Plus de 107 000 morts/an d'un cancer résultant d'une exposition à l'amiante
D'après les estimations de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), plus de 107 000 personnes par an meurent d'un cancer du poumon, d'un mésothéliome (cancer de la plèvre) ou d'une asbestose résultant d'une exposition professionnelle à l'amiante.
Adoptée en 1998 et entrée en vigueur en 2004, la convention de Rotterdam, ratifiée par 152 pays ou "organisations régionales d'intégration économique", institue l'obligation pour exporter certaines substances chimiques, d'obtenir le consentement préalable du pays importateur une fois qu'il a été dûment informé des dangers pour la santé humaine ou l'environnement liés à ces produits. C'est ce qui est appelé la procédure "PIC" (Prior Informed Consent).
Les substances concernées sont inscrites à l'annexe III de la Convention. Leur liste comprend à ce jour 43 produits chimiques dont 32 pesticides (dont quatre sont des préparations considérées comme extrêmement dangereuses) et 11 produits chimiques industriels. Parmi ces derniers figurent les différentes formes d'amiante à l'exception de l'amiante chrysotile, "qui représente 100% du commerce mondial de l'amiante aujourd'hui et 95% de l'amiante commercialisé depuis un siècle dans le monde", s'indigne en France l'Association nationale de défense des victimes de l'amiante (Andeva).
RÈGLE DE L'UNANIMITÉ
La règle en vigueur pour l'inscription d'un produit à l'annexe III impose l'unanimité des parties à la Convention. Le Canada, qui jusqu'à il y a peu, était un grand exportateur d'amiante, avait opposé son veto à quatre tentatives précédentes d'inscrire l'amiante chrysotile, comme le recommande l'organe scientifique de la Convention. "Le Canada, qui ne produit plus et n'exporte plus d'amiante, n'a plus d'intérêt commercial à défendre. Il a fait savoir qu'il ne s'opposerait plus à l'inscription", souligne l'Andeva.
Premier producteur et exportateur mondial, la Russie a pris le relais du Canada depuis qu'elle a à son tour adhéré à la convention de Rotterdam. Le Zimbabwe, qui souhaiterait rouvrir ses mines d'amiante, serait sur la même longueur d'ondes. "Cette attitude, qui rappelle les atermoiements du Comité permanent amiante en France, est en train de préparer une nouvelle génération de victimes de l'amiante, alors qu'il n'y a aucun doute au plan scientifique sur les dangers de l'exposition à la fibre. C'est une nouvelle tragédie différée", tempête Alain Bobbio, secrétaire national de l'Andeva. D'ici le 10 mai, la convention doit se prononcer sur le cas de l'amiante chrysotile mais aussi sur celui de cinq autres substances chimiques.
PROCÈS EN ITALIE
Dans une lettre, la présidente de l'association italienne de défense des victimes de l'amiante (Afeva), Romana Blasotti Pavesi, qui a vu cinq membres de sa famille mourir de l'amiante, a lancé un "appel urgent" aux participants à la conférence des parties pour qu'ils "soutiennent l'inscription de l'amiante chrysotile sur la liste des substances dangereuses de la convention."
Un geste d'autant plus marquant qu'à la fin du mois, le tribunal de Turin devrait rendre sa décision dans le procès en appel des ex-dirigeants d'Eternit, le géant suisse de l'amiante. En première instance, ce tribunal avait condamné deux d'entre eux à seize ans de prison pour leur responsabilité dans la mort de 3 000 personnes sur leurs quatre sites italiens. Le tribunal avait estimé qu'en gagnant du temps et en dissimulant les dangers du "magic mineral", ces dirigeants avaient provoqué une catastrophe sanitaire et environnementale.
SOURCE : LeMonde