PROSTITUTION - PROPOSITION DE LOI : CONTRAVENTION DE 1 500 EUROS D'AMENDE POUR LES CLIENTS

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Les clients des prostituées bientôt à l'amende

Cette proposition de loi sera examinée le 27 novembre. Elle prévoit une contravention de 1 500 euros et des « stages de responsabilisation ».

Pas de peine de prison, mais de lourdes amendes et des «stages de responsabilisation». Solliciter les services d'une personne prostituée sera bientôt un délit, punissable d'une amende de 1 500 euros maximum - le double en cas de récidive.

Décidé à «abolir la prostitution», le groupe socialiste à l'Assemblée s'apprête à déposer une proposition de loi abrogeant le délit de racolage public et sanctionnant les clients par une contravention. Il s'agit d'un engagement de campagne de François Hollande. Mais le texte, présenté par les députées socialistes Maud Olivier et Catherine Coutelle, est soutenu par des personnalités de tous bords.


Il devrait être examiné le 27 novembre, deux jours après la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes.


«L'achat de services sexuels est une violence faite aux personnes prostituées, qui sont à 85 % des femmes, souligne le PS dans un communiqué. Il n'est pas compatible avec les valeurs d'égalité, de refus de la marchandisation du corps et de respect de l'autre qui sont les nôtres.»

S'inspirant en grande partie du rapport de Maud Olivier, présenté à la mi-sep­tembre, la proposition de loi ne reprendra cependant pas l'idée de sanctionner les clients par une peine de prison. «Moi, j'y étais favorable, parce que ça correspond au niveau de violence que ces prostituées subissent, et que les pays dont on s'inspire ont tous mis des peines de prison, pour que ce soit dissuasif, indique la députée. Le mot “prison”? Ça faisait peur. Mais la dissuasion se fera dès lors qu'on posera un interdit. Il y aura les amendes, et aussi les stages de sensibilisation, auxquels je crois beaucoup, par exemple dans une association qui s'occupe d'anciennes prostituées…» Une «dissuasion» qui n'a pas l'air d'effrayer les habitués: «Une semaine avec des prostituées, moi j'veux bien être puni deux fois!» ricane l'un d'eux.

 

Réseaux de proxénétisme


Bâti autour de quatre «angles d'at­taque», le texte vise aussi à lutter contre les réseaux de proxénétisme, à renforcer l'éducation à la sexualité et à améliorer les mesures de protection et de réinsertion des personnes prostituées. «Il s'agit notamment de leur procurer un soutien ­financier et un logement, poursuit Maud Olivier. Mais aussi, pour les personnes étrangères qui ne souhaitent pas retourner dans leur pays, de leur faciliter l'accès à un titre de séjour.» On considère, précise-t-elle, qu'«il y a en France entre 20 000 et 40 000 prostituées, dont plus de 80 % sont étrangères». Une «commission spé­ciale», dont le président sera l'UMP Guy Geoffroy, qui avait remis en 2011 un rapport sur la prostitution, sera bientôt créée «pour discuter d'autres modalités». «Cela permettra, indique Maud Olivier, d'auditionner d'autres personnes, notamment des Suédois et des Norvégiens, qui nous ont inspiré ces mesures.»

 


Et des prostituées? «On n'écoute pas les premières concernées! déplore Morgane Merteuil, secrétaire générale du Strass (Syndicat du travail sexuel). Toutes les excuses sont bonnes pour faire la guerre aux putes… Mais moi je veux pas vivre avec le RSA! S'attaquer à la prostitution et non à la précarité, c'est prendre le problème à l'envers.» Plusieurs dizaines d'associations comme le Strass ont déjà fait connaître leur opposition. «Nous sommes unanimes à considérer que la pénalisation des clients ne fera pas disparaître la prostitution, écrivent-elles dans un “Manifeste contre la pénalisation des prostituées et de leurs clients”, mais accentuera la précarisation des prostituées en les forçant à davantage de clandestinité, et en les éloignant des associations de soutien et de santé communautaires.» Une manifestation est prévue le 26 octobre.

 


Mais Maud Olivier promet que le texte «restera dans le même état d'esprit». «On engage un processus pour que les clients se rendent compte de toutes les idées reçues qu'ils ont en tête, souligne-t-elle. Ce n'est pas de la morale, mais la défense des droits humains. Et si cela ne suffit pas à faire baisser la prostitution, on se donnera les moyens d'aller plus loin.»