chantier et les travaux d’aménagement des superstructures (aménagements à terre) n’ont pas débuté à ce jour, soit deux après la livraison du plan d’eau.
Nous sommes assez surpris des réactions des responsables concernant l’ensablement de ce plan d’eau, on notera des discordances concernant les causes, certains évoquent même de la « malchance ». Alors qu’à la lecture de l’étude d’impact soumis au dossier de l’enquête publique, on pouvait lire à la page 22 paragraphe Processus sédimentologique : « En 1998, le transport littoral du sable vers l’ouest est évalué par l’université Louis Pasteur à un volume compris entre 30 000 m3 et 100 000 m3 par an……..Une fois que le sable est accumulé à l’abri du port, il n’y a pas de courant littoral susceptible de déplacer les matériaux. Le port va continuer à se remplir de sable. »
Aussi à la page 46, paragraphe ensablement et dimensionnement : «…. il n’y a pas grand-chose qui puisse être fait pour résoudre le problème complètement …» et plusieurs options de choix dans la conception ont été énumérées :
Aucune de ces options n’ont été retenues par la collectivité territoriale.
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Certes des opérations de dragage ont été effectuées en 2011 pour un montant de 80 000 € et d’autres sont en cours pour plus de 140 000 € dont l’objectif est de libérer la passe d’entrée et maintenir un état permettant la navigation. On constate qu’au delà de quelques semaines, le sable revient à sa place et que ces dragages sont sans cesse plus lourds, donc plus chers.
Il est à noter que les observations de l’ASAUPAMAR à l’enquête publique concernant l’ensablement stipulaient :
« La configuration du plan d’eau qui a été retenue risquait très certainement d’entrainer des couts de fonctionnement et d’entretien particulièrement élevés pour pallier au danger d’accumulations importants de sédiments (sable)…… ».
En plus de l’ensablement, des habitations ont été endommagées par le chantier. On peut citer d’une part celles qui ont fait l’objet d’une expertise avant travaux et dont les propriétaires ont reçu du tribunal administratif le compte rendu. D’autre part, celles qui se trouvaient à coté de l’entreprise de concassage, non prévue initialement dans les clauses du chantier et dont aucune expertise avant travaux n’a été diligentée.
Aujourd’hui, aucune contre expertise n’a eu lieu, les propriétaires sont laissés pour compte.
Depuis plus d’une année, la sonnette d'alarme est tirée par des marins pêcheurs, les choses ne semblent pas évoluer efficacement et durablement sur le terrain, ce qui fait craindre une situation de fait accompli irrattrapable pour ce plan d’eau qui a nécessité des budgets importants. En effet, il est fait état que les dépenses s’élèvent à 32 000 000 €.
En sus du problème d’ensablement, nous apprenons que les travaux prévus pour respecter les normes parasismiques concernant la digue en mer n’ont pas été réalisés. Devons nous craindre une catastrophe, en cas de séisme ?
02/05/2012
Arthur TREBEAU
ASSAUPAMAR