ANTILLES -EPANDAGE : SOMMES-NOUS CONDAMNES A VIVRE LE "SUPPLICE DE SISYPHE" ?

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Antilles – Epandage aérien :


Sommes-nous condamnés à vivre 


le « supplice de Sisyphe » ?


par Louis BOUTRIN


 

Après une mise en scène administrative et politique, le secret de polichinelle vient d’être levé : En ce vendredi 10 août 2012,au beau mitan des vacances, le Préfet de Martinique a reconduit pour 6 mois la dérogation à l’interdiction de l'épandage aérien. A l’instar du scandale du Chlordécone, l’exception (la dérogation) tend à remplacer la règle (l’interdiction) et nous nous acheminons vers un régime de dérogations permanentes. 


L’affaire du scandale du Chlordécone est toujours devant les tribunaux, mais rien n'y fait, le lobby latifundiste de la banane montre une nouvelle fois sa toute puissance ! (Devant les caméras de télévision, il pousse même le bouchon à comparer les dangereux pesticides à … de l’aspirine). En nous condamnant à vivre un nouveau « supplice de Sisyphe », l’administration étatique et l’exécutif régional volent au secours des « derniers maîtres de la Martinique ».


Cette décision survient alors même, qu’au nom du principe de précaution consacré par la Constitution, les médecins de Martinique, courageusement, étaient montés au créneau pour tirer la sonnette d’alarme sur les risques avérés des pesticides sur la santé publique. Malgré l’augmentation galopante des cancers de la prostate, des maladies de Parkinson et d’Alzheimer et des pathologies métaboliques, les autorités publiques continuent à sacrifier la santé de la population sur l’autel  des intérêts latifundistes. 


Une véritable mascarade démocratique.

Malgré l’agitation médiatique faite autour de la consultation, nous assistons à une véritable mascarade et un leurre démocratique. En Guadeloupe, plus de 12 000 signataires CONTRE l’épandage aérien et le Préfet n’a pas tenu compte des avis des citoyens. En Martinique, 4 fois plus de bananes que dans l’île voisine, la décision est déjà prise par le Préfet et annoncée sur les médias par le Ministre des Outre-Mers, Victorin LUREL. 

Pourtant la préfecture lance sa fameuse consultation en se gardant bien de réaliser une véritable enquête publique, plus contraignante et surtout plus risquée car plus encadrée juridiquement après la promulgation des lois Grenelle de l’environnement. C’est un déni de démocratie pour les citoyens qui ne peuvent ainsi contester une décision déjà entérinée depuis Paris par le nouveau Ministre de l’agriculture en personne.


L’exécutif régional complice.

Le président du Conseil régional a raté une occasion d’élever le débat politique et de poser les bases pour une sortie de la banane chimique. 

En caricaturant la proposition qui lui a été faite POUR UNE SORTIE PROGRESSIVE DE LA BANANE CHIMIQUE lors de la dernière plénière, il s’est contenté de clamer haut et fort son opposition à l’épandage aérien alors qu’il pouvait peser de tout son poids pour donner du sens à son discours. 

Réunir la profession toutes filières confondues, proposer des alternatives concrètes à la banane chimique, établir un calendrier sur 2 ans (en urgence) et 10 ans (pour le long terme) et aborder la question du financement de la période de transition, constituent autant de pistes à explorer. Mais, rien de tel ! Par son éternelle attitude condescendante, il s’est fait le complice des latifundistes de la banane qui perpétuent le « chantage à l’emploi ». Trop facile, messieurs ! La Cour des Comptes vient de porter un coup d’arrêt à ces prétendus emplois de la banane : Entre 1998 et 2008, c’est plus de 960 Millions d’euros versés à l’agriculture Martiniquaise et principalement à la culture de la banane. La Cour dénonce le préjudice porté aux autres secteurs agricoles par la culture de la banane qui s’avère être une culture budgétivore, source de pollution et qui mine notre santé. Elle nous rappelle que malgré les aides européennes et nationales la banane de Martinique a perdu 38 % de ses emplois entre 2000 et 2007.

 Il est temps d’avoir le courage politique d’aborder cette question de la banane chimique et d’y trouver des alternatives crédibles avant que la Commission européenne ne décide de fermer le robinet des subventions publiques. Si on veut véritablement sauver les emplois dans l’agriculture, c’est maintenant qu’il faut proposer des alternatives chiffrées. 

Quant à la fameuse commission de travail sur l’épandage aérien proposée par l’exécutif régional, elle peut toujours donner l’illusion médiatique de faire quelque chose. Mais, par bien des points, elle nous rappelle singulièrement la position du Général de Gaulle qui disait fort justement : « Quand on veut enterrer un problème, on crée une commission !» 

Louis BOUTRIN 

Président de MARTINIQUE-ECOLOGIE