En Guyane, l'or vert plus précieux que l'or jaune
Opposés à la récente délivrance, par le ministre du redressement productif, d'un permis d'exploitation de mines d'or et substances connexes sur le territoire de la commune de Saül, en Guyane, Aline Archimbaud, Jean-Jacob Bicep, José Gaillou et François Michel Lambert, élus EELV, en demandent l'annulation. «Le peuple guyanais (...), une fois de plus, voit son patrimoine écologique le plus cher, bien commun de l'humanité, passer après les intérêts de grands groupes.»
Nous apprenons que le gouvernement français, par son ministre du redressement productif Arnaud Montebourg, a accordé un permis d'exploitation de mines d'or et substances connexes, dit “ Permis Limonade ”, à la société Rexma, sur le territoire de la commune de Saül, en Guyane.
Nous ne comprenons pas cette décision qui risque d'engendrer des dégâts écologiques irréversibles sur le milieu naturel et sa biodiversité. Comment peut-on justifier cette autorisation d'exploiter, attribuée pour le massif forestier de Saül? Ce site, berceau d'une biodiversité exceptionnellement riche, et avec un fort taux d'espèces spécifiques à cette région, a pourtant été classé, en partie, en zone cœur du parc amazonien de la Guyane, créé en 2007. Cette décision plonge dans la détresse la population de Saül, mais aussi et surtout elle humilie le peuple guyanais qui, une fois de plus, voit son patrimoine écologique le plus cher, bien commun de l'humanité, passer après les intérêts de grands groupes voulant, à n'importe quel prix, exploiter son sous-sol.
Nous, élus écologistes préoccupés par le sort de la Guyane, nous élevons contre cette autorisation qui menace 120 hectares et 6,6 kilomètres de cours d'eau, situés à moins de 3 kilomètres du village de Saül.
Cette décision a été prise contre l'avis de tous, sans concertation locale, contre l'avis du Conseil d'administration du parc national de Guyane, et de son Conseil scientifique, du maire de Saül et de son conseil municipal, et enfin en dépit de tout bon sens écologique.
Nous nous interrogeons sur l'état du droit en Guyane française. Les orientations du Schéma d'aménagement régional guyanais approuvé par le Conseil d’État en 2002 s'opposaient déjà à toute activité minière autour de la commune de Saül. Comment en est-on venus à accorder une autorisation à vocation aurifère dans une zone non autorisée au développement d'activité minière par le schéma départemental d'orientation minière approuvé par décret en 2011? Comment une telle décision peut-elle être prise en contradiction avec le décret du 27 décembre 2012 relatif à la trame verte et bleue (1) ?
Quinze jours après cette terrible décision, l'opposition contre ce projet est croissante. La Fédération des élus verts et écologistes (Feve) a fait parvenir un courrier à ce sujet au premier ministre, neuf scientifiques ont interpellé Arnaud Montebourg, la Fondation Nicolas Hulot a demandé l'annulation du permis. Certains élus locaux ont également pris position contre cette autorisation.
Nous demandons l'annulation de ce permis d'exploitation et nous attendons du Président de la République française qu'il respecte ses engagements, mais aussi qu'il rétablisse le droit en Guyane. Et nous invitons le Président à venir sur place, au cœur du parc amazonien de Guyane, lors de son déplacement en 2013.
Le changement de paradigme en Guyane, nous l'attendons maintenant !
Aline Archimbaud, sénatrice EELV de Seine-Saint-Denis et membre de la délégation sénatoriale à l'Outre-MerJean-Jacob Bicep, député européen EELV d'Ile-de-France et délégué national EELV aux régions et collectivités des outremers.José Gaillou, conseiller régional EELV de Guyane et secrétaire régional de Guyane EELVFrançois Michel Lambert, député EELV des Bouches du Rhône et membre de la délégation aux Outre-Mer de l'Assemblée nationale
(1) « La trame verte et bleue est un réseau formé de continuités écologiques terrestres et aquatiques. Elle constitue un outil d’aménagement durable du territoire et contribue à un état de conservation favorable des habitats naturels et des espèces et au bon état écologique des masses d’eau. Les continuités écologiques qui constituent la trame verte et bleue comprennent des réservoirs de biodiversité et des corridors écologiques. »
SOURCE : Médiapart